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5 avril 2013

L'«offshore leaks» ébranle jusqu'à François Hollande

| Par Martine Orange

 

C’est un choc supplémentaire. Au lendemain des aveux de Jérôme Cahuzac, le gouvernement socialiste se retrouve aux prises avec une affaire de paradis fiscal. Selon les données recueillies par l'International Consortium of Investigate Journalists (ICIJ) et publiées en France par Le Monde, l’ancien trésorier de la campagne présidentielle de François Hollande, Jean-François Augier, se retrouve dans les listings des sociétés offshore basées aux îles Caïmans.

Ancien inspecteur des finances, Jean-François Augier a d’abord succédé à André Rousselet à la tête de la compagnie de taxis G7 avant de partir pour la Chine. Homme d’affaires discret, il a eu là-bas des activités dans la boucherie avant de lancer un réseau de librairies et s’est associé à un partenaire chinois. C’est dans ce cadre qu’il est devenu « actionnaire de deux sociétés offshore dans les îles Caïmans par le biais de son holding financier Eurane », explique Le Monde, partenaire de l’ICIJ. « J'ai investi dans cette société par l'intermédiaire de la filiale d'Eurane en Chine, Capital Concorde Limited, un holding qui gère toutes mes affaires chinoises. L'investissement dans International Bookstores apparaît au bilan de cette filiale. Rien n'est illégal », a expliqué au Monde l’homme d’affaires, tenant à préciser « n’avoir ni compte bancaire personnel ouvert aux Caïmans ni investissement personnel direct dans ce territoire. »

Les pratiques d’affaires sont connues en Chine : la corruption a même été au cœur des discussions du dernier congrès du parti communiste chinois  Comment le président de la République a-t-il pu se risquer à prendre comme trésorier un dirigeant d’entreprise très investi en Chine ? Une vieille amitié ne peut masquer les dangers pour un homme politique à fréquenter de trop près des hommes d’affaires.

 
Le dossier sur le site de l'ICIJ
 
 
Le dossier sur le site de l'ICIJ

Car c’est l'une des leçons de l’enquête sur les grandes fortunes cachées dans les paradis fiscaux publiée simultanément par de grands quotidiens internationaux ce jeudi 4 avril : il y aura de moins en moins d’impunité pour les évadés fiscaux et les réfugiés des paradis fiscaux. Peu à peu, les données sortent de ces mondes rendus volontairement opaques par les financiers. Et elles sortiront de plus en plus au fur et à mesure que la crise va s’aggraver, que le système financier vacillera.      

Regroupés au sein d’une alliance, ICIJ, les journaux ont épluché pendant des mois une masse impressionnante de fichiers sur les clients des paradis fiscaux, issus de fuites. « Ces documents illustrent combien les pratiques secrètes financières de l’offshore se sont répandues dans le monde. Les données détaillent des structures offshore dans plus de 170 territoires. Cela représente le plus gros stock de données d’informations internes sur le système offshore jamais obtenu par une organisation médiatique »écrit le Guardian, membre de l’ICIJ, qui avait déjà publié en décembre une série d’articles sur les prête-noms dans les paradis fiscaux.

Le Luxembourg est-il un paradis fiscal ?

Dans les listings traités, on trouve de tout, des milliardaires indonésiens, des dirigeants et des oligarques russes, des marchands d’armes comme des familles de despotes, des dentistes américains ou des familles grecques. L’essentiel des recherches ont porté sur deux grandes firmes financières, explique The Guardian. La première, Portcullis TrustNet, détenue par un avocat de Singapour, s’est fait une spécialité d’attirer les fortunes asiatiques. La seconde, Commonwealth Trust Limited (CTL), quant à elle, est une des adresses favorites des fortunes russes et de l’Europe de l’Est. Toutes les deux sont basées aux îles Vierges britanniques, d’où le fait que peu de noms connus en Europe émergent.

L’argument que les paradis fiscaux n’ont rien d’illégal mais relèvent presque de la bonne gestion, d’une optimisation fiscale qu’il serait malvenu de ne pas mettre en œuvre, est répété à loisir par les grands groupes. C’est celui en tout cas que mettent en avant des Google, Starbucks, Apple et autres (voir notre article sur les intaxables). Mais que dire quand, comme le relèvent les listings publiés ce jeudi, on trouve des oligarques russes comme un ancien bras droit de Boris Berezovsky, retrouvé mort il y a quinze jours ? Il y a aussi le président de l’Azerbaïdjan et sa famille, un ancien ministre des finances de Mongolie, la fille de l’ancien président philippin Ferdinand Marcos, des proches de Vladimir Poutine, une responsable des fonds du parti démocrate, etc.

Interrogé au cours d'un point de presse sur la liste de personnalités actionnaires de sociétés dans des paradis fiscaux, le porte-parole de la Commission européenne, Olivier Bailly, a refusé de la commenter. Mais, a-t-il rappelé, la Commission « a une position très ferme sur la fraude fiscale en général » et a proposé en décembre dernier des mesures qui « sont encore en attente d'accord de la part des États membres » de l'UE. À la question de savoir si le Luxembourg était un paradis fiscal, le porte-parole n'a pas répondu directement : « Nous sommes plutôt en train d'essayer d'avoir une définition des pratiques qui seraient illégales, que de trouver un terme qui cristallise », comme celui de paradis fiscal, a-t-il ajouté.

Une étude de l’ancien chef économiste de McKinsey estime que les fortunes cachées dans les paradis fiscaux représentent entre 21 000 et 32 000 milliards de dollars, soit l’équivalent du PIB des États-Unis et du Japon réunis. La Commission européenne évalue à plus de 1 000 milliards d’euros par an l’évasion fiscale en Europe.

 

 

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