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9 mars 2012

La folle équipée de la troïka européenne

 

Sur CONTREPOINTS

 

 

 

Publié le 11/01/2012

Peu importe ce qui arrive, l’Union Européenne continue de pondre des directives, des règlements et des sommets. Sa direction tricéphale utilise maintenant des troïkas technocratiques comme outils de gouvernance.

Par Sophie Quintin-Adali

Le 1er Janvier, un des rouages de la machine européenne s’est mis en marche, produisant une présidence danoise de l’Union Européenne [1]. Une nouvelle « Troïka » s’est donc mise en route avec pour mission de guider l’équipée européenne dans une tempête existentielle. Paraphrasant Nikolai Gogol [2], on doit se demander quel sens donner à cette « troïkaïsation », et où elle mène l’Europe.

 

Troïka Ailée, dis-moi qui t’a inventé ?

Peu importe ce qui arrive, l’Union continue de pondre des directives, des règlements et des sommets. Sa direction tricéphale, une sorte de troïka institutionnelle, utilise maintenant des troïkas technocratiques comme outils de gouvernance.

L’ « exécutif » du régime politique supranational est essentiellement une troïka constituée par le président non-élu de la Commission, la présidence tournante du Conseil, et depuis l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, le président non-élu du Conseil Européen [3]. Le Traité a formalisé le format du trio pour la présidence tournante qui doit maintenant rivaliser sur toute une batterie de compétences qui se chevauchent les unes les autres avec un président (actuellement, M. Van Rompuy) et un chef de la politique étrangère (Mme Ashton).

TroïkaPour résumer donc, une troïka d’États travaille au sein d’un Conseil « troïkaïsé » dans un exécutif « troïkaesque » dominé par le couple Franco-Allemand pour sauver l’Euro. Dans cette tâche sans merci, le conducteur danois du trio est assisté par la Pologne, un état membre qui n’appartient pas à la zone Euro. Chypre a rejoint la paire nordique. On peut se demander comment cet État divisé par un conflit interne non résolu va pouvoir contribuer positivement à conserver ensemble les pièces d’une Union qui se désintègre.

Bien que le besoin de « rationaliser » la gouvernance soit régulièrement cité pour justifier de nouveaux traités, tout ce que nous récoltons des Eurocrates se résume à une chose : plus de complexité.

 

Quel est le sens de toute cette agitation ?

Si l’on en croit les dirigeants et selon le Traité, l’Union se dirige gracieusement vers une aube de paix et de prospérité éternelle. Malheureusement, la vérité n’est pas aussi rose.

Des troïkas ont souvent été formées pour aller résoudre les crises en dehors de la Forteresse Europe. Elles sont maintenant appelées à résoudre la pagaille créée par la dette souveraine de ses propres États membres. En Grèce, la troïka Commission Européenne + Banque Centrale + FMI n’a rencontré que peu de succès et surtout l’hostilité du peuple.

Le gouvernement estampillé par Bruxelles prévient que sans fonds supplémentaires,  il pourrait quitter la zone Euro, réveillant la peur de l’effondrement de la monnaie unique. [4] La présidente du FMI Christine Lagarde s’est empressée d’annoncer que l’Euro n’était pas menacé. Ajoutant la gravité allemande à la grandeur française, le ministre des finances Wolfgang Schauble a fait écho à sa déclaration.

Quid toute cette agitation verbale? « Juste de la rhétorique » comme le fait remarquer Raoul Ruparel du think-thank Euro-réaliste Open Europe. [5]

 

Européens, vers où vous précipitez-vous ?

Quand la bulle de la dette souveraine gonflait tranquillement sans que le “gardien des Traités” (la Commission) ne prenne la peine de tirer la sonnette d’alarme, l’intégration a été comparée à faire du vélo. Ce qui comptait était le « processus » (le mouvement). La direction, c’est-à-dire le type de système politique et économique, vers laquelle avançait l’Union était considéré comme secondaire.

De peur que leur projet ne tombe par manque de vitesse, l’élite promut l’intégration sur la raison économique. De toute façon, l’approche fonctionnaliste de Jean Monnet a fait que l’intégration gagnerait en vitesse indépendamment des tramages politiques [6]. Une directive en a amené une autre… L’avenir radieux se trouvait juste derrière la prochaine politique commune…

En 2012, la récession va frapper fort (7). Les investisseurs exigent plus que des incantations politiques d’une « Europe solidaire » (et une politique fiscale) pour résoudre l’insolvabilité des gouvernements. Avant Lisbonne, repenser l’Union était déjà une nécessité impérieuse. Seulement voilà, personne n’a voulu s’y attaquer. Aujourd’hui, confrontée à une crise sans précédent, elle se défait plus vite que ce que les décideurs politiques ne peuvent contenir les dégâts.

Contrairement au scénario de la BCE, le seul élément « fantastique » de la folle équipée est sa cloche « fédéraliste » sonnant dans la tempête  et non pas l’éclatement possible de l’Euro [8]. Dans la périphérie sud de “l’Empire” [9], la fine couche de légitimité et de crédibilité sur laquelle la troïka européenne glisse en se précipitant de l’avant fond comme neige au soleil.

—-

Notes :

[1] http://eu2012.dk/en
[2] Gogol, N. (1842). Dead Souls. Vol. I, ch. 11
[3] European Council Decision 2009/881/EU on the exercise of the Presidency of the Council, Article 1, published in OJ L315/50.
[4] http://www.euractiv….er-euro-article
[5] http://www.telegraph…-ridiculed.html
[6] http://www.opendemoc…e-after-endgame
[7] http://www.guardian….m-economic-data
[8] http://www.telegraph…-Luc-Coene.html
[9] http://euobserver.com/18/24458
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