Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Vu au MACROSCOPE
Visiteurs
Depuis la création 1 378 952
Newsletter
11 juillet 2013

René Dosière : « Il faut supprimer la réserve parlementaire »


Sur MARIANNE

Vendredi 5 Juillet 2013 à 05:00 | Lu 6455 fois I 13 commentaire(s)

 

 

 
 
Le député socialiste de l’Aisne s’intéresse depuis longtemps à la réserve parlementaire et son système d’attribution opaque. Pour René Dosière, pourfendeur du gaspillage de l’argent public, il est venu le temps de supprimer définitivement cette cagnotte, source de multiples dérives.

 

WITT/SIPA
WITT/SIPA

La réserve parlementaire est sortie de l’anonymat. Cette cagnotte d’argent publique distribuée de manière discrétionnaire pour et par les parlementaires français a montré ses limites. Et ses dérives, surtout depuis que le professeur de mathématiques Hervé Lebreton a obtenu le rapport détaillé des montants de la réserve pour l’année 2011. Critères d’attribution opaques et partisans, source de clientélisme, moyen de pression des distributeurs, comme des bénéficiaires...

Le président de l’Assemblée nationale Claude Bartolone a récemment réformé le système. Désormais, les députés de la majorité comme ceux de l’opposition disposent d’une somme équivalente : 130 000 euros pour apporter un coup de pouce financier aux collectivités de leur circonscription, mais sûrement pas pour les communes de leurs amis politiques, voire de leur lieu de vacances, à l’image du ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, qui a arrosé à hauter de 50 000 euros le village de Carla-Bayle, dans l’Ariège, où il dispose d’une cossue résidence secondaire...
 
>> Lire notre enquête : Que faisaient les ministres de leur « cagnotte » parlementaire?
 
Avant que Hervé Lebreton obtienne cette liste, le député socialiste de l’Aisne, René Dosière, s’était lui aussi intéressé à cette discrète source d’influence. Pourfendeur du gaspillage de l’argent publique, l’auteur de L’Etat au régime (Ed. Seuil) et de L’argent et l’Etat (Ed. Seuil) a obtenu un document dans lequel apparaît le montant de la réserve parlementaire par département pour les années 2008 à 2010.

Dans un premier temps favorable à plus de transparence dans l’attribution de la cagnotte, M. Dosière est désormais convaincu qu’il faut supprimer purement et simplement ce dispositif et pose la question d'autres cagnottes distribuées de manière discrétionnaires, comme celle dont dispose le ministre de l’Intérieur.
 
Marianne : Pourquoi vous être intéressé à la réserve parlementaire ?
 
René Dosière : Il faut bien voir qu’il y avait une opacité totale sur cette réserve parlementaire. On ne savait pas du tout comment elle était distribuée, quelles étaient les inégalités, même si on les subodorait. Il y avait des rumeurs sur les uns ou les autres, des échos, j’ai voulu faire la clarté là-dessus en demandant au ministère de l’Intérieur comment cette réserve était gérée, puisque c’est la place Beauvau qui distribue les subventions aux  collectivités locales, qui représentent une part importante de cette caisse. Pour être bien certain d’obtenir une réponse j’avais posé une réponse globale sans m’attacher à des « personnalités » ou des territoires en particulier. J’ai ainsi pu faire un premier constat étayé depuis par les éléments obtenus par Hervé Lebreton : l’allocation était essentiellement partisane et bénéficiait d’abord à des élus importants, comme les présidents des commissions des finances, les rapporteurs généraux des budgets, ou le président de l’Assemblée.
 

Comment les élus obtiennent leurs enveloppes ?
 
La réserve parlementaire est apparue dans les années 1970. A l’époque, seuls les membres de la commission des finances, ou presque, étaient au courant de son existence. Ils se partageaient la cagnotte entre eux. Plus tard, la liste des bénéficiaires s’est agrandie. Avant que l’actuelle majorité fasse le ménage, le président de la commission des finances et le rapporteur général du budget affectaient les sommes aux députés qui en avaient fait la demande sans que l’on connaisse les méthodes et critères d’attribution. Chaque député remplissait une fiche de demande. Aujourd’hui, tout le monde peut en faire la demande dans la mesure où il y a une attribution individuelle systématique. En clair, l’ensemble des élus est désormais destinataire de cette fameuse fiche.
 

Cela suffit-il pour éviter les dérives ?
 
Au fil des renseignements et de la connaissance que j’ai pu avoir sur la réserve parlementaire, mon opinion sur le sujet a évolué. Aujourd’hui je pense qu’il faut la supprimer, tandis qu’avant j’étais plutôt favorable à une réglementation ferme et transparente. Il faut la supprimer pour deux motifs, au moins. Le premier c’est qu’on ne peut plus accepter que soit distribué l’argent public sans critères objectifs alors même que l’Etat connaît les difficultés qu’on lui connaît. Ce que je veux dire par là c’est que la distribution est gérée par le député lui-même qui fixe ses propres critères d’attribution, ses propres bénéficiaires, les montants, etc. Il y a autant de règles que de députés.
 
Le second élément qui me conduit à dire qu’il faut la supprimer c’est qu’aujourd’hui tout le monde est au courant de l’existence de ces sommes d’argent, ceux qui ont en charge de les distribuer, mais surtout les éventuelles bénéficiaires qui sont les élus locaux, voire des responsables d’association parfois directement liés au député ou au sénateur. La publicité autour de la réserve la rend obsolète.
 
La conséquence directe de tout cela étant que cela favorise et institutionnalise un système qui repose sur le clientélisme.
 
Ceci dit, il ne faut pas oublier qu’il existe d’autres sommes distribuées de façon très opaque. On sait par exemple qu’il existe une enveloppe d’environ 30 millions d’euros dont dispose le seul ministre de l’Intérieur sans qu’on ne sache à quoi elle lui sert ni comment il l’utilise. Certains conseils généraux disposent également d’une réserve d’argent qu’ils peuvent distribuer là encore, dans la plus grande opacité, en arrosant les diverses échelons de la collectivité. Il faut donc supprimer la réserve parlementaire mais s’attacher dans le même temps à faire la lumière sur ces autres outils d’influence. Il n’y a pas de raison que les parlementaires soient les seuls visés.

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité
Vu au MACROSCOPE
Derniers commentaires
Archives
Publicité