La Commission Trilatérale, réunie à Berlin (mars2013) : qui en parle ?
Ce dimanche 17 mars 2013 se tient toujours à Berlin la réunion plénière annuelle de la Commission Trilatérale. Nous avons déjà consacré à cette réunion l'article de jeudi dernier « La Commission Trilatérale, à Berlin ce week-end » sur notre blog La Science au XXI Siècle. Comme d'habitude, aucun média « sérieux » n'en parle. Quant aux prétendus « progressistes », les « gauches » participent directement à la Trilatérale (la « socialiste » française Elisabeth Guigou en est membre actuellement), et les « gauches de la gauche » ont besoin des « gauches » pour accéder à un certain nombre de « bonnes places ». Il en résulte un silence spectaculaire. Pourtant, au vu de son site, on ne peut pas reprocher à la Commission Trilatérale une réelle opacité. Bien au contraire, les informations et le matériel considérables qui y sont diffusés s'ajoutent aux rapports commercialisés par la Brookings Institution. C'est bien au niveau des médias et du monde politique et syndical, que se fait la censure de l'information. Sans oublier ceux qui crient à la « théorie du complot ». Pourtant, il ne semble pas qu'il soit interdit, voire même difficile, de s'informer sur les réunions de la Commission Trilatérale, à en juger par les photos diffusées hier par le site VigiInfos sur l'accueil offert la veille par Angela Merkel à la réunion de Berlin. VigiInfos relève également que l'Agenda international de cette semaine affiché par l'Assemblée Nationale comportait explicitement la mention : « Commission des affaires étrangères. Participation de Mme Elisabeth Guigou, présidente, à la Trilatérale ». Il n'y a donc pas de secret, uniquement des silences. Lieu de réflexion commune des représentants du capitalisme mondial, la Trilatérale ne se cache ni ne se renie. « En face », on ne peut pas en dire autant... Et quel média français a fait savoir à ses lecteurs ou auditeurs que l'ami personnel de longue date de François Hollande qu'est le PDG d'AXA Henri de Castries est en même temps le président des rencontres de Bilderberg ?
Notre article du jeudi 14 mars avec le titre explicite « La Commission Trilatérale, à Berlin ce week-end », http://science21.blogs.courrierinternational.com/archive/2013/03/14/la-commission-trilaterale-a-berlin-ce-week-end.html, présente un bref historique de la création de la Commission Trilatérale il y a quarante ans.
A l'époque, la défaite des Etats-Unis au Viêt Nam s'annonçait clairement et le capitalisme international se trouvait confronté à de nombreux pays se réclamant du socialisme ainsi qu'à un puissant mouvement anticolonial et anti-impérialiste. Au sein même des pays « riches », les mouvements revendicatifs étaient puissants et inquiétaient les détenteurs des capitaux.
C'est dans ce contexte, que les fondateurs de la Trilatérale ont appelé en 1973 à une réflexion stratégique commune des trois pôles du capitalisme de l'époque : Amérique du Nord, Europe occidentale, Asie (pour l'essentiel, le Japon). L'actuelle mondialisation du capitalisme a très largement émergé de cette initiative à laquelle ont participé, avec le principal fondateur David Rockefeller, des représentats des multinationales et de la grande finance ainsi que des futurs dirigeants politiques au plus haut niveau comme Zbigniew Brzeziński ou Raymond Barre.
L'Acte Unique Européen (Jacques Delors, 1986) ou la mise en place de l'Organisation Mondiale du Commerce (1994), instaurant la « libre circulation des capitaux et des marchandises », sont pour une bonne partie des résultats de cette « pensée commune » du capitalisme mondial, dans un contexte bien plus favorable à ses intérêts où l'URSS a cessé d'exister et la République Populaire de Chine a renforcé ses liens avec les Etats-Unis et l'Europe occidentale. Qui s'est vraiment opposé à cette stratégie du capitalisme mondial ? C'est un ancien bras droit de Jacques Delors, le « socialiste » français Pascal Lamy, qui dirige actuellement l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC).
A présent, des représentants de la République Populaire de Chine, de l'Inde, de Singapour, de la Corée du Sud, de l'Indonésie, des Philippines... font partie de la Commission Trilatérale.
Dans ces conditions, et alors que l'on trouve aisément dans le « marché mondial de la main d'oeuvre » des salaires dix fois plus bas que le SMIC français, et qu'en Europe même les très bas salaires ne font pas défaut, à quoi peuvent servir les « économies » mises en place par François Hollande, Jean-Marc Ayrault, Jérôme Cahuzac... ? La réalité que l'on évite d'exposer aux citoyens est que la véritable dégringolade ne fait que commencer dans des pays comme la France que les capitaux abandonnent à la recherche des plus bas salaires et standards sociaux.
Et c'est de toute évidence une « excellente raison » pour ne pas évoquer auprès du « grand public » les réunions de la Commission Trilatérale, même si la Trilatérale ne se prive pas de rendre de nombreuses informations parfaitement accessibles sur son site http://www.trilateral.org .
Le 17 mars également, Boursier.com se réjouit : « Baisser les allocations familiales n'est plus un tabou ! », et ajoute encore « L'idée de se serrer la ceinture n'est plus taboue ! ». Mais a-t-on vraiment expliqué aux Français jusqu'où devront-ils « se serrer la ceinture » ? La réalité est qu'on n'a rien vu encore.
Ler site Atlantico tente de se montrer rassurant dans son article « Frankenstein : l’Occident inventeur de la mondialisation est-il en train d’en perdre le contrôle ? ». Mais force est de constater que la politique dite « d'économies budgétaires » se traduit d'ores et déjà par un effondrement progressif du niveau de vie des populations des Etats-Unis et de l'Europe occidentale. Très clairement, ce n'est que le début d'une profonde dégringolade.
Pour les populations des pays jadis « riches », la véritable question n'est pas de savoir si les grandes multinationales et les milieux financiers parviendront à tirer leur épingle du jeu, mais ce que deviendront leurs acquis sociaux de l'après-guerre.
C'est précisément la perspective d'un anéantissement total de ces acquis historiques de travailleurs et citoyens, qui « déconseille » d'informer les populations sur les réunions d'entités comme la Commission Trilatérale ou le Cercle de Bilderberg. Et c'est ce qui rend particulièrement troublants de nombreux silences.
Pourtant, les membres de la Trilatérale ne passent pas sous silence leurs activités. Vendredi, son président européen Jean-Claude Trichet publiait dans le New York Times un article d'opinion intitulé « The Euro Zone and the Global Crisis ». A la fin de l'article, il est ainsi présenté : « Jean-Claude Trichet, former president of the European Central Bank, is the European chairman of the Trilateral Commission ». Trichet évoque explicitement « the future of credible European governance » comme l'un des sujets de la réunion en cours à Berlin.
Quel média français a mentionné cet article de Jean-Claude Trichet ? Quel courant politique a entrepris d'y réagir ?
Pour une réponse dans le New York Times à l'article de Trichet, voir cette note de Paul Krugman intitulée « The Very Confident Jean-Claude Trichet » : http://krugman.blogs.nytimes.com/2013/03/16/the-very-confident-jean-claude-trichet/
Voir aussi nos articles :
La Commission Trilatérale, à Berlin ce week-end
Trilatérale, Bilderberg... pourquoi il faut en parler
Bilderberg 2012 : quels objectifs ? (I)
Bilderberg 2012 : quels objectifs ? (II)
Bilderberg : historique des participants français - I (1996-2001)
Bilderberg : historique des participants français - II (1984-95)
Bilderberg : historique des participants français - III (2002-2010)
Trilatérale 2010, à Dublin début mai
Bilderberg 2010, en Catalogne début juin
Bilderberg 2010, à Sitges du 3 au 6 juin
Bilderberg 2010 et barrages médiatiques
Grèce et "vente des meubles" imposée aux Etats
Bilderberg et l'Etat privé mondialisé
Bilderberg 2010 : quel bilan, quels consensus ?
Bilderberg, CNRS, université publique, rapport Aghion...
Bilderberg, la Trilatérale... et le monde (I)
Bilderberg, la Trilatérale... et le monde (II)
Bilderberg, la Trilatérale... et le monde (III)
Bilderberg, la Trilatérale... et le monde (IV)
Bilderberg, la Trilatérale... et le monde (V)
Bilderberg, la Trilatérale... et le monde (VI)
M. Monti, président européen de la Trilatérale
Grèce : la faillite planifiée des Etats souverains
La Commission Trilatérale et les services publics français (I)
La Commission Trilatérale et les services publics français (II)
Services publics et adversaires innommables (I)
Services publics et adversaires innommables (II)
Groupe de Bilderberg et silence des médias français
Bilderberg, Trilatérale et transversalité de « gauche »
Bilderberg 2009 : une rencontre des "élites" ?
CNRS, Bilderberg, Trilatérale... et faillite de l’idéologie « gestionnaire » (I)
Sarkozy, G8, Bilderberg, "sortie de crise" rapide et casse sociale
Crise, élections et "valeurs de gauche" (I)
Crise, élections et "valeurs de gauche" (II)
Monti, Grèce, Barroso, "réfractaires", "nationalistes"... (I)
Monti, Grèce, Barroso, "réfractaires", "nationalistes"... (II)
Grèce, Italie, Trilatérale, Bilderberg... et impasse
La lettre de Voltaire à Damilaville du 1er avril 1766
Le déclin des puissances occidentales (I)
Le déclin des puissances occidentales (II)
Union Européenne et comédie : privatisations (I)
Union Européenne et comédie : privatisations (II)
Union Européenne et comédie : délocalisations (I)
Union Européenne et comédie : délocalisations (II)
Barack Obama et les coupures budgétaires aux Etats-Unis (I)
Barack Obama, la recherche scientifique et l'éducation (I)
Barack Obama, la recherche scientifique et l'éducation (II)
Barack Obama, la recherche scientifique et l'éducation (III)
Barack Obama, la recherche scientifique et l'éducation (IV)
Barack Obama, la recherche scientifique et l'éducation (V)
Barack Obama, la recherche scientifique et l'éducation (VI)
CNRS, délocalisation de la recherche et débâcle européenne (I)
CNRS, délocalisation de la recherche et débâcle européenne (II)
CNRS, délocalisation de la recherche et débâcle européenne (III)
Hollande, Ayrault et la mondialisation (I)
Hollande, Ayrault et la mondialisation (II)
Hollande, Ayrault et la mondialisation (III)
Vers un Wall Street scientifique ? (I)
Vers un Wall Street scientifique ? (II)
Indépendance des Chercheurs
http://science21.blogs.courrierinternational.com
http://www.mediapart.fr/club/blog/Scientia
Groupes de discussion :
http://groups.yahoo.com/group/problemes_des_scientifiques
http://groups.yahoo.com/group/combatconnaissance
Le commentaire le plus recommandé
http://www.syti.net/Organisations/Bilderberg.html
Voir également nos articles récents :
http://science21.blogs.courrierinternational.com/archive/2013/03/14/la-commission-trilaterale-a-berlin-ce-week-end.html
La Commission Trilatérale, à Berlin ce week-end
Le 14 mars 2013, Les Echos écrit « Hollande veut répondre à l'impatience par ordonnances ». De quelle impatience s'agirait-il ? La réalité est que les citoyens portent au quotidien un jugement de plus en plus négatif sur la politique de François Hollande et sur les prétendues « réformes » gouvernementales. Au même moment, Les Echos publie un article du Prix Nobel d'Economie Joseph Stiglitz intitulé « Les élections italiennes et la faute des dirigeants européens », soulignant la « nocivité d'une austérité généralisée » et réclamant un changement de politique l'échelle européenne. Mais la solution préconisée par Stiglitz, à savoir un renforcement des pouvoirs de l'Union Européenne, ignore la cause principale de la situation actuelle : la politique de privatisations et de délocalisations menée depuis trois décennies dans les pays jadis « riches ». L'Union Européenne a été un vecteur privilégié de cette stratégie aux conséquences fatales. Sauf méprise de notre part, Joseph Stiglitz ne fait pas partie de la Commission Trilatérale dont la réunion plénière de 2013 commence à Berlin ce vendredi et durera tout le week-end. Mais les membres français de la Trilatérale sont relativement nombreux : un quota de dix-huit, comme pour l'Italie et la Grande-Bretagne, à côté de vingt pour l'Allemagne. Et c'est un français, l'ancien président de la Banque Centrale Européenne Jean-Claude Trichet, qui en préside la section européenne succédant à Mario Monti. Le site de la Commission Trilatérale n'annonce pas d'avance le programme de la réunion plénière de 2013. Mais de toute évidence, la situation financière des Etats-Unis et de l'Europe occidentale occupera une place importante dans les débats. La Trilatérale compte également des représentants de la République Populaire de Chine. Sa section Amérique du Nord est présidée par le spécialiste du « renseignement » militaire US et professeur à l'Université de Harvard, Joseph S. Nye, Jr. Le 14 mars également, le Quotidien du Peuple rapporte « La Bundesbank : la crise de l'euro n'est pas terminée ». L'article souligne notamment l'appréciation du président de la Bundesbank : « le cours de la réforme semble avoir stagné en France ». De quelle « réforme » s'agit-il, si ce n'est d'une nouvelle étape de la casse économique, sociale et institutionnelle entreprise dans les années 1980 ? Le Point du 14 mars porte à la une la phrase « sauver nos retraites ». Mais les retraités n'ont-ils pas cotisé toute leur vie ? Au fond, rien de vraiment nouveau par rapport à l'analyse déjà présentée dans nos articles récents « Hollande, Ayrault et la mondialisation » (I) , (II) et (III). Le dumping social planétaire fait de plus en plus de ravages dans les pays jadis « riches ».
[ la suite, sur le lien http://science21.blogs.courrierinternational.com/archive/2013/03/14/la-commission-trilaterale-a-berlin-ce-week-end.html ]
http://science21.blogs.courrierinternational.com/archive/2013/03/14/cedh-casse-toi-et-pouvoir-des-chefs-i.html
CEDH, "casse-toi..." et pouvoir des "chefs" (I)
Le 14 mars 2013, la Cour Européenne des Droits de l'Homme (CEDH) a rendu un arrêt sur l'affaire Eon c. France, désavouant la condamnation pénale prononcée par la justice française contre un militant dans l'affaire du « casse toi pov’con ». La CEDH a estimé que la liberté d'expression avait été violée par une telle condamnation. Dans un article intitulé « La CEDH condamne la France dans l'affaire de l'affichette "Casse-toi pov'con" », Le Nouvel Observateur souligne que la Cour ne s'est pas prononcée globalement sur la raison d'être du délit d'offense au chef de l'Etat, une disposition très ancienne mais jamais abrogée par le monde politique. La loi de 1881 dont elle fait partie ne fut pas promulguée par une monarchie, ni même par un gouvernement de « droite ». Elle fut adoptée et promulguée sous le premier gouvernement de Jules Ferry et la présidence de Jules Grévy, au début de la « grande expansion coloniale » française. Mais est-ce le seul problème de cette nature, ou les institutions françaises souffriraient-elles plus globalement d'un problème de « pouvoir des chefs » et pas seulement dans la sphère politique ? De même, la condamnation pénale serait-elle la seule (voire même, la pire) punition pratique infligée au quotidien en France aux « impertinents » et aux « désobéisseurs » ? Autant de questions qui nous semblent mériter un examen plus détaillé. Le 14 mars également, Europe 1 commente à son tour « Les ordonnances, Hollande détestait ça », à propos des projets de législation par ordonnances récemment attribués à François Hollande.
[ la suite, sur le lien http://science21.blogs.courrierinternational.com/archive/2013/03/14/cedh-casse-toi-et-pouvoir-des-chefs-i.html ]
Cordialement
Le Collectif Indépendance des Chercheurs
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