Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Vu au MACROSCOPE
Visiteurs
Depuis la création 1 378 944
Newsletter
24 août 2009

Chomsky: Crise et espoir.

Noam Chomsky : " Il n'y a plus de sentiment d'espoir "

                        [ 18/08/09 ]

Pour Noam Chomsky, professeur au MIT, la financiarisation de l'économie, l'idéologie " fanatique " de l'efficacité des marchés et le pouvoir croissant du secteur financier ont précipité cette crise. Si celle-ci ne lui paraît pas à la même échelle que la Grande Dépression des années 1930, il estime qu'il y avait alors plus d'espoir dans les catégories modestes.   

Quand vous analysez la crise que nous traversons, comment la jaugez-vous en termes d'importance et d'impact par rapport à d'autres que vous avez connues ?

Mon enfance est celle de la Grande Dépression de 1929, et la crise actuelle n'est pas à la même échelle. En tout cas d'un point de vue économique. Mais d'un point de vue psychologique, ou culturel, je ne sais pas, il y a une différence. Pendant la crise de 1929, les membres de ma famille étaient des travailleurs, tous au chômage. Mais ils avaient de l'espoir.

De l'espoir ?

Oui, il y avait à l'époque le sentiment que les choses s'amélioreraient. C'est une époque, où même si l'on n'avait pas été longtemps à l'école, la culture était beaucoup plus présente dans les classes modestes. On écoutait le Quartet de Budapest, on discutait des mérites de Freud. Les syndicats se développaient et les gens découvraient les vacances. Ils étaient très pauvres mais ils avaient la certitude que la vie était riche, et qu'elle serait meilleure. La période que nous vivons actuellement est beaucoup plus déprimée, il n'y a pas de sentiment d'espoir. Les gens sont des victimes, pas des agents du changement. Pour continuer le parallèle avec les années 1930, il y avait à l'époque beaucoup d'activisme. Il y a eu des sit-in dans des usines. Dans la littérature de l'époque, on décrit les menaces sur l'appareil industriel et la montée du pouvoir politique des masses. Tout cela était très effrayant pour la classe d'affaires.

En quoi est-ce différent aujourd'hui ?

Avant c'était une lutte des deux côtés. Maintenant, il n'y a plus que les riches contre des gens désorganisés. Je vais vous donner un exemple qui est assez éclairant. L'administration Obama est en train de démanteler l'industrie automobile, qui était le coeur de l'industrie américaine. Ca ne dérange pas tant que ça les propriétaires, qui peuvent fabriquer ailleurs pour moins cher. Et avec moins de contraintes environnementales. Et cela ne dérange pas non plus Wall Street qui a le gouvernement et le Congrès dans sa poche depuis la financiarisation de l'économie. Mais on démantèle alors que l'on a vraiment besoin de ces emplois. Ces ouvriers maîtrisent l'acier et nous en avons besoin pour créer des transports ferroviaires rapides et mettre un terme à notre dépendance abusive envers les matières fossiles. Mais que fait-on ? Notre ministre des Transports se rend en France, en Allemagne et en Espagne, pour acheter avec l'argent des contribuables des trains à grande vitesse ! Pendant ce temps-là, on démantèle les capacités de production qui nous permettraient de le faire nous-mêmes. Ce faisant, on détruit la force de travail de communautés entières. Evidemment, les travailleurs pourraient chercher à prendre leur destin en main et produire ce dont nous avons besoin. Ils ne le font pas, non pas pour des raisons économiques, mais pour des raisons sociales. Il n'y a pas de mouvement en ce sens.

Vous critiquez donc l'apathie des ouvriers ?

Ce n'est pas de l'apathie, c'est du désespoir. Ils ne sont pas apathiques, ils sont au contraire très sensibles à ces questions, mais ils ne savent pas quoi faire. Après la Seconde Guerre mondiale, la classe d'affaires a endoctriné la société sur l'américanisme. Celui-ci a tout emporté... les ouvriers, les églises, les écoles, les clubs sportifs, le gouvernement. Les syndicats, les partis politiques ont été éliminés. Il n'y a plus qu'un seul parti, celui des affaires, avec deux factions. C'est donc très différent des années 1930, lorsqu'on pensait qu'on pouvait réformer l'économie.

Pensez-vous que nous sommes en train de rater une occasion de réformer le capitalisme ?

Vous savez, on dit que les Etats-Unis sont le pays du marché libre, celui du capitalisme, et pourtant il repose fondamentalement sur le secteur public. Vous utilisez un ordinateur, Internet, vous prenez un avion, tout cela a été financé par l'Etat. Regardez où nous nous trouvons en ce moment : toutes les technologies du MIT ont été financées par le Pentagone avant d'être passées au secteur privé pour en faire du profit.

Dans cette crise, les régulateurs ont-ils joué leur rôle ?

Le détonateur a été la crise des crédits " subprime " et des instruments financiers complexes. Que faisait la Réserve fédérale ? Elle n'a pas remarqué que les prix des maisons s'envolaient plus que de raison ? Alan Greenspan opérait sur la base d'une croyance religieuse fondamentaliste qui est que le marché est efficace. Ce principe n'a aucune réalité empirique mais il a beaucoup de valeur pour les riches. Les prix étaient devenus extravagants. Les régulateurs n'ont pas pris leurs responsabilités et n'ont pas surveillé des instruments financiers complexes qui rendaient le risque incompréhensible. Ceux qui ont tiré le signal d'alarme se sont fait tirer dessus par les économistes les plus en vue. C'est d'ailleurs à ces derniers qu'Obama a fait appel pour panser les plaies de la crise. Si quelqu'un regarde ça de Mars, il doit s'évanouir de rire ! Malheureusement, cela n'a rien de drôle.

Qu'est ce qui peut changer ?

La financiarisation de l'économie, l'idéologie fanatique de l'efficacité des marchés et le pouvoir croissant du secteur financier ont précipité la crise. Mais je ne crois pas que les choses vont changer. L'industrie financière va sortir plus concentrée, avec quelques dégâts sociaux. Au lieu d'avoir 10 banques trop importantes pour faillir, on en aura deux. Mais le système demeure le même. Le gouvernement continue de les protéger, cela crée des incitations perverses et ils s'en sortent plus puissants que jamais. Ce qui n'est pas une surprise puisqu'ils décident des programmes politiques.

Que pensez-vous des différents sauvetages opérés par le gouvernement ?

Vous savez, les sauvetages sont routiniers et se font sous différentes formes. Les achats publics, par exemple, sont une forme d'aide. La recherche fondamentale subventionnée en est une autre.

Oui, mais que pensez-vous du sauvetage des banques, de la polémique sur les bonus provoquée par les sommes mises par Goldman Sachs pour les payer à ses banquiers ?

Il n'y a rien d'autre à attendre de Goldman Sachs. Ils veulent accroître leurs profits et s'organisent pour cela. A l'Ouest, quand on parle de la crise, on fait référence à la crise financière, mais c'est loin d'être la pire des crises dans le monde. La famine est bien pire. Plus de 1 milliard d'individus n'ont pas assez à manger et l'aide humanitaire diminue parce que les donations se tarissent. Alors, oui, on sauve les banques. Mais le choix des priorités est sidérant.

Une très grande partie de l'économie américaine repose sur la consommation des ménages. Est-ce que la crise peut faire changer cela ?

Oh, ce n'est pas seulement la consommation. C'est aussi la dette. Environ 70 % du PNB viennent de la consommation des ménages et tout cela est alimenté par un niveau de dette sans précédent. Qu'il s'agisse de la dette des ménages, des entreprises ou de l'Etat. Tout cela découle de la financiarisation de notre société. Dans les années 1970, le secteur financier représentait à peine quelques points du PNB, il en fait probablement plus d'un tiers désormais. Et cela s'accompagne d'un énorme pouvoir politique.

Mais on voit bien que le comportement des Américains est en train de se modifier, ils épargnent davantage...

Les gens épargnent plus, il y a un changement, mais l'économie ne peut pas le tolérer si son moteur est la consommation. Elle la suscite et les gens y sont poussés par cette propagande massive que sont la publicité et le marketing. C'est une façon de contrôler les personnes. En les contraignant à s'intéresser aux choses superficielles de la vie. Tout cela contribue à créer un sentiment de désespoir et d'aliénation. Lors de la dernière élection, 98 % des personnes titulaires d'un siège ont été réélues au Congrès. C'est un chiffre choquant quand on sait que le niveau d'approbation du Congrès ne dépasse pas 15 %. C'est l'une des multiples indications de la dépolitisation de notre société. Cela se voit aussi dans le débat sur la santé. Il y a une façon simple d'agir, c'est d'autoriser le gouvernement, comme partout ailleurs dans le reste du monde, à négocier les prix des médicaments. C'est illégal aux Etats-Unis, une loi l'interdit. Et le sujet n'est même pas sur la table aujourd'hui !

L'administration Obama, qui justement essaie de réformer l'assurance-santé, ne vous donne aucune raison d'espérer ?

Regardez qui l'a financé ! Il a eu plus de contributions des milieux financiers que McCain ! Ses réformes sont douces, et elles laissent les compagnies d'assurances contrôler la situation. L'idée d'une assurance publique ne passera jamais. Les laboratoires expliquent qu'ils ont besoin de faire des profits géants pour financer leur recherche mais la recherche fondamentale est faite sur les fonds publics, les laboratoires font surtout du développement. Tous ces sujets ne sont même pas discutés.

PROPOS RECUEILLIS PAR VIRGINIE ROBERT   (À BOSTON)

Son parcours

Né à Philadelphie, il y a quatre-vingts ans, Noam Chomsky est un des dix universitaires les plus cités dans le monde. Fondateur de la grammaire générative, ses recherches ont joué un rôle crucial dans la " révolution cognitive ", qui rapproche le fonctionnement de l'esprit de celui d'une machine de traitement de l'information. A la manière d'un Sartre en France, il a mis son immense notoriété au service de combats qui le situent du côté de l'extrême-gauche. Lorsqu'on le rencontre dans son bureau encombré de livres au MIT, dans un immeuble multiformes dessiné par Frank Gerhy, cet infatigable militant paraît apaisé, tranquille, bienveillant. Jusqu'à ce qu'il se mette à parler. Adversaire patenté de George Bush, cet intellectuel de gauche ne ménage pas pour autant ses piques contre Barack Obama, parce que ce dernier ne bousculera pas l'ordre établi que l'éminent linguiste condamne de toutes ses forces. Polémiste vigoureux, critique acerbe de la politique extérieure américaine, il porte un œil sans complaisance sur la crise actuelle. Celle-ci ne changera rien parce que le pouvoir reste à la botte des financiers, explique-t-il. Il décrit le prolétariat américain dans une situation de désespoir, incapable de s'organiser pour lutter contre les puissances de l'argent.


Source: Les Echos


Mon commentaire: "Tant qu'il y a de la vie... etc.", alors ORGANISONS NOUS, à gauche.  J'insiste: "à gauche".
- D'abord, qui est vraiment "de gauche"?...  Je veux dire "QUI L'A MONTRE"  en soutenant résolument PAR SON ACTION  les populations les plus démunies de sa commune ou de sa région , en agissant pour l'a  (faute de quoi, tout le monde se prétendra de gauche, le temps d'une ou deux élections: même notre Président ... et  même DSK qui a crée les stock options et autres fariboles juteuses).
NB: C'est dire que les étiquettes (MoDem, FG, PS, MRC etc ) , les discours (Sarkozy a subjugué des foules)  , les promesses non accompagnées de "preuves" (actes) sont à prendre avec des pincettes.
- Comment démonter des discours dont l'acteur n'a pas du tout l'intention de passer à l'acte: une seule solution... pour éviter de se laisser encore tromper,  JUGER SUR LES ACTES... Qui dit quoi, et qu'a-t-il (elle) fait en attendant??? Le personnage politique est-il vraiment déjà engagé dans la démarche qu'il clame, ou bien agite-t-il un miroir aux alouettes le temps d'une élection (53% d'alouettes en Mai  2007, ce n'est pas négligeable! Attention de ne pas renouveler l'exploit!).

Publicité
Publicité
Commentaires
I
Fort interessant et juste. Les Etats unis ont la main mise sur l'économie. Ce pays vit tres largement au dessus de ses moyens et fait grossierement payer sa dette au reste du monde. L'Europe est donc un bon moyen pour s'opposer au leadership américain afin de favoriser les équilibres de l'économie mondiale.
Répondre
M
il est tres interessant votre résumé sur les précédentes années fastes de la politique libéraliste-capitaliste ou le navire "etats-déunis" à toujours profités du vent qui les portaient depuis plus de 15 ans à part le début du commencement des épreuves avec le premier évènement du vaisseau "titanic" du 11 septembre par l'éffondrement-somation et la continuité dans les résultats négatives de cette politique scorpionesque désastreuse et ruineuse du monde financier(subprimes) et la fin n'est pas pour demain!!la couleur du ciel americain est beaucoup plus sombre qu'ont le laisse croire mais comme vous le dites si bien vu que tous ces requins blancs sinfiltrent et manipulent les médias ou gouvernement donc il est plus simple de manipuler à grand coup de propagande que tout va bien merci jeudi dernier la bourse de new-york cloturer en hausse mais également le meme jour il y eu aussi une hausse de 500 000 chomeurs de plus!! et oui la crise de 1929 ne sera pas identique à celle de 2009, en 29 elle à mis chaos la finance étasunienne et mis sur le carreaux les masses populaires et ouvrières en les jettant à la rue comme de simples mouchoirs usagés le tout rapidement (pluton-cancer-VI-saturne-capricorne-XII-carré à neptune-VIII-maitre de II) suite aux exes aussi de la démesure financière(mars-jupiter-soleil-carré).pour ce qui est de cette crise elle risque de s'étendre sur du long terme aux mirages et aux espoirs de (retour-reprise)de croissance,inflation,spéculation etc... mais ça ne sera qu'un trompe-l'oeil à décourager plus d'un économiste. ne l'oublions pas nous sommes entré dans un tout nouveau cycle 2008/2025 de rigueur et de patience(fusion-pluton-saturne) avec une politique de remise à plat qui va se placer insidieusement afin de calmer et refroidir tout le monde afin de donner un grand coup de frein aux hardeurs de l'économie-mondiale du cycle précédent 1995/2008 de mondialisation- consommation-production-pollution-réchauffement à l'exes dans le délire du possible au risque d'etre: restriction-limitation-stucturation-répréssion dans les années à venir avec un retour des valeurs beaucoup plus authentiques,de plus qu'à l'ouest il y eu une naissance au printemps dans une porcherie du mexique d'un virus H1 qui va sévir sur tous les pays de l'hémisphère nord avec le risque d'une mutation et sans parler de l'autre naissance en 1995/96 à l'est dans un poulailler de chine du virus H5 qui va revenir dans l'air du temps à l'automne avec le retour des oiseaux migrateurs.je croix et j'ai bien peur qu'il y est une actualité chargé dans les années autour des E:économie-épargne-écologie-épidémie-énergie en plus du retour au protectionisme-conservatisme-puritanisme et aux idéaux d'extremes gauche-droite.également le retour des valeurs de responsabilité et de respect et non aux valeurs de spéculation sur le dos du travail et travailleurs pour une bande de maffieux qui profite sans scupules aucun de la situation prospère depuis des années de l'expansion-éxagération.je croix que la politique économique-énergique-épidémique-climatique va s'inverser!! du 20eme siecle hémisphère-ouest-americain au 21eme siecle hémisphère-est-chinois-russie et de l'hémisphère nord-riche à l'hémisphère sud-pauvre vont un peu plus sourire sur cette planete bleu à tout le monde.à suivre sur un autre versant...
Répondre
Publicité
Vu au MACROSCOPE
Derniers commentaires
Archives
Publicité