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16 mars 2013

Les veines ouvertes de la Grèce

Sur RUSSE EUROPE

16 mars 2013
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L’interruption des négociations entre la Grèce et la TROÏKA (Union Européenne, Banque Centrale Européenne et Fonds Monétaire International) ramène brutalement les feux des projecteurs sur ce malheureux pays. On sait que la cause de cette interruption était la volonté de la TROÏKA de supprimer 150 000 postes de fonctionnaires dans les deux prochaines années. Même le gouvernement conservateur de Samaras a refusé de telles coupes. Rapportées à l’échelle de la France, pays dont la population est 6,5 fois plus élevées, ces coupes impliqueraient la suppression de 975 000 postes, sur les 2,15 millions de fonctionnaires d’État[1]. On comprend le refus du gouvernement grec.

En fait, la Grèce s’est appauvrie d’un quart de son PIB depuis le 2ème trimestre de 2008. L’effondrement économique est continu, et ceci quel que soit l’indicateur que l’on retient, qu’il s’agisse du PIB calculé à prix constants ou à prix courants.

Graphique 1

 PIB-Grèce

Source: Données de HELSTAT

La production industrielle connaît un effondrement encore plus rapide, car elle a perdu un tiers de son niveau de référence (2005) dont une bonne partie depuis le début de la crise.

Graphique 2

 Prod-Indus Grèce

On mesure bien que l’austérité ne fonctionne pas car pour chaque pourcent d’impôts en plus ou de dépenses en moins, nous avons aujourd’hui entre 1,4 et 1,7 pourcent de réduction de la croissance, ce qui mécaniquement engendre une réduction du même niveau des recettes fiscales. Le gouvernement a donc cherché à contrer cette baisse des impôts (TVA et taxes) par un accroissement des contributions des personnes. Mais, aujourd’hui, une vaste majorité de la population est désormais insolvable. Après avoir augmenté durant 2012, les impôts sur les personnes physiques et les ménages sont en train, maintenant, de s’effondrer. L’austérité ne peut pas fonctionner car la logique des dévaluations internes, qui est envisageable dans un pays entourés de voisins en forte expansion, est suicidaire quand elle mise en pratique simultanément par plusieurs pays. Dès lors, la rigueur débouche sur l’austérité, qui débouche sur un chômage de masse, 26% de la population active.

Dans ce contexte survient le samedi 16 mars l’annonce de l’accord sur Chypre, et de ses conséquences. Le gouvernement de Nicosie, pour obtenir le soutien de l’Union Européenne, a du mettre en œuvre une mesure extrêmement dangereuse : un prélèvement direct sur les comptes bancaires. Les effets de cette mesure ne se feront probablement pas attendre dans les autres pays. En effet, à Chypre même des queues se formaient devant les banques pour retirer l’argent des comptes, mais sans effets car le gouvernement avait gelé la veille les montants. Mais, ce qui est arrivé aux Chypriotes va servir de leçon pour les autres pays. Une telle mesure est parfaitement envisageable en Grèce, en raison de l’effondrement des recettes fiscales. La logique de la situation serait que l’on assiste à un « bank run », une panique bancaire en Grèce, puis probablement en Espagne et en Italie.

Concrètement, la situation de la Grèce a connu une nouvelle aggravation, dont les effets seront manifestes d’ici à juillet prochain. Mais, la combinaison de cette situation et du faux-pas des autorités à Chypre risque de confronter les autres pays en crise ouverte, l’Espagne, le Portugal et sans doute l’Italie, à la perspective de paniques bancaires qui, même si elle ne sont pas justifiées, seront extrêmement difficiles à contrôler. La TROÏKA veut continuer de voir couler le sang de la Grèce par ses veines grandes ouvertes, mais ce sang ne va pas tarder à nous éclabousser.


[1] Au sens strict, les fonctionnaires sont 2,151 millions en France. Il faut y ajouter 3,126 millions d’agents de la fonction publique qui ne sont pas statutairement des fonctionnaires. Il faut ajouter à ce chiffre global de 5,277 millions environ 700 000 personnes qui sont payés par l’État mais qui sont employés par l’enseignement privé sous contrat ou par des hôpitaux privés.


Ses travaux de chercheur se sont orientés dans trois dimensions, l’étude de l’économie russe et de la transition, l’analyse des crises financières et des recherches théoriques sur les institutions économiques et les interactions entre les comportements individuels. Il a poursuivi ses recherches à partir de 2000 sur les interactions entre les régimes de change, la structuration des systèmes financiers et les instabilités macroéconomiques. Depuis 2007 il s'est impliqué dans l’analyse de la crise financière actuelle, et en particulier dans la crise de la zone Euro.

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