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25 octobre 2011

Royal: récit d'un prompt rétablissement

Sur l'EXPRESS

Par , publié le 25/10/2011 à 16:30, mis à jour à 16:40

 
Royal: récit d'un prompt rétablissement

En échange de son ralliement, François Hollande a-t-il fait miroiter à Ségolè ne Royal la présidence de l'Assemblée nationale?

REUTERS

Son score catastrophique à la primaire socialiste aurait dû la disqualifier durablement. Mais en appelant à voter sans tergiverser pour François Hollande, elle est revenue dans la partie. 

Il est 17 heures, ce lundi 10 octobre. Dans les bureaux parisiens de la région Poitou-Charentes, avec vue sur la tour Montparnasse, Ségolène Royal accueille un dernier visiteur. Il s'appelle François Hollande.  

La veille, arrivée quatrième de la primaire, elle a obtenu à peine 184 000 voix. Une humiliation. Mais son ex-compagnon n'est pas seulement venu pour lui remonter le moral. Deux heures plus tôt, il a rencontré Martine Aubry au bar du Lutetia pour un rendez-vous top secret. Maintenant, face à Royal, il salue la qualité de ses équipes, de son programme. "Tu vaux plus que tes 7 %, tu as un poids politique et médiatique, ton poids sera décisif dans la campagne."  

La négociation est directe. Sans tergiversations. Hollande promet qu'il ne débauchera pas ses lieutenants, si elle le rejoint. Si l'on en croit le camp de la Poitevine, il lui aurait aussi fait miroiter la présidence de l'Assemblée nationale. Et c'est vrai qu'elle le veut, ce statut de haut gradé de l'Etat, ce poste législatif prestigieux, où on n'est pas tenu par le bilan du futur gouvernement - ce qui peut être utile pour jouer les éventuels recours. 

"Quand est-ce que tu vas t'exprimer publiquement?"

François Hollande ne dira mot de son tête-à-tête, contrairement à Martine Aubry et à Arnaud Montebourg, qui lui ont, eux aussi, rendu visite. Le matin même, le député de Saône-et-Loire est venu sonder l'animal blessé. "Quand est-ce que tu vas t'exprimer publiquement ?" lui demande-t-il. En robe noire à bandes blanches, bien maquillée comme pour masquer les stigmates d'une nuit d'insomnie, elle se montre évasive. 

L'après-midi, c'est la maire de Lille qui sonne à la porte. Elle est tout miel. Et se met à raconter que sa propre mère a eu le coeur brisé en voyant les larmes de Ségolène Royal. Une scène qui tourne en boucle à la télévision, tel un morceau d'anthologie. Pendant que Martine Aubry évoque la tristesse de la nuit, l'ex-candidate à l'Elysée repense surtout à 2008, quand son destin, à ses yeux, lui a été volé.  

"La plaie du congrès de Reims reste vive, Ségolène n'a pas oublié", analyse le président de la région Rhône-Alpes, Jean-Jack Queyranne, un proche de Royal. Mais elle n'a pas oublié non plus toutes les manoeuvres de Hollande pour freiner sa course, comme son refus de faire revoter les fédérations là où le résultat du congrès s'était révélé litigieux. 

Aubry, Hollande? Il y a la politique, et il y a aussi, forcément, la dimension affective. En la matière, les injonctions alternent, telles des forces contradictoires. "Pendant quelques heures, raconte un proche du député corrézien, a régné une tension maximale, qui ne relevait que de l'intime entre François Hollande, sa compagne, Valérie Trierweiler, et Ségolène Royal. Un accord semblait impossible. Avant que tout finisse par se dénouer." 

Dans cette dramaturgie exceptionnelle, les enfants ne sont pas en reste. C'est avec eux que Ségolène Royal aura traversé cette élection cauchemardesque. Le 9 octobre, en apprenant qu'elle est quatrième, celle qui croyait dur comme fer participer au second tour s'effondre en larmes dans leurs bras. Jamais ses conseillers ne l'avaient vue pleurer. Ils se retirent quelques minutes du salon de la Maison des polytechniciens, le QG de Royal, pour ne pas briser ce moment intime. Au soir du second tour, les enfants sont encore là, à regarder le début de la soirée électorale avec leur mère. Une carapace fusionnelle. 

Hollande, Aubry, qui choisir? Pendant quarante-huit heures, elle ne dit rien. Même à ses proches. Le mardi 11, elle réunit son conseil politique pour un déjeuner à la Rotonde, une brasserie parisienne où elle a ses habitudes. Chacun s'exprime. Tour à tour, la secrétaire nationale du PS, Najat Vallaud-Belkacem, les députés Jean-Louis Bianco et Delphine Batho se prononcent pour un ralliement à Hollande. En revanche,la maire du IVe arrondissement de Paris, Dominique Bertinotti, soutient Martine Aubry - à l'image d'une base royaliste beaucoup plus divisée.  

La perdante lève un verre : "Allez, buvons au futur!"

Elle les écoute attentivement. Le patron de l'établissement passe une tête et salue les convives, attablés au premier étage. "Je vous avais fait mettre au frais des bouteilles de champagne!" leur glisse-t-il, comme pour leur dire qu'il croyait, lui, à cette victoire. "Non, non, apportez-les quand même, on ne va pas se laisser abattre", lui rétorque Royal. Et la perdante de lever un verre: "Allez, buvons au futur!" 

C'est le mercredi 12 octobre que la générale en chef prend sa décision. Seule. Certains proches la découvriront d'ailleurs dans la presse. Le jeudi, bien que toujours ébranlée par l'épreuve qu'elle traverse, elle réussit à faire bonne figure sur le plateau du 20 Heures de France 2. C'est désormais son obsession. Survivre à ses blessures. Tourner la page de 2007. "La capacité à surmonter les épreuves dont je fais preuve démontre que je veux continuer, confie-t-elle à L'Express. Comme le dit la formule, tout ce qui ne vous tue pas vous rend plus fort." Après son fiasco, elle a reçu plus de SMS que jamais. De Jean-Luc Mélenchon à Manuel Valls, de Pierre Bergé à Michel Sapin, de Bertrand Delanoë à Jean-Christophe Cambadélis. Dans le lot, il y a des camarades qui n'ont plus assez de mots pour louer sa grandeur, son sens de la responsabilité. Royal serre les dents. Certains compliments ont des airs de condoléances. Que c'est dur. 

Plus à l'aise dans la réaction que dans la construction

Loin des caméras, au fil des jours, elle va devoir se remobiliser autour de nouveaux objectifs politiques. Déjà, elle lorgne sur la circonscription de La Rochelle pour les législatives de 2012 et veut lancer une consultation des militants de Désirs d'avenir. Elle pourrait créer une autre organisation, baptisée "La Force citoyenne", destinée à mobiliser ses troupes au cours de la présidentielle. 

Royal apparaît toujours plus à l'aise dans la réaction que dans la construction. "On sent chez elle comme une sorte de soulagement, croit percevoir un élu qui s'est éloigné d'elle. Comme si elle n'avait plus à porter en permanence le poids de la responsabilité de la gauche sur ses épaules. Comme si elle pouvait la partager avec d'autres. Elle n'est plus attendue au tournant par des détracteurs en quête de bourdes." 

Le 22 octobre, à la halle Freyssinet, à Paris, assise entre Bertrand Delanoë et Arnaud Montebourg, elle est aux premières loges du sacre de François Hollande. Tantôt elle sourit, tantôt ses yeux sont embués par le chagrin. Lui, le père de ses quatre enfants, a droit à un lancement réussi. Sans les sarcasmes et les guéguerres qui ont sapé sa campagne, à elle, en 2007, quand les éléphants lui faisaient des misères. Pour ne pas flancher, elle s'est fixé une ligne: se comporter comme elle eût rêvé que son camp le fît pour elle, cinq ans plus tôt. "Tu es aujourd'hui notre candidat, si nous sommes là tous ensemble rassemblés, c'est pour que, demain, tu sois notre président", clame-t-elle lors de son discours. Encore dépitée? Elle avait convié les soutiens qui l'avaient parrainée pour la primaire juste avant son intervention, mais n'honorera pas le rendez-vous.  

Pour elle, son heure attendra encore. Le 16 octobre, la météo est splendide à Melle, son fief électoral des Deux-Sèvres. Elle vient de glisser un bulletin Hollande dans l'urne. Il est 14 heures. Elle a maintenant du temps devant elle. Alors, avec le maire de la ville, elle part se promener sur un sentier circulaire, qui emprunte une ancienne voie ferrée et traverse des massifs de rosiers. Royal refait le monde.  

Par moments, elle s'arrête, contemple l'église romane Saint-Pierre, dont le clocher pointe à l'horizon. Quand elle ne s'extasie pas devant les frondaisons multicolores. "Que les arbres sont beaux en ce début d'automne!" Patienter. Passer, comme la nature, d'un cycle à l'autre. 

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Commentaires
V
je n'ai jamais douté d'elle, ce n'est pas une personne à dire un soir de défaite : je quitte la vie politique !!!
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J
Que tout cela est triste...
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