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8 décembre 2011

Pouvoir d’achat : du panier de la ménagère au bulletin de vote

Sur IPSOS

08 déc. 2011 -

L’enquête récemment réalisée pour LSA confirme, plus qu’elle ne révèle, à quel point le sujet (le pouvoir d’achat) est sensible, anxiogène et à quel point il peut servir de pont entre le quotidien du consommateur et l’opinion du citoyen.

 

Le pouvoir d’achat : l’indicateur d’un quotidien qui se dégrade

Le mal est ancien. En 2008 (on pourrait remonter plus loin), nous révélions chez les Français, sans distinction socioprofessionnelle, un fort sentiment de perte de pouvoir d’achat. Plus des deux tiers (68%) l’estimaient en diminution. Trois ans plus tard, l’impression s’est non seulement renforcée mais accélérée : 4 Français sur 5 perçoivent une dégradation de leur pouvoir d’achat au cours de l’année écoulée. Ils sont 43% à juger qu’il s’est « un peu dégradé » et pour 37% à s’être « beaucoup dégradé ». 15% jugent que leur pouvoir d‘achat « est resté stable ». Seuls 4% qu’il s’est « beaucoup ou peu amélioré ». Des chiffres qui font écho à la crainte de paupérisation de nos concitoyens (85% « redoutent la pauvreté pour leurs enfants »). Sombre constat dont on ne peut raisonnablement espérer qu’il s’améliore beaucoup dans les temps à venir.

Pourtant, pourrait-on objecter, les indicateurs n’ont pas l’air si catastrophiques... L’Insee n’évoquait-il pas encore au cours du second trimestre 2011 une « accélération du pouvoir d’achat des ménages » ? Explication ? Le hiatus flagrant entre définition officielle et perception du pouvoir d’achat. Á la définition (trop sophistiquée ?) des indices répond le ressenti (simpliste ?) des consommateurs. D’un côté, une notion statistique de « pouvoir d’achat du revenu disponible brut ». De l’autre, des vécus (bruts eux aussi, notez-les)... Des vécus dont on sait désormais qu’ils sont partagés par une majorité de Français ; autant ceux qui affichent un bas revenu que ceux dont le potentiel économique est élevé !

Le tiers des Français font leurs courses à l’euro près !

Écoutons-les donc ces Français nous dire comment « eux » évaluent leur pouvoir d’achat ? 56% le mesurent « à ce qui reste après les dépenses fixes »(loyers, assurances, taxes, abonnements, gaz et électricité, etc.). 17% seulement en « faisant la comparaison entre l’évolution des revenus et celle des prix des produits de consommation courante ». 15% à « l’évolution de la qualité de vie ». Et 12% seulement « aux revenus ». En clair, le pouvoir d’achat, son expérience, est pour beaucoup, ce qu’il reste pour vivre et se faire plaisir après les dépenses incompressibles. Or les analyses officielles de conjoncture résistent mal à ce « ressenti » ; quand, au passage, l’Insee considère que le poste Logement « ne contribue que faiblement aux écarts d’inflation entre catégories ».

Mais peut-on encore parler de « ressenti » quand un tiers des Français disent faire leurs courses à l’euro près ! Question de notre sondage : « Vous, personnellement, diriez-vous que quand vous faites vos courses, vous comptez… » ? Réponses : Pour 31%, c’est « à l’euro près ». Pour 20% « à cinq euros près », « à 10 euros près » (25%), « à 50 euros près » (6%) et « ne comptent pas vraiment » (17%). Et puis, tiens, restons dans le « ressenti ». Demandons aux Français quel est aujourd’hui leur état d’esprit lorsqu’ils pensent à leur pouvoir d’achat ? 65% évoquent de « l’inquiétude ». 22% parlent de « colère ». Entre gris clair et gris foncé…

De l’adaptation au déclassement ?

« Inquiétude » et « colère », donc. Á quoi on pourrait sans doute ajouter « frustration » et « repli ». Mais surtout : «  souci permanent ». Question : « Vous, personnellement, avez-vous cherché à réduire vos dépenses courantes au cours des 12 derniers mois ? ». Réponses : « Systématiquement » (29%), « souvent » (39%). En clair, une forte majorité de Français tire le frein à main. Une majorité d’entre eux avoue même « renoncer à certains petits plaisirs personnels pour des raisons économiques » (69% « souvent », 29% « parfois »). Ou avoir, dans le même laps de temps, « souvent » (71%) ou « parfois » (27%) attendu une promotion ou des soldes pour effectuer certains achats. Ou encore « privilégier des produits moins chers dans leur alimentation, des œufs au lieu de la viande, par exemple » (53% « souvent », 35% « parfois »). Consommation rime de plus en plus avec réflexion, anticipation, optimisation.

Le présent est tendu. Regardons vers demain. Question : « Et au cours des 12 prochains mois, pensez-vous que votre pouvoir d’achat va… » ? Pour 29%, c’est clair, « beaucoup se dégrader ». Pour 41%, « un peu se dégrader », et 22% « rester stable ». 7% seulement voient une amélioration. C’est peu dire que les perspectives d’évolution sur l’année sont pessimistes et il est donc plus que probable que la question du pouvoir d’achat s’invite dans le débat électoral. Elle y serait, en tout cas, à sa place : 18% des Français y voient d’ailleurs « le principal sujet » et 66% « un des principaux sujets » de la campagne pour l’élection présidentielle 2012. Et ceci, même s’ils sont peu nombreux à placer leur espoir d’amélioration dans le gouvernement ou dans l’opposition.

D’où viendrait, alors, la solution ? si l’on en croit notre étude, parler pouvoir d’achat c’est parler prix mais aussi (et autant) salaires. Donc emploi.

Le ressenti, sans doute simpliste, évidemment subjectif des préoccupations quotidiennes est donc bel et bien connecté, pour une majorité de nos concitoyens, aux problématiques macro-économiques du moment.

Méfions-nous donc du pouvoir d’achat, sujet sensible s’il en fut, qui amalgame indistinctement les difficultés du quotidien, la peur du lendemain et une certaine forme de désillusion.

 

 

Dominique Lévy-Saragossi
Directeur Général, Ipsos Marketing
dominique.levy@ipsos.com

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