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15 juin 2009

"Pourquoi j'ai voté Cohn-Bendit"

 

La guerre interminable que les dirigeants du PS mènent contre eux-mêmes a fini par nous lasser.

      

Amis socialistes,
Pour la première fois depuis longtemps, je n’ai pas voté pour vous dimanche. J’ai même eu un plaisir certain à glisser dans l’urne un bulletin pour Dany Cohn-Bendit, que je connais et que j’estime depuis 1968. Au point où nous en sommes aujourd’hui, me direz-vous, cela nous fait une belle jambe. Soit. Souffrez pourtant que pour une fois, et sans narcissisme aucun, je me prenne pour symptôme et pour objet de réflexion. Je crains en effet que mon cas ne soit largement représentatif.
C’est vrai qu’au fil des années j’avais de plus en plus de mal à voter pour vous. Comme tant de vos partisans qui, à chaque élection, se demandent avec qui ils pourraient bien vous tromper. Ce n’est pas, comme vous le croyez, affaire de droite ou de gauche. Vous passez le plus clair de votre temps, vous consacrez le plus fort de votre énergie à vous échantillonner, à vous positionner les uns par rapport aux autres. Trop à gauche, pas assez à gauche. Et si je vous disais que l’on s’en fiche un peu ? Si par aventure vous reveniez au pouvoir, chacun sait bien que vous feriez tous la même politique. On a vu ça hier, de Mélenchon à Bérégovoy…
Non, voilà la chose qu’il faut bien que je vous dise : la guerre interminable que vous menez contre vous-mêmes a fini par nous lasser. Vous ne vous aimez pas. Alors pourquoi voulez-vous que l’on vous aime ? Dans vos arrière-cuisines, mijote toujours une soupe à la couleuvre. A droite aussi, me direz-vous. Sans doute. Seulement voilà : si nous avons jadis choisi la gauche, c’était dans l’espoir d’y trouver un peu de fraternité, comme dirait Régis Debray. Cela doit vous paraître bien naïf et bien sentimental. Peut-être. Mais c’est justement cette condescendance que vous affichez sans cesse à notre égard qui vous condamne à nos yeux.
Il y a des tribus primitives, forcément primitives, où l’on met à mort les vainqueurs de la course à pied ou du jeu de paume. Eh bien ! la manière dont vous vous êtes entendus – pour une fois ! – afin de liquider Ségolène Royal après la présidentielle de 2007 nous a replongés dans un univers franchement tribal et irrationnel. Ce congrès de Reims en forme d’hallali. La nuit des longs couteaux qui a suivi : Ségolène victorieuse à minuit, miraculeusement abattue à trois heures du matin. Et Martine Aubry sortie tout armée de la cuisse de Laurent Fabius.
On peut ne pas aimer Ségolène et la trouver carrément insupportable. Imprévisible, capricieuse, autoritaire. Tout cela est vrai, mais elle a recueilli 25,87% au premier tour et près de 47% au second. Au regard des résultats d’hier, avouez donc, Martine, que ce n’était pas si mal. Parce qu’elle parlait d’amour, ce qui vous a paru d’une rare obscénité. C’est pourquoi vous n’avez eu de cesse que vous ne creviez votre tambour.
Beaucoup se demandent aujourd’hui si le PS ne va pas cesser d’exister. Mais il y a longtemps qu’il a cessé d’être ! Il y a aujourd’hui des fabiusiens, des strauss-kahniens, des royalistes, des hollandais, que sais-je ? Mais des socialistes, je n’en connais plus. Un parti, cette confédération d’écuries présidentielles ? Vous vous moquez. Alors, allez au diable ! comme dirait Jean-Luc Mélenchon.
Ou plutôt non : revenez à vous et revenez-nous. Ne croyez pas que vous renverserez la vapeur grâce à quelques invectives rituelles contre le libéralisme ou même contre Sarkozy. Ne feignez pas d’en appeler à quelque revanche sociale que vous redoutez plus que personne. Essayez donc d’être simples – et sincères. Demandez-vous pourquoi la crise économique, qui aurait dû vous favoriser, paraît vous disqualifier aux yeux des gens. Ma réponse est que vous êtes les premières victimes d’un rejet du politique, qui est un phénomène international. Parce que vous êtes les champions toutes catégories de la langue de bois. Ce n’est pas que ce que vous dites soit nécessairement mauvais ou inintéressant. C’est que l’on ne vous entend plus. C’est que l’on ne veut plus vous entendre. Essayez de parler simple et vrai, comme Dany, comme si vous n’étiez pas, pour l’éternité, candidats à la prochaine présidentielle. Vous verrez que cela ira déjà beaucoup mieux.
J.Julliard
Source: NObs

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