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16 janvier 2012

"VOTE UTILE"... L’utilité d’un vote

 

 L'UTILITE D'UN VOTE

     Chevènement, Hollande, Mélenchon, Poutou, Arthaud voire Joly : les candidatures de gauche poussent comme la mauvaise herbe en campagne présidentielle. Le choix pour les électeurs en devient cornélien. Certains s'en vont, prennent le large et s'engagent pour la Marine. Pour les autres, il n'y aurait que le candidat du Parti Socialiste. Dans sa lettre aux français paru dans le Libération du 2 Janvier, François Hollande glisse entre les lignes le désormais classique vote utile.

 

     « Enfin, je respecte profondément toutes les candidatures de la gauche comme celle des écologistes. Elles peuvent marquer des orientations, affirmer des exigences, ouvrir des alternatives, susciter des débats, mais ce n’est pas faire preuve d’une quelconque prétention hégémonique que de penser qu’il sera difficile pour l’une d’entre elles d’être présente au second tour. Dès lors, il me revient d’incarner l’alternance et de permettre le changement. »


     L'argument est implacable. Il se suffit à lui-même.
Á quoi bon essayer de convaincre des militants hostiles quand on peut les contraindre ?
Pourquoi s'escrimer à parler protectionnisme ou nationalisation quand la peur fait parole d'évangile ?

Á travers l'idée de vote utile, François Hollande rameute un électorat qui n'est plus celui du PS, sans pour autant trahir les valeurs sociales démocrates désormais chères au parti. D'autant plus que la menace d'un nouveau 21 avril est bien réelle, et ce, quel qu'en soit le sens. Si le Président sortant se partage le second tour avec Marine Le Pen, le PS va définitivement finir sur les roses. Mais, si un mec normal est confronté au Front-National lors de la présidentielle, ce ne sont pas les célestes 82,5 % de Chirac qui l'attendent à la sortie des urnes. Et dès lors, comment regarder l'hexagone en face, après avoir vu son plus mauvais profil ?

     Si la politique consiste à gouverner un État. Si le sens de la politique, comme l'a écrit Hannah Arendt, est la liberté. Alors, le vote utile signe la fin du politique. Coincé entre l'enclume d'un mode de scrutin binaire et le marteau de la communication, le fait politique se retrouve dans le fer d'une démocratie qui se mord la queue, incapable de revêtir l'ensemble des couleurs de la souveraineté populaire. Car, de façon sous-jacente, c'est l'idée de vote inutile qui est avancée. Pourtant, le score des candidats n'ayant pas atteint le second tour permet d'instaurer rapports de forces et négociations : l'électorat d'un troisième homme n'est pas gratuit. Ainsi, le seul vote effectivement inutile est blanc, puisqu'il n'est pas décompté. Par ailleurs, le chantage électoral dont il est question entraîne une sorte de prophétie auto-réalisatrice. Chaque voix utile renforce la polarisation de la vie politique et n'a de cesse de rendre encore plus inutile un vote qui le serait déjà.

     Le vote utile est un effet pervers du scrutin majoritaire à deux tours. Se prononcer de façon monolithique. Un seul candidat. Pour ou contre. Pour mes idées, ou pour le « moins pire » ? Contre un système, ou contre un parti ? De telles interrogations sclérosent la vie démocratique.
Cependant, des alternatives existent. Michel Balinski et Rida Laraki, tout deux chercheurs à Polytechnique, avancent l'idée d'un « jugement majoritaire ». Sur un seul tour, les citoyens sont invités à se prononcer sur tous les candidats en leur attribuant des mentions allant de Très bien à Rejet. Une mention majoritaire est dégagée pour chacun d'entre-eux. Il s'agit de la mention ayant recueillie 50 % d'opinions égale ou supérieur à une des mentions proposées. Le vainqueur est la personne détentrice de la meilleure mention majoritaire. En utilisant la primaire socialiste comme exemple, le magazine Slate.fr offre une illustration concrète de ce qu'est le jugement majoritaire (http://www.slate.fr/story/42115/pri...). Alors qu'il est parfois tentant de retirer l'élection présidentielle à la souveraineté populaire, un tel projet est porteur d'espoir. Il est encore possible de ne pas jeter le bébé du mode de scrutin avec l'eau du suffrage universel direct.

     Changer de système n'offrira pas pour autant l'absolution. Il s'agît de quitter la cuisine électorale pour retourner au théâtre politique. L'abstention fait honte, le vote Front-National de la peine, mais ce n'est pas le peuple qui est défaillant. C'est à nos représentants de bannir le concept de vote utile et de se battre pour rappeler à chaque citoyen l'utilité d'un vote.

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