Bayrou est-il devenu neutre?
(Photo Alibaba0-flickr-cc)
François Bayrou a écrit, sous le titre « Abus de pouvoir »,
un livre fort, argumenté et, ce qui est rare de la part d’un homme
politique, remarquablement bien écrit. Tout le monde aurait dû le lire :
il y dénonçait le très préoccupant processus d’appropriation, ou plutôt
d’accaparement de tous les pouvoirs par le clan sarkozyste et sa
tendance à en abuser « absolument ». Il aurait pu ne pas écrire ce
livre, mais il l’a écrit….et publié d’ailleurs au mauvais moment,
puisque cette initiative a contribué aux élections européennes, en
polarisant le débat sur son duel avec le chef de l’état, à donner
l’impression qu’il se trompait d’élection.
Or le patron du Modem
aurait déclaré, si j’en crois les gazettes, qu’au second tour des
élections régionales les candidats de son parti devraient conserver leur
totale autonomie, c’est-à-dire - si j’ai bien compris - rester neutres.
Donc Sarkozy concentre tous les pouvoirs - lui et les siens
contrôlent l’Elysée, Matignon, l’Assemblée nationale, le Sénat, le CSA,
le Conseil constitutionnel, les grands moyens d’informations de masse,
le pouvoir économico - financier, la plupart des instituts de sondages
–, il en abuse gravement (ce n’est pas moi qui le dit c’est Bayrou)…seul
lui échappe, finalement, le pouvoir local et régional qu’il voudrait
précisément conquérir ou reconquérir….en fonction de quoi, s’il y
parvenait, il n’y aurait quasiment plus de contre pouvoir. Et, au moment
du choix décisif entre le pouvoir qui veut s’adjuger tous les pouvoirs
et les contre pouvoirs républicains, il faudrait rester neutre ?
Vraiment ? Dans ce cas l’acte qui consiste à écrire et à publier ce
livre deviendrait incompréhensible. Donc si c’est vraiment la ligne que
préconise François Bayrou (mais peut-être est ce une mauvaise
interprétation) le Modem est mort et Bayrou avec.
L’ « autre voie »,
qui implique une radicale réinvention du politique c’est-à-dire la
définition d’un « en avant » capable de déboucher sur une véritable
alternative et non sur une simple alternance, (cela n’a jamais été aussi
nécessaire), ne saurait être assimilé à un centrisme mou c’est-à-dire à
un trou. La vérité n’est pas toujours au même endroit, mais elle ne
situe jamais au milieu. Entre la république et le pouvoir personnel
peut-on être neutre.
PS- Cohn-Bendit, lui, a comparé Georges Frêche à Mussolini. Comme le ministre Bussereau avait comparé Ségolène Royal à Hitler. Ça continue ! On dirait du BHL ! Quand prendra-t-on conscience que la fascisation systématique de l’autre est la caractéristique même de la méthode stalinienne?
MARIANNE
Mon commentaire: il est intéressant de voir que JF Kahn s'étonne enfin des hésitations et tiédeurs de celui qu'il soutenait ... Mais convenons, que, de ce fait , JF Kahn a aussi l'immense (et rare) mérite de suggérer qu'il s'est peut-être trompé en soutenant Bayrou. Il montre qu'à défaut d'avoir été claivoyant en cette occasion , il a le mérite de pratiquer une honnêteté intellectuelle rigoureuse, exigeante quoique cela puisse en coûter à son "ego".