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3 septembre 2012

Hollande soumis au dogme du libéralisme

Sur COURRIER INTERNATIONAL

 

Dans une chronique acide, un dirigeant de la gauche alternative portugaise regrette les promesses non tenues de François Hollande, parfaite incarnation de social-démocratie timorée.

29.08.2012 | josé Manuel Pureza | Diário de Notícias


Dessin de Mix&Remix, Lausanne

Dessin de Mix&Remix, Lausanne

"La gauche française au pouvoir s'est cantonnée en matière économique dans la gestion à court terme [...]. Convertie à la crédibilité internationale, surnageant dans la vague libérale, elle s'est placée sur le terrain de l'adversaire et s'y est naturellement trouvée progressivement démunie. [...] Plus profondément, les objectifs d'une politique de gauche, à être sans cesse repoussés au-delà des résultats d'une période de rigueur qui ne s'arrête jamais, deviennent illisibles, peu crédibles, voire introuvables."

Ces sages paroles ont été écrites il y a quelques années par un dirigeant socialiste français. Mais, entre-temps, le dirigeant en question est devenu président de la France [la citation est extraite de L'Heure des choix, François Hollande et Pierre Moscovici, Ed. Odile Jacob, 1990]. Le voilà donc confronté aujourd'hui au test de la cohérence. Les mots sont importants. Mais ce sont aussi des stigmates pour celui qui a le pouvoir de les transformer en acte mais qui ne le fait pas.

Illusions déçues

Un peu plus de cent jours après son élection, Hollande n'a déçu que ceux qui se faisaient des illusions. Il a bien entendu réussi à enthousiasmer ses partisans. Au début de la campagne qui devait l'amener jusqu'à l'Elysée, il promettait aux Français de "commencer par le rêve", "le rêve français, c'est la confiance dans la démocratie, la démocratie qui sera plus forte que les marchés, plus forte que l'argent..." [extrait du discours du Bourget, le 22 janvier dernier]. Et, de fait, c'est par ce rêve qu'il a commencé, mais en le vidant de son contenu.

Les enchantés par avance évoqueront la taxe sur les transactions financières - rappelons-leur qu'elle représente seulement 0,2 % de la valeur de ces transactions. Les soutiens indéfectibles souligneront la taxation de 75 % pour les revenus supérieurs à un million d'euros - rappelons-leur que la décision a été remise à cet automne. Et, par-dessus tout, le club de supporters entonnera des hosannas au "changement opéré dans la gouvernance européenne".

A ceux-là il faut rappeler que la rhétorique du combat contre l'orientation merkozyste de l'UE a débouché sur une capitulation totale : l'émission d'eurobonds est reportée de dix ans, le Pacte pour la croissance sera un addendum insignifiant, inconsistant et insipide au Traité budgétaire imposé par Berlin et plus de la moitié des 120 milliards d'euros annoncés de façon tonitruante pour son financement sont seulement le fruit de réaffectations de fonds structurels dont l'utilisation était déjà prévue d'ici à 2014.

Le rêve est reporté

La supposée solidité du rêve hollandiste s'est rapidement dissoute dans l'air avec l'expulsion des communautés roms et avec la réponse sans substance à la menace de 8 000 licenciements par Peugeot Citroën et de 5 000 par Air France et par Alcatel.

Hollande avait fait de sa présentation comme "président normal" une arme efficace contre l'hyperagitation et la dérive vers l'extrême droite de Sarkozy. Mais les vertus d'un homme normal ont fait place aux défauts d'un gouvernant normal de la social-démocratie européenne. Timoré à l'heure de faire face aux canons du libéralisme économique, il leur est soumis comme à un dogme que l'on peut, dans la meilleure des hypothèses, infléchir mais dont on ne peut jamais s'écarter.

Hollande est un membre apprécié de cette lignée social-démocrate qui menace la droite avec des demandes de clarification et la combat avec des abstentions violentes [à l'image du Parti socialiste portugais, actuellement dans l'opposition]. Et donc, sans surprise, son gouvernement a assumé le fait d'être l'interprète fidèle de la prescription comportant des coupes dans la dépense publique (33 milliards d'euros jusqu'en 2014), qui invariablement fragilisent l'Etat social - au nom, à l'instar du reste de l'Europe, de la sacralisation de l'équilibre des comptes publics. L'austérité, c'est maintenant. Le rêve, lui, est reporté sine die.

Ce nouveau visage bien-aimé de la séduction libérale de la social-démocratie gagnerait à assimiler pleinement l'avertissement d'Edgar Morin :

"A force de sacrifier l'essentiel pour l'urgence, on finit par oublier l'urgence de l'essentiel."

Note :L'auteur est un ancien député du Bloco de Esquerda (Bloc de gauche).
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