Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Vu au MACROSCOPE
Visiteurs
Depuis la création 1 378 952
Newsletter
12 mars 2012

Mélenchon: « Je jetterai la clé de l’Elysée dans la Seine »

Sur LES INROCKS

 

Auteur:

|
Mélenchon: « Je jetterai la clé de l’Elysée dans la Seine »photo: Gonzalo Fuentes / Reuters
 

Jean-Luc Mélenchon semble sincère lorsqu’il dit faire passer l’intérêt général avant son ambition personnelle. Mais comment concilier cela avec l’aventure ultra-individuelle d’une candidature à la présidentielle ? Portrait d’un trublion sorti tout droit des Lumières.

« Alors, on boit la boisson de l’ennemi !, me lance un Jean-Luc Mélenchon mi-sérieux, mi-blagueur. Vous avez soif ? Buvez de l’eau ! » Nous sommes le 15 février, dans l’arrière-salle d’un café de Strasbourg, et je viens de commander un Coca. On suit le TGV Mélenchon en campagne depuis deux jours dans le but de dresser son portrait, de gratter un peu derrière le programme, les discours et les slogans, d’essayer de sonder l’épaisseur de l’homme derrière l’image forcément réductrice de « populiste de gauche au caractère de cochon ». Bien qu’ouvert, cash, chaleureux, direct dans le contact, le candidat du Front de gauche est un poil sur la défensive : « Dans les portraits, il y a toujours une incitation au narcissisme qui me gêne un peu. » Certes, cher Jean-Luc, mais se présenter à la présidentielle de son pays n’est-il pas, sinon une preuve irréfutable de grosse tête, au moins le signe d’un ego au-dessus de la moyenne ?

Grecs et coffre-fort

Deux jours auparavant, à Paris, devant un parterre de journalistes étrangers, Mélenchon a fait le show, conforme à son image de tribun populaire. A part les Grecs qui s’intéressent un peu à lui pour les raisons qu’on imagine, nos collègues internationaux nous ont appris que Jean-Luc Mélenchon est un illustre inconnu en dehors de l’Hexagone. Du Japon à l’Allemagne, et de l’Espagne à la Hongrie, on ne le connaît que pour des sujets particuliers comme sa position sur le nucléaire (au Japon) ou sa proximité avec le communisme (en Hongrie).

En pleine forme rhétorique, Méluche s’est employé à bien se faire connaître, répondant à un confrère germanique en incendiant la politique européenne d’Angela Merkel et en pilonnant les failles du modèle allemand, ou lançant à une journaliste suisse : “Vous pouvez prévenir vos dirigeants et vos banquiers qu’avec moi, c’en sera terminé du rôle de votre pays comme coffre-fort défiscalisé de la planète entière.” Du Mélenchon sans filtre, quasiment en mode meeting ou passage télé, pugnace, droit dans ses bottes rouges, stylisé et relevé d’humour.

Mais dans la banlieue strasbourgeoise de Neuhof (l’une de celles rendues célèbres par leur taux de voitures brûlées pendant le réveillon de la Saint-Sylvestre), au milieu des médecins d’un centre de santé associatif, on découvre une autre facette de Jean-Luc Mélenchon : courtois, décontracté, disponible, et surtout silencieux, à l’écoute. Face à la trentaine de professionnels de santé qui lui expliquent les subtilités de la sécurité sociale alsacienne (différente du reste de la France, et qui rembourse mieux) et les problèmes d’accès aux soins dans les quartiers défavorisés, Mélenchon redevient un élève, ou plutôt un homme politique qui ne prétend pas tout savoir du haut de son estrade et qui sait prendre le temps (deux heures) de tâter le pouls du pays.

Loin des limousines noires, des cortèges, des grappes de micros et caméras, et des gardes du corps qui accompagnent généralement les gros candidats, Mélenchon se déplace en voiture banale, va à pied dans les rues de Strasbourg sans protection rapprochée si ce ne sont les quelques collaborateurs de son équipe de campagne. Qu’elles soient calculées ou naturelles, son attitude, sa manière d’être et de se déplacer sont celles d’un homme comme les autres, d’un citoyen ordinaire.

Santerre et ses pères

Par son verbe truculent et son positionnement politique, Mélenchon pourrait faire figure de Georges Marchais d’aujourd’hui. Or, curieux paradoxe, c’est à François Mitterrand qu’il voue une admiration inconditionnelle. “Oui, j’ai été mitterrandiste, mais les gens ne savent plus ce que recouvre ce terme. Comme tout homme, Mitterrand avait une part de lumière et une part d’ombre, mais, globalement, ce qu’il a accompli nous a instruits. Je crois à la fidélité et à la loyauté de la mémoire. Je n’ai pas une affection aveugle pour Mitterrand, mais je viens du rang et je suis heureux d’avoir connu le président de mon pays. Je ne fais pas partie de cette bonne société où on naît avec une cuiller en argent dans la bouche et où on est toujours revenu de tout. Mitterrand, c’est l’homme qui a nationalisé les banques et l’industrie et leur a foutu la pétoche.

Sans remonter jusqu’à Vichy ou la IVe République, Mitterrand fut aussi l’homme du tournant de la rigueur, de la continuité de la Françafrique, de la protection de René Bousquet, du cadeau de la cinquième chaîne à Berlusconi… Coauteur avec Lilian Alemagna d’une biographie de Mélenchon (Mélenchon le plébéien, Robert Laffont), le journaliste de Mediapart Stéphane Alliès est sidéré par le mitterrandisme de Mélenchon et par son syncrétisme politique.

Il y voit un mélange de positionnement idéologique et d’affects profonds : “Mélenchon est dans l’idolâtrie revendiquée, il ne reconnaîtra aucun défaut à Mitterrand. Le tournant de la rigueur selon lui, c’était Delors. Il a un problème mal résolu avec le père. Il a été élevé par sa mère, il a très peu vu son père. Il a eu plusieurs pères en politique : Germon (son premier parrain socialiste à Massy – ndlr), Mitterrand, Jospin. Son pseudo à l’OCI (Organisation communiste internationaliste – ndlr) était Santerre, nom du garde républicain qui a mené Louis XVI à l’échafaud. Mais de Santerre à sans terre ou sans père… Il dit souvent qu’il est un métèque, évoquant son déracinement du Maroc. Il est revenu en France en même temps que les rapatriés d’Algérie, et il confond souvent les deux pays, Algérie et Maroc. Depuis son rapprochement avec les communistes, il m’épate par sa capacité à réaliser la synthèse entre les socialistes, les communistes, les trotskistes, les altermondialistes… A la fin des meetings, il fait chanter L’Internationale et La Marseillaise. Faire chanter La Marseillaise aux gauchistes l’amuse !

Mélenchon relie trotskisme, PS et alliance avec les communistes par le fil conducteur des Lumières, un humanisme militant qui l’a mené de Voltaire à Marx, de Rousseau à l’écologie politique. Ce sont aussi les Lumières, la laïcité, et sa propre généalogie qui le rattachent à une entité plus inattendue, la franc-maçonnerie. “Après 1983, explique Mélenchon, je suis revenu à mes fondamentaux, les Lumières. C’est pourquoi je suis entré dans la franc-maçonnerie, à laquelle appartenaient aussi mon père et mon grand-père. Je n’ai d’ailleurs pas apprécié que l’on mette mon engagement maçon sur la place publique, non pas que ce soit un secret en soi, mais je ne voudrais pas qu’on imagine que mes décisions sont prises ailleurs que dans mon mandat, mon programme et mes convictions politiques.”

Selon Alliès, la confrérie est un refuge pour Mélenchon, qui peut facilement déprimer après une claque politique, comme ce fut le cas avec le virage de la rigueur de 1983, mais aussi après sa défaite aux cantonales de 1992 ou le 21 avril 2002. Pour complexifier encore un peu plus le portrait politique de celui que beaucoup considèrent comme un « laïciste », Mélenchon rappelle aussi son imprégnation religieuse du côté de sa mère catholique. En bon laïc, il dit n’avoir aucun problème avec la foi ou les croyants, seulement avec les institutions religieuses quand celles-ci veulent se mêler des affaires de la cité : « Ma mère était chrétienne, pratiquante, mais elle a su me montrer ce qu’était la pauvreté, dans des endroits où elle ne manquait pas, au Maroc puis en Normandie. Le lien que ma mère a établi entre sa foi et son indignation devant la pauvreté m’a influencé, je ne peux pas le nier, il fait partie de ma personne, de mon histoire. »

Moutons électriques

Enfance, éducation, religion, jeunesse trotskiste, compagnonnage socialiste ou maçonnique, Mélenchon ne renie rien, assume sa polysémie, ses évolutions, ses virages. Rien d’anormal, quelle vie est rectiligne ou univoque ? Une chose cependant le distingue vraiment des autres candidats (à cette élection et aux précédentes) : il est le seul célibataire officiel, le seul dont on ne sache pas grand-chose de la vie privée, conjugale, affective, parentale, le seul des impétrants importants qui n’a jamais posé dans Match avec femme et enfants.

On sait qu’il a été marié jeune, qu’il a eu une fille, qu’il a divorcé dans les années 1990, qu’il aimerait écrire un roman d’amour (il l’a dit dans Gala) et c’est à peu près tout. “Je ne parle pas de ma vie privée d’abord par éthique républicaine, martèle Méluche. Je suis candidat, c’est moi, pas ma compagne, mes proches ou mon chien. Ensuite, je n’en parle pas par respect des miens. Eux n’ont pas choisi ma vie. C’est déjà pénible de me supporter, avec tout ce que je trimballe, des calendriers invraisemblables, des heures de disponibilité inouïes, et il faudrait qu’ils subissent en plus la médiatisation ? Ils ne le souhaitent pas et je dois respecter ça. Vous n’imaginez pas le caractère offensant de l’inquisition dans la vie privée des gens. De quel droit mes proches ou ex-proches subiraient la pression de ma vie publique ? N’oubliez pas que mon engagement politique est ancré dans le refus de se soumettre. Le sentiment d’émancipation est ce qu’il y a de plus profond en moi. Je ne tiens pas compte de ce que font les autres, j’essaie de me comporter en accord avec moi-même.

Stéphane Alliès, qui le suit depuis longtemps, confirme que le candidat du Front de gauche tient parfaitement sa ligne anti-people, n’est jamais vu publiquement au bras de quiconque. Dans le sillage de cette séparation vie publique-vie privée, Mélenchon ne traîne aucune casserole financière, entretient un rapport très sain à l’argent, culpabilise dès qu’il gagne plus de 4 000 euros par mois. Ce n’est pas de ce côté de la gauche scrupuleusement honnête que le journaliste en mal de scoop tombera sur une affaire DSK ou Woerth-Bettencourt.

En revanche, quand Alliès nous apprend que Méluche se chauffe avant les meetings en chantant du Brassens,...
Lire la suite...

Publicité
Publicité
Commentaires
B
Melenchon est un politique que l’on voit depuis 30 ans, il a été ministre, il a soutenu des gouvernements qui privatisait, il vit de ses madats politiques et a saisi l’opportunité de la crise pour fonder le FDG , mais qui est-il veritablement......<br /> <br /> voir :<br /> <br /> http://2ccr.unblog.fr/2012/01/16/revolutionnaire-ou-reformiste/
Répondre
Publicité
Vu au MACROSCOPE
Derniers commentaires
Archives
Publicité