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17 octobre 2013

Accord PS-PCF à Paris: un accord au rabais pour un lourd prix politique

Sur MEDIAPART

 

Plus personne ne l’ignore. Le Parti de gauche est en radical désaccord avec la majorité des responsables départementaux parisiens du PCF et avec Pierre Laurent lui-même, depuis qu’ils ont fait savoir publiquement qu’ils proposaient d’abandonner la stratégie du Front de gauche et de faire liste commune avec le PS dès le premier tour des élections municipales de 2014.

En fin de semaine, les militants parisiens du PCF se prononceront sur cette rupture ou non, avec le Front de gauche dans la capitale. Quoiqu’il arrive au soir de ce vote, une large majorité des organisations du Front de gauche ont déjà annoncé qu’elles étaient favorables à des listes autonomes du PS et Danielle Simonnet, notre chef de file du Parti de gauche, a commencé sans attendre une belle campagne.

Il n’empêche, à quelques jours du vote des communistes, je veux continuer à convaincre en démontrant que les bases de cet accord avec le PS sont dénuées d’ambition. Pour justifier ce départ du Front de gauche, les responsables du PCF parisien ont évoqué un « accord de haut niveau » signé avec le PS. Pourtant, la réalité est tout autre.

L’argument le plus utilisé pour en vanter la prétendue qualité est le passage suivant : « Nous nous engageons à produire 30% de logements sociaux à horizon 2030 ». Sans minimiser ce que cela représente, c’est en réalité la stricte application de la loi et son prolongement pour cinq années supplémentaires. Dans la mesure où tout le monde ignore les résultats des élections de 2020 et de 2026, la valeur de cet engagement vérifiable dans 17 ans est quand même à relativiser. On peut aussi légitimement s’interroger sur le respect de la parole donnée par un responsable PS. En 2012, François Hollande aussi s’était engagé auprès d’EELV à baisser la part du nucléaire dans la production d’électricité de 75 % aujourd’hui à 50 % en 2025. Depuis, on sait que la centrale de Fessenheim ne fermera pas en 2017 comme prévu et la loi sur la transition énergétique a été reportée. Mais, c’est un autre sujet ou plutôt un autre renoncement. Paris, ville riche, pourrait faire la démonstration qu’elle peut faire mieux et plus vite que ce que la loi exige d’elle, c'est-à-dire 25% de logements sociaux en 2025. Mais, l’accord PS-PCF ne le réclame pas et rien n’est prévu pour faire baisser les loyers, alors que c’est pourtant le problème majeur.

Autre exemple. En 2008, l’exécutif PS avait privatisé la collecte des déchets dans plusieurs arrondissements parisiens. Avec Danielle Simonnet, nous nous y étions radicalement opposés. Nous étions alors aux cotés des salariés concernés et des élus communistes qui, comme nous, réclamaient la remunicipalisation de cette collecte. Plusieurs fois, par des vœux déposés au Conseil de Paris, nous l’avons réclamée ensemble. Pourtant, cela disparaît dans l’accord conclu entre le PS et le PCF, qui se limite à dire : « Concernant la collecte des déchets, il n'y aura pas de remise en cause du service public dans les arrondissements qui fonctionnent en régie. »

Les problèmes de place en crèche ? Si on en reste à l’accord PS-PCF, de 2014 à 2020, avec l’objectif de 5 000 places, mi municipales, mi associatives ou privées, la Ville de Paris ne construira pas de place en crèche à un rythme plus élevé que durant les précédentes mandatures, alors que la Ville elle-même reconnaît que, encore aujourd’hui, 60 % des demandes des familles ne sont toujours pas satisfaites, malgré la construction volontariste de 10 000 places en 13 ans.  Selon l’accord PS-PCF, la Ville continuera à additionner dans ses objectifs et réalisations les places totalement municipales à celles qui sont en réalité confiées à des associations, parfois confessionnelles, ou à des entreprises à vocation lucrative. Pourtant, pour beaucoup de familles, l’absence de place en crèche est un tracas majeur quotidien et qui a des conséquences directes sur les carrières professionnelles de salariées et frappe particulièrement les Parisiennes.

Ensuite, pour le reste de l’accord, derrière les mots vagues et les différents Observatoires et Conseils aux contours flous, ce dernier entérine de fait la création du « Grand Paris », alors que les députés communistes y sont radicalement opposés, et n’exige plus de l’Etat le 1,6 milliard d’euros de transfert de compétences non compensés, depuis la loi Raffarin, que nous réclamions pourtant avec insistance, lorsque la droite était au pouvoir.

Enfin, summum de l’hypocrisie, le PS affirme sans vergogne dans cet accord : « nous refuserons toute politique d'austérité ». Là, on se pince. Jean-Marc Ayrault avait déjà prononcé le 4 juillet 2012 devant l’Assemblée nationale le même engagement: « Je refuse l’austérité ». Depuis, le Premier Ministre a décidé une ponction de près de 75 milliards d’euros de mesures d’austérité (35 milliards de moins dans l’action publique et 40 milliards de ponctions fiscales supplémentaires). Sept parlementaires socialistes parisiens élus au Conseil de Paris, et sans doute à nouveau candidats, ont également voté toutes ces mesures d’austérité. Peuvent-ils s’opposer, à l’Hôtel de Ville, à ce qu’ils votent au Palais Bourbon? Est-ce crédible ? Qui peut croire que ces mesures n’ont aucune conséquence sur la vie des Parisiens ? Le laisser entendre n’est-il une façon d’aider le PS à dissimuler sa politique ?

Dernier point. Les responsables parisiens du PCF se sont mis d’accord avec le PS sur l’élection possible de 13 conseillers de Paris. Au vu de l’assemblée parisienne actuelle, composée de 163 élus, ces 13 élus potentiels ne seront pas un groupe « charnière » pouvant contraindre les élus PS à respecter leurs engagements. Cette augmentation potentielle ne se fera pas au détriment des élus PS qui conserveront le même nombre qu’actuellement. Pour dire les choses clairement, les rapports de forces au sein du Conseil de Paris ne seront pas modifiés et le PS, si Anne Hidalgo était la prochaine Maire de Paris, n’aura toujours pas besoin des communistes pour être majoritaire. Au PG, nous pensons qu’en faisant des listes autonomes, Front de Gauche à Paris, on peut obtenir en mars 2014 un nombre plus important d’élus qu’actuellement.

Au vu de l’accord PS-PCF, faut-il quitter le Front de Gauche et prendre le risque de mettre en péril l’espoir que nous avons construit depuis 2008 ? Je dis que non.

Mais, c’est à mes amis communistes désormais d’en décider.

Alexis CorbièreConseiller de Paris, Secrétaire national du Parti de gauche

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