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18 mai 2012

45 jours pour réussir : le plan de François Hollande pour l’Europe

 
Pierre Haski | Cofondateur Rue89



A Berlin, des militants organisent un faux mariage Hollande-Merkel, le 7 mai 2012 (John Macdougall/AFP)

Un regard sur Paris, un autre sur Athènes. Les capitales européennes ont suivi attentivement dimanche les résultats des deux élections clé du jour, et toutes deux ont adressé le même message à l’Europe : il faut changer de cap.

C’est en Europe que se trouve une des clés du succès ou de l’échec de François Hollande. Et la réponse viendra vite : « Nous avons 45 jours pour trouver un accord correspondant à la promesse de campagne », affirme un conseiller du Président-élu.

Sa chance est que, en l’espace de quelques mois, le climat a changé sur le continent. Lorsque François Hollande a annoncé en janvier qu’il chercherait à renégocier le Pacte budgétaire européen tout juste conclu par le couple « Merkozy » et imposé aux autres, Nicolas Sarkozy l’avait qualifié d’« irresponsable ».

Depuis, le vent a tourné. Le tout-austérité du début de l’année, qui est parvenu à calmer les marchés, a créé des situations intenables en Grèce ou en Espagne, un rejet dans les opinions européennes, un « no future » qui inquiète jusqu’au FMI.

 

Merkollande après Merkozy ?

L’élection d’un Président français qui a fait campagne contre ce programme et l’a réaffirmé haut et fort dans son discours à la Bastille dimanche soir, et d’un Parlement grec dans lequel les partis traditionnels sont minoritaires et les néo-nazis font leur entrée, devrait alarmer les plus orthodoxes des gestionnaires de la Banque centrale européenne.

François Hollande offre à cette Europe une porte de sortie, en proposant d’ajouter au Pacte un volet de croissance, basée sur la mobilisation de moyens existants ou nouveaux en faveur de grands projets européens.

Tout se jouera dans le rapport qui sera établi entre Paris et Berlin, entre François Hollande et Angela Merkel. Hubert Védrine, l’ancien chef de la diplomatie de l’époque Jospin, estime que ça passera par un bras de fer nécessaire après la période au cours de laquelle Nicolas Sarkozy a fortement cédé à la Chancelière allemande dans l’espoir d’apparaître comme le copilote de l’Europe.

Mais Angela Merkel a ses problèmes politiques intérieurs, et ne fera rien qui déstabilise un peu plus sa majorité malmenée dans les urnes entre son parti chrétien-démocrate CDU et les libéraux du FDP. Elle a d’ailleurs réaffirmé lundi son opposition à la « renégociation » du Pacte budgétaire, même s’il existe là une marge de manoeuvre sémantique qui passerait par un protocole additionnel et pas par une renégociation d’un texte déjà approuvé.

Alors, « Merkollande » à la place de « Merkozy » ? Ce n’est pas joué, même si la Chancelière allemande, après avoir pris fait et cause pour Nicolas Sarkozy au point de proposer de participer à des meetings électoraux de l’UMP, s’est finalement abstenue de cette participation trop voyante.

Dans une interview à Slate.fr publiée lundi, François Hollande explique d’ailleurs :

« Il n’y a aucune séquelle liée à l’élection présidentielle française. J’ai parfaitement compris qu’Angela Merkel soutienne Nicolas Sarkozy pour l’action qu’ils ont menée ensemble, même si je l’ai contestée quant à ses résultats, et aussi pour leur sensibilité politique commune. »

L’histoire européenne pousse à penser qu’après une période incertaine, voire tendue, la France et l’Allemagne trouveront le compromis qui leur permettra d’avancer, car une rupture, ou même une incompréhension durable, entre Paris et Berlin signerait l’arrêt de mort de la zone euro. Ce que ni Hollande, ni Merkel, ne veulent.

 

Le retour du « gaullo-mitterrandisme »

Paradoxalement, après une campagne dans laquelle la politique étrangère a été la grande absente, celle-ci va dominer les premiers pas du nouveau président.

Outre ses déplacements à Berlin, Bruxelles et les principales capitales de l’Union européenne, François Hollande s’envolera très vite, trop vite sans doute à son goût, pour les Etats-Unis, pour les sommets du G8 et du G20, suivi d’un sommet de l’Otan à Chicago.

Ce président fraîchement élu, sans grande expérience internationale, va devoir annoncer aux Américains et aux autres alliés de la France son calendrier de retrait des « forces combattantes » françaises d’Afghanistan, en avance d’un an sur celui de Nicolas Sarkozy.

En tentant d’éviter tout drame avec un Barack Obama qu’il n’a pas envie d’embarrasser en année électorale lui aussi. Comme il le déclare lundi à Slate :

« Je veillerai donc à affirmer l’indépendance de la France sans compliquer la tâche de Barack Obama ».

Hollande va devoir apprendre aussi à connaître ses futurs interlocuteurs chinois, indiens ou brésiliens, un cercle qu’il ne connait pas, et qui, pourtant, façonne le nouvel univers mondialisé dans lequel la France, et l’Europe, sont malmenés. Des pays à forte croissance, qui apprécient peu le neo-protectionnisme en vogue à gauche.

Dans le processus d’apprentissage de la politique étrangère de François Hollande, par nécessité plus que par goût, on peut parier sur un retour à un « mainstream » gaullo-mitterrandien, dont Nicolas Sarkozy a vainement tenté de se démarquer, en particulier avec son inutile réintégration du commandement intégré de l’Otan.

Les favoris pour le Quai d’Orsay sont aujourd’hui Laurent Fabius, sorti du moule mitterrandien, ou Pierre Moscovici, ex-proche de DSK, qui ne dénoteront ni l’un ni l’autre dans cette approche.

Le Président-élu socialiste n’a pas esquissé de vision du monde qui lui soit propre pendant sa campagne. Son expérience politique, humaine, personnelle, ne le porte d’ailleurs pas réellement à intégrer les bouleversements du monde.

 

Petits bourgeois européens

Cette faiblesse, un socialiste l’analyse sociologiquement :

« Le PS français est dirigé par des petits bourgeois européens, très occidentaux, pas très à l’aise avec la diversité du monde, sous-estimant la complexité des nouveaux rapports internationaux. Ils préfèreraient que le monde ressemble à une réunion de socialistes français et socio-démocrates allemands... »

Cette vision très européo-centrée du monde tranche avec celle, à l’opposé, développée par Jean-Luc Mélenchon, qui prône une nouvelle alliance mondiale pour la France, un peu farfelue, avec les pays émergents (Chine, Inde, Russie, Brésil...), la sortie de l’Otan, le renforcement de l’ONU.

Une vision altermondialiste, plus idéologique que réaliste, mais qui incarnerait une véritable rupture.

François Hollande n’est pas dans la rupture. C’est un pragmatique pour qui les enjeux du redressement de la France, clé de son succès ou de son échec, passent nécessairement par l’Europe et par le reste du monde. C’est la politique étrangère qui s’impose à lui, plus que le contraire.

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Commentaires
B
Si Hollande n'est pas dans la rupture, il risque d'arriver que ce soient les citoyens qui rompent avec lui. Déjà, la gauche du Front du même nom n'a pas voté pour lui, mais contre un autre : aucun soutien de ce côté-là. Il pourrait même s'élever des voix à l'intérieur du PS lui-même, malgré les verrous que sont les fédés, les comités locaux, qui bloquent le dialogue et la remontée des oppositions.<br /> <br /> <br /> <br /> Comme les électeurs ont de la mémoire, la position du nouveau président, malgré sa souplesse, pourrait bien devenir intenable sans de vraies garanties données aux citoyens. Et pas seulement des promesses en l'air comme il en a tant l'habitude.<br /> <br /> <br /> <br /> Qu'il compte sur nous tous pour le pousser dans ses retranchements !
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