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30 juillet 2011

D. Batho: L’échec de la droite face à la délinquance des mineurs

Sur le blog de Delphine Batho

Intervention à l’Assemblée nationale de Delphine Batho mercredi 22 juin 2011 lors de l’examen du projet de loi sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs.

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, hier, Dominique Raimbourg et George Pau-Langevin ont largement démontré en quoi ce projet de loi prétendument consacré aux jurés populaires non seulement n’apporte pas de réponse aux difficultés actuelles de la justice, mais risque de les aggraver. Il prévoit même l’inverse de ce que proclame son titre, puisqu’il vise notamment à réduire la participation populaire aux jurys d’assises.

Pour ma part, je concentrerai mon propos sur la délinquance des mineurs.

Monsieur le ministre, il y a les débats parlementaires, les textes et les discours, et il y a la réalité de la prise en charge des mineurs délinquants en France.

 

La première question qui se pose est donc celle de savoir si ce texte apporte une réponse aux problèmes actuels de la justice des mineurs. Pour y répondre, je prendrai l’exemple des établissements pour mineurs, où sont détenus les mineurs et où les incidents se multiplient de façon récurrente. Lorsque je vous ai interrogé sur ce sujet, il y a quelques jours, en commission, vous ne m’avez pas répondu. Aussi permettez-moi de vous rappeler un certain nombre d’incidents récents Le 12 avril dernier, à Meyzieu, une éducatrice de la PJJ a été prise en otage.
Le 2 mai, à Marseille, une surveillante a été agressée, ligotée et bâillonnée. Début mai, à Lavaur, dans le Tarn, de multiples violences se sont produites pendant plusieurs jours.

Lundi dernier, à Meyzieu, un surveillant a été giflé par un détenu. En raison de ces événements, les personnels de plusieurs établissements pour mineurs étaient en grève la semaine dernière.

Cette situation n’est pas nouvelle. En 2008, le rapport de Michèle Tabarot avait déjà révélé un certain nombre des difficultés que connaissent les établissements pour mineurs. J’avais alors demandé une remise à plat complète du projet de ces établissements, où la majorité des détenus sont des prévenus. Aujourd’hui, c’est le contrôleur général des lieux privatifs de liberté lui-même qui dénonce leurs défauts de conception. Un récent rapport d’inspection de la PJJ et de l’administration pénitentiaire a déploré « l’affectation systématique de jeunes professionnels inexpérimentés, la collaboration imparfaite entre la PJJ et l’administration pénitentiaire, l’architecture totalement inadaptée de ces établissements construits en partenariat public-privé, organisés autour d’une cour centrale qui rend la violence contagieuse, l’incohérence des parcours des mineurs incarcérés, qui sont ballottés entre les différents types d’établissements sans réelle logique ni pénale ni éducative. » Ce rapport met d’ailleurs en cause le concept même des établissements pour mineurs.

Ce rapport est le quatrième ou le cinquième consacré aux EPM : tous disent la même chose, et le Gouvernement donne le sentiment d’être spectateur. C’est pourquoi, monsieur le ministre, nous aimerions connaître votre diagnostic, les mesures que vous comptez prendre et les réponses que vous entendez apporter aux revendications des personnels.

Chacun s’en souvient, les EPM étaient au cœur des dispositions que la majorité avait fait voter en 2002 dans le cadre de la loi « Perben I ». Au moment où l’on nous demande de modifier l’ordonnance de 1945 pour la trente-cinquième fois – pour la cinquième fois depuis le début de cette législature –, le Gouvernement doit être mis face à ses responsabilités, à ses résultats, à son bilan.

 

 

La deuxième question est celle de savoir si le projet de loi apportera une efficacité nouvelle en matière de lutte contre la délinquance des mineurs. Il est permis d’en douter. Chers collègues, souvenez-vous : en juillet 2007, peu de temps après la victoire de Nicolas Sarkozy à l’élection présidentielle, le premier texte de la législature examiné par la commission des lois était consacré aux peines plancher. Le Gouvernement nous avait alors annoncé que l’application de ces peines aux récidivistes âgés de seize à dix-huit allait résoudre le problème de la délinquance des mineurs. Déjà, il écornait les principes de l’ordonnance de 1945, puisque son texte prévoyait qu’en cas de récidive, les mineurs âgés de plus de seize ans devaient être jugés comme les majeurs. C’est le leitmotiv de la majorité, mais, à l’époque, elle ne s’en cachait pas : vous ne preniez pas les mêmes précautions oratoires qu’aujourd’hui. « Oui, nous considérons en effet qu’un mineur multirécidiviste de plus de seize ans peut être jugé comme un majeur » déclarait ainsi, en juillet 2007, Jean-Luc Warsmann, président de la commission des lois.

Au moins la majorité a-t-elle le mérite de persister dans la même voie : elle a débuté la législature en instaurant les peines plancher pour les mineurs ; elle l’achève en instituant les tribunaux correctionnels pour mineurs. La boucle est bouclée. Mais, entre-temps, que s’est-il passé ? Quel est le bilan ? Quels sont les chiffres ?

En 2005, le taux de réitération des mineurs était de 30 %. Aujourd’hui – c’est Éric Ciotti qui l’écrit dans son rapport –, 34 % des mineurs qui ont fait l’objet d’une décision pénale commettent une nouvelle infraction dans l’année. La situation s’est donc dégradée. On nous avait annoncé que les peines plancher allaient résoudre le problème de la délinquance des mineurs ; on constate, par exemple, que le nombre de mineurs mis en cause pour des violences physiques non crapuleuses a augmenté de 57 % depuis 2007. Là encore, la situation s’est donc dégradée.

 

 

Monsieur le ministre, chers collègues de la majorité, non seulement votre politique porte atteinte aux principes élémentaires de la justice des mineurs, mais elle se solde par un échec. C’est un naufrage total.

Pourtant, vous revenez, quatre ans après, comme si de rien n’était, avec les mêmes arguments, les mêmes recettes, le même empilement législatif, la même fuite en avant. Mais pour quelle efficacité ?

Vous prétendiez refondre l’ordonnance de 1945 dans un code de la justice pénale des mineurs et nous étions prêts à en discuter, pour peu que les principes constitutionnels soient respectés. Vous aviez même créé une commission pour engager ce travail. Mais vous n’avez rien fait.

Toute votre erreur tient au fait que vous vous focalisez, comme l’illustre la loi créant les peines plancher, sur les récidivistes de seize à dix-huit ans, alors qu’il faudrait concentrer l’effort là où tout commence, là où se situe l’enjeu primordial pour éviter la récidive, c’est-à-dire sur la nécessité d’apporter une réponse adéquate aux primo-délinquants.

Pour illustrer les défaillances, les failles de notre système en matière de réponse aux primo-délinquants, permettez-moi de vous citer un exemple éloquent. Des parents désespérés sont récemment venus me voir dans ma permanence parlementaire parce que, depuis plus d’un an, leur fils s’enfonçait dans la délinquance sans que rien ne l’arrête. En juin 2010, celui-ci, âgé de 14 ans à l’époque et déjà presque complètement déscolarisé, a commencé à commettre des infractions en raison de mauvaises fréquentations et de comportements addictifs. Les parents ont frappé à toutes les portes pour tenter de trouver une solution ; rien ne s’est passé. À l’automne, l’adolescent est brièvement hospitalisé pour traiter son addiction, mais il fugue de l’hôpital et le personnel soignant estime qu’il ne peut pas se substituer à la justice – ce que l’on peut comprendre. En décembre dernier, il y a sept mois, il commet des délits de plus en plus graves. Au moment où je vous parle, il fait l’objet de cinq mises en examen pour cambriolage et n’a toujours pas été jugé. En avril, il a été condamné, pour les faits les plus anciens, à une mesure de réparation. Cette décision, prononcée par le tribunal pour enfants, ne lui a toujours pas été notifiée et n’est pas d’avantage mise en œuvre. Depuis le début de son parcours judiciaire, il a vu trois juges des enfants différents. Enfin, le 1er juin dernier, il a été placé en garde à vue après avoir donné un coup de couteau ; la victime s’est vu prescrire une ITT de trente jours.

Depuis le mois de février dernier, date à laquelle je les ai rencontrés, les parents de ce mineur demandent qu’il soit éloigné et puisse obtenir une place dans un centre éducatif. Pour de nombreuses raisons, il ne l’a pas obtenue. Ils avaient fait cette demande bien avant que leur fils donne un coup de couteau. Or, ce n’est qu’après avoir commis ce geste qu’il a été, pour la première fois, et en urgence, placé en foyer, dans l’attente de son jugement.

Si l’on fait le bilan, en un an, pas une fois il n’a fait l’objet d’une sanction suffisamment ferme et bienveillante. Comme le disent ses parents, « ce qu’on aurait voulu, c’est une réponse au bon moment pour éviter que le gamin “parte en vrille”. »

Voilà la réalité du terrain, et les situations que tous les élus rencontrent. Elles illustrent les failles qui existent, non pas dans les textes, mais dans la prise en charge concrète qui permettrait d’éviter cette escalade, car ce parcours est, hélas ! comparable à celui d’un certain nombre de mineurs. C’est pourquoi, lors de chaque débat parlementaire, nous avons proposé sans relâche que l’on explore une autre voie pour combattre la délinquance des mineurs, une voie qui privilégie la prévention et la sanction précoces.

La prévention précoce, c’est l’inverse de ce que vous faites, puisque vous avez démantelé toute politique préventive. Les besoins éducatifs, les parents désemparés, la perte des repères, le non-respect des règles, bref : tout ce qui demande de nouveaux moyens humains et de nouvelles méthodes de travail pour prévenir les comportements violents a été ignoré par le Gouvernement. Pis, sa politique a consisté à supprimer les surveillants et l’encadrement adulte dans les collèges et à fragiliser tous les acteurs de terrain en réduisant les subventions des associations et les budgets éducatifs. Il faut croire que la seule chose que le Gouvernement sache faire en matière de prévention, c’est commander des rapports. On en dénombre, tenez-vous bien, quatre en moins d’un an – le rapport Ruetsch, le rapport Bockel, le rapport Reynes, le rapport Bénisti –, si bien que je me demande si quelqu’un, au Gouvernement, prend la peine de les lire.

La sanction doit, elle aussi, être précoce. À l’inverse de la logique de vos tribunaux correctionnels pour mineurs, c’est sur les primo-délinquants que nous devons concentrer les efforts. Ce qu’il faut, c’est une sanction ferme, rapide et proportionnée dès le premier délit, c’est-à-dire sans attendre que s’installe l’escalade que je décrivais tout à l’heure. Dans le rapport de la mission d’information sur l’exécution des décisions de justice pénale concernant les personnes mineures, Michèle Tabarot indiquait d’ailleurs qu’« une prise en charge précoce des primo-délinquants serait à la fois plus efficace et moins onéreuse. Elle permettrait d’éviter la réitération et la récidive, avec un coût moindre pour le système judiciaire ».

Ce rapport démontre également que près de 70 % des mesures alternatives aux poursuites sont de simples rappels à la loi. D’ailleurs, le recours à ces rappels à la loi prononcés par les délégués du procureur a augmenté de 6 % entre 2007 et 2009 – ce sont les derniers chiffres disponibles – quand, dans le même temps, le nombre d’affaires « poursuivables » augmentait de 0,54 %. Cela en dit long sur le grand écart qui existe entre les discours vigoureux que nous entendons dans cet hémicycle et la réalité.


À l’inverse de la réponse factuelle et superficielle du rappel à la loi, la logique de la sanction précoce est de ne pas laisser s’installer un crescendo de comportements violents, en répondant au moyen d’une échelle de sanctions appropriée et claire, compréhensible par le citoyen : la mesure éducative d’abord, puis la réparation, l’encadrement, l’éloignement, enfin l’enfermement – uniquement en dernier recours. Cette échelle de sanctions passe par le développement massif des tuteurs référents, susceptibles de suivre dans la durée les mineurs soumis à des sanctions éducatives ; par des centres éducatifs renforcés ; mais aussi par de nouvelles formes de prise en charge, consistant par exemple en l’adaptation aux mineurs délinquants de l’encadrement mis en œuvre dans les établissements publics d’insertion de la défense – les EPIDE – où des équipes pluridisciplinaires composées d’anciens militaires, d’enseignants, de personnels d’insertion, suivent de jeunes majeurs pendant au moins huit mois, en leur prodiguant une remise à niveau des fondamentaux scolaires, une éducation civique et comportementale structurante et une préformation professionnelle. Des collectivités locales ont proposé d’expérimenter cette solution nouvelle, mais le Gouvernement a refusé.

Un bref témoignage valant souvent mieux qu’un long discours, je veux vous lire un extrait des cahiers de doléances du tribunal de grande instance de Niort, plus particulièrement de son tribunal pour enfants : « La prise en charge des mineurs se heurte à une insuffisance d’établissements spécialisés, alors même que le phénomène est maintenant connu de mineurs qui, très jeunes, s’inscrivent dans une spirale délinquante et présentent très rapidement un profil multirécidiviste, épuisant en cela les dispositifs classiques. Dans les Deux-Sèvres, aucun établissement spécifique n’existe, c’est pourquoi les juges des enfants sollicitent la création d’établissements spécialisés, qui prennent la dimension de la problématique posée par les très jeunes multirécidivistes ». Voilà bien la preuve du réel besoin de structures alternatives à celles de l’enfermement dans les EPM et les centres éducatifs fermés.


Aujourd’hui, un peu avant le coup de sifflet final de cette législature, nous voyons M. Ciotti présenter, non sans habileté, cette nouvelle forme d’encadrement comme une idée nouvelle qu’il serait prêt à mettre en œuvre, alors que le 2 septembre dernier, Hervé Morin, ex-ministre de la défense, s’y opposait farouchement – je tiens à votre disposition le texte de sa déclaration. Personne n’est dupe de ces propositions de loi de dernière minute n’ayant qu’un seul objectif : reprendre une bonne idée pour mieux la vider de son contenu.

 

Mes chers collègues de la majorité, la vérité de votre politique est dans vos actes et, alors que vous êtes aux responsabilités depuis neuf ans, aujourd’hui encore, nous examinons un texte dont la logique n’est pas celle de la sanction précoce ni celle du développement d’un nouvel encadrement.

Non, la logique de ce texte est celle de l’alignement de la justice des mineurs sur celle des majeurs ; celle de l’enfermement comme seule réponse à la récidive et à la réitération des mineurs délinquants ; celle d’une justice d’abattage, là où il faudrait une justice certes beaucoup plus rapide, mais aussi beaucoup plus personnalisée.


Si c’est à juste titre que vous évoquez les délais de jugement, je me permets de vous rappeler qu’avec mes collègues Dominique Raimbourg et Manuel Valls, en juillet 2007, mais aussi en 2009 et en 2010, lors de chaque débat parlementaire sur la justice des mineurs, nous avons proposé des amendements pour que le jugement intervienne plus rapidement par rapport à la commission du délit. À chaque fois, le Gouvernement et la majorité parlementaire ont repoussé ces amendements au motif que leur adoption nécessiterait des moyens. Et aujourd’hui, vous versez des larmes de crocodile sur la lenteur de la justice des mineurs !

Je repousse aussi l’argument selon lequel – je vous cite, monsieur le ministre – « cette nouvelle juridiction apportera une réponse mieux adaptée, du fait de sa plus grande solennité et de sa charge symbolique ». Franchement, compte tenu du profil des mineurs récidivistes de plus de 16 ans, croyez-vous que votre tribunal correctionnel pour mineurs va les impressionner, eux qui ne craignent ni la police ni la prison ? Il ne faut pas compter sur un effet dissuasif des tribunaux correctionnels pour mineurs.

En fait, ce n’est pas un hasard si, plutôt que de procéder à la fameuse refonte complète de l’ordonnance de 1945, vous préférez la démanteler étape après étape, hier avec les peines planchers, aujourd’hui avec ce tribunal correctionnel, en faisant à chaque fois mine de ne pas toucher à ses principes fondamentaux et en biaisant avec la jurisprudence constitutionnelle.

À chaque fois que vous avez réuni des commissions pour procéder à une réforme d’ensemble, ces commissions, y compris la commission Varinard, se sont prononcées de la même manière – à l’exception de deux propositions –, en affirmant leur attachement à ce que les principes fondamentaux de la justice des mineurs soient non seulement maintenus, mais renforcés. Il est un principe très simple, un principe élémentaire : c’est que la vie d’un jeune n’est pas écrite d’avance, et qu’il est faux de penser qu’à 13, 15, 16 ou même 18 ans, les parcours, les comportements, sont définitivement figés. Quand vous touchez aux principes de l’ordonnance de 1945, vous renoncez à cette idée qu’un relèvement du mineur est possible. Fondamentalement, c’est cela, votre conception et votre idéologie : vous pensez qu’il n’y a plus rien à faire pour lutter contre la délinquance des mineurs, et qu’il n’y a donc plus qu’à les traiter comme des majeurs !

Chers collègues, ce texte tente laborieusement de camoufler le naufrage de la politique judiciaire de l’actuelle majorité. C’est en fait un texte identitaire, un texte idéologique dans lequel la droite essaie de retrouver des raisons de croire dans sa propre politique, dont l’échec est patent.

La droite s’est fait élire en 2002 sur le thème de l’impunité zéro. Presque dix ans plus tard, la justice est en crise et en souffrance. Ce n’est pas l’opposition qui le dit, c’est Étienne Blanc, qui n’est pas député socialiste et qui, tout en prenant un certain nombre de précautions avec les chiffres, souligne que « les statistiques disponibles font apparaître une dégradation sensible de l’exécution des peines ces dernières années » et en particulier « des délais d’audiencement, de jugement et d’inscription au casier judiciaire ».

Que ce soit pour les majeurs ou les mineurs, jamais la crise de la justice n’a atteint un tel paroxysme, et ce mauvais fonctionnement de la justice est devenu l’une des causes du durcissement de la délinquance. Voilà le constat dramatique que vous cherchez par tous moyens à dissimuler, derrière une nouvelle avalanche de textes qui s’empilent et d’annonces de propositions de lois.

 

Mes chers collègues, ce texte ne va pas résoudre les problèmes, mais les aggraver. Il piétine les principes essentiels de notre justice sans en améliorer l’efficacité, c’est pourquoi non seulement nous voterons contre, mais nous allons le combattre, et l’abrogerons si les Français nous font confiance en 2012 !

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