MG Buffet répond à la lettre d'Aubry
Marie-George Buffet répond à la lettre de Martine Aubry
Par : Bureau de presse
Mis en ligne : 16 juillet
Réponse de Marie-George Buffet suite à la lettre de Martine Aubry : "Chère Martine, La situation du pays est grave. C’est par ces mots, que
nous ne pouvons que partager, que débute la lettre que tu viens de nous
adresser. Mais à ce constat, qui impose effectivement à toutes les
forces de gauche des responsabilités particulières, j’en ajoute
d’emblée un second : si la situation du pays est grave, celle de la
gauche l’est aussi. Et il y a des raisons à l’une et l’autre de ces
situations. La
crise que connaissent notre pays, l’Europe, le monde n’est pas une
crise de plus. Elle est, à nos yeux, une crise globale du système
capitaliste mondialisé. Après avoir construit, ces dernières décennies,
la domination renforcée des multinationales et des marchés financiers,
et la croissance exponentielle des profits sur l’écrasement des revenus
salariaux, sur la mise en concurrence systématique des salariés, des
peuples et des territoires, sur le recul des protections sociales et
des politiques publiques au profit de la marchandisation accrue de
toutes les activités humaines et des ressources naturelles, les
partisans de ce système cherchent aujourd’hui une sortie de crise dont
les salariés paieraient l’addition. C’est inhumain, profondément
injuste et totalement inefficace. On ne sortira plus de telles crises
sans s’attaquer à la domination de ces logiques. La crise écologique et
climatique est d’ailleurs le résultat des ces politiques de profit
court-termistes, poussant à un productivisme aveugle, ignorant la
nécessité d’apporter des réponses durables aux besoins humains, dans le
respect des populations et des éco-systèmes. L’hégémonie capitaliste
sur le monde a de surcroît conduit à l’amplification d’une très grave
crise démocratique qui met à mal à tous les niveaux la légitimité de
choix imposés aux populations contre leurs intérêts et ceux de l’avenir
de la planète. C’est particulièrement vrai de la construction
européenne actuelle, qui bafouant le « non » des Français en 2005 et
exigeant aujourd’hui des Irlandais de revenir sur leur vote, s’acharne
à mettre en œuvre le traité de Lisbonne et ses orientations libérales.
La France est entrée dans cette crise alors même que la droite au
pouvoir, avec à sa tête Nicolas Sarkozy, accélérait la mise en œuvre de
toutes les politiques libérales dont la crise manifeste l’échec
cinglant. La France et son peuple subissent ainsi, avec la crise
capitaliste et la politique de Nicolas Sarkozy, une double peine. Si
dans ces conditions le programme de l’UMP était mené à son terme, ce
serait catastrophique pour l’avenir de notre pays. La France en
sortirait défigurée. Conscient du danger, notre peuple a clairement
manifesté ces derniers mois son opposition à la poursuite de cette
politique. Mais sans alternative politique à la hauteur, cette
opposition populaire risque d’être condamnée à l’impuissance. Et la
droite ne manquerait pas d’exploiter plus encore le désarroi que cela
nourrirait. Il y a donc effectivement urgence à relever le défi de
la construction d’une alternative politique à gauche. Mais il ne
suffira pas pour cela de lancer des appels miracles au rassemblement,
quand à l’évidence l’état actuel de la gauche renvoie à de très sérieux
débats sur l’analyse de la crise et sur la nature des ruptures à opérer
pour en sortir. Tu invites à défricher les voies d’une « nouvelle
démarche de rassemblement à gauche ». Cela passe par une confrontation
transparente, associant le débat public populaire, sur ces choix. La
gauche est divisée et elle doit s’unir. Oui, mille fois oui, mais seule
la clarté des choix et du projet à mettre en œuvre peut l’unir. Cela
vaut à nos yeux pour toutes les échéances, sociales ou électorales.
C’est d’ailleurs cette double ambition, pour nous indissociable, de la
clarté du projet et du rassemblement le plus large jusqu’à constituer
une majorité populaire et politique, qui nous conduits à vouloir
poursuivre et élargir la démarche du Front de gauche que nous avons
initié avec de premiers succès lors de l’élection européenne. Autant le dire franchement, si des mobilisations
sociales ou des batailles parlementaires nous permettent de nous
retrouver, et jamais nous ne refuserons les possibles fronts d’action
contre la politique de la droite, nous ne percevons pas à l’heure qu’il
est la clarté nécessaire dans les positions du Parti socialiste sur
l’Europe, le financement des retraites, la réforme des institutions,
pour ne prendre que ces exemples d’actualité. Et que dire de la
répétition d’alliances locales avec le Modem, en totale contradiction
avec les intentions affichées dans ta lettre. L’état d’esprit constructif qui nous anime face aux
dangers de la situation actuelle me conduit évidemment à accepter la
proposition de rencontre que tu formules. La situation du pays et celle
de la gauche sont suffisamment graves pour ne négliger aucune démarche
de dialogue entre forces de gauche. Mais je le répète, c’est un échange
sérieux que nous voulons, sur le fond des choix devant lequel se trouve
la gauche, et non d’une démarche de façade ou de replâtrage." Marie-George Buffet, Secrétaire nationale du PCF Paris, le 15 juillet 2009.