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1 décembre 2012

TGV Lyon-Turin : “Nous avons pris le wagon de Notre-Dame-des-Landes”

 


Sur LES INROCKS

01/12/2012 | 12h57
Une affiche des opposants italiens au projet de TGV Lyon-Turin
Une affiche des opposants italiens au projet de TGV Lyon-Turin

Depuis 20 ans, le projet d’une ligne TGV entre Lyon et Turin nourrit une importante opposition dans les Alpes. Le 3 décembre, lors du sommet franco-italien de Lyon, François Hollande et Mario Monti pourraient enfin acter le dossier. Les opposants, qui dénoncent un projet inutile et coûteux, sont bien décidés à faire entendre leur voix.

“Je fais partie depuis 20 ans de ceux qui soutiennent le TGV Lyon-Turin. Mais je suis aussi devenu l’un des plus sceptiques à ce projet.” Ce vendredi 30 novembre, à la Maison de l’environnement de Lyon, l’homme qui a pris la parole n’est pas écologiste, ni même de gauche. Venu en simple observateur, Dominique Dord est député UMP de Savoie et maire d’Aix-les-Bains.

“Je me demande si nous ne sommes pas victimes d’abus de conscience depuis des années”, se justifie le député UMP au milieu de militants écologistes.

A la tribune, un conseiller régional EELV, des opposants transalpins et un professeur italien déploient leurs arguments, à base de chiffres, de diapositives et de graphiques. Au mur, des affiches du mouvement “No Tav” (“Non au TGV” en italien) montrent un grand-père protester contre un train à grande vitesse barré d’une croix rouge.

Pendant tout le week-end, des centaines d’opposants, Italiens et Français, élus ou militants, organisent un contre-sommet franco-italien à Lyon. L’objectif est de peser dans les débats avant la rencontre entre François Hollande et Mario Monti, le 3 décembre, qui devrait enfin acter la future ligne de TGV entre Lyon et Turin. Un projet de 20 ans, où se sont succédé et contredit enquêtes publiques, expertises de trafic et rapports environnementaux.

Côté italien, le Lyon-Turin alimente une très grande opposition, les No Tav, qui a donné lieu ces dernières années à des manifestations rassemblant plusieurs dizaines de milliers de personnes dans la vallée de la Suse. En Italie, les arrestations, les procès et les pressions du gouvernement sur les No Tav sont fréquentes. “On a été arrêtés à la frontière pour venir à Lyon, et des opposants qui militaient avec leurs enfants ont été interpellés par les services sociaux”, colère Sandro Plano, militant italien.

“L’évitement du réseau ferré français est devenu un sport international”

Les No Tav, mobilisés par le passé pour l’environnement, communiquent aujourd’hui sur les failles économiques du Lyon-Turin. En novembre, ils ont été légitimés par un rapport sévère de la Cour des comptes qui critique les dérives du projet, dont le budget est passé de 12 milliards d’euros en 2002 à 26 milliards en 2012. Quant aux prévisions de trafic, très optimistes dans les années 1990, elles sont aujourd’hui remises en question par la crise. La Cour ne prévoit un risque de saturation qu’à l’horizon 2035 et le report de la route vers le rail reste incertain.

“Ce n’est pas un problème de politique ou de philosophie. Les faits sont les faits. Ce sont des données. Les camions se comptent”, estime Angelo Tartaglia, professeur à l’école polytechnique de Turin, qui pointe la baisse de la circulation transalpine de marchandises depuis 10 ans. “Les données sur le trafic alpin sont plutôt déprimantes. Les explications sont multiples mais l’évitement du réseau ferré français est devenu un sport international tant la SNCF a des tarifs de fret excessifs et un taux de fiabilité bas”, confirme Alain Bonnafous, chercheur au Laboratoire d’économie des transports (LET).

Malgré les critiques, le Lyon-Turin reste bel et bien sur les rails. La région Rhône-Alpes, à fond derrière le projet, a déjà investi 800 millions d’euros.

“Si l’on part dans l’hypothèse d’une reprise de croissance, comme dans les années 1990, ça peut vouloir dire qu’on pourrait être en saturation en 2020″, soutient Alain Bonnafous.

Geste symbolique fort à quelques jours du sommet, Laurent Fabius a déposé le 28 novembre un projet de loi afin de pouvoir exploiter et réaliser la ligne. Mais le Lyon-Turin a besoin d’un financement européen à hauteur de 40%. Et l’Union européenne, qui discute actuellement de son budget pour la période 2014-2020, possède des marges de manœuvre très serrées. “La question du Lyon-Turin ne se pose pas dans l’immédiat. Il y a déjà plusieurs projets de constructions de lignes ferroviaires bien engagées. On est à la limite de nos capacités de financement en France”, avertit Alain Bonnafous. “Je ne pense pas qu’ils vont lancer les travaux du jour au lendemain. On va avoir le droit à un discours politique : un avis favorable sans engagement précis”, ironise le chercheur.

Prévisions de trafic à la baisse, surcoût du projet, absence de débats publics, répression sévère, les analogies avec l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes sont réelles. “Le Lyon-Turin, comme Notre-Dame des-Landes, est l’expression d’une politique du passé aujourd’hui infondée”, déplore Pascal Durand, secrétaire national d’Europe Ecologie-Les Verts. “L’opposition contre le Lyon-Turin est tellement peu connue en France qu’on s’est mis dans le wagon de Notre-Dame-des-Landes”, confie Emmanuel Coux, membre de la Coordination contre le Lyon-Turin (Colt). Lundi 3 décembre à Lyon, les adversaires à l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes manifesteront aux côtés de centaines de No Tav italiens et français, ainsi qu’aux opposants du Grand Stade de l’OL. Un millier de personnes dans les rues de Lyon, tous unis contre « les grands projets inutiles ».

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