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27 juin 2014

Jean-Marie Le Guen a minoré de 700 000 euros son patrimoine

 MEDIAPART

 Jean-Marie Le Guen a minoré de 700 000 euros son patrimoine

|  Par Michaël Hajdenberg et Mathilde Mathieu et Pascale Pascariello

D’après des informations recueillies par Mediapart, le secrétaire d'État Jean-Marie Le Guen a initialement « sous-déclaré » son patrimoine d'environ 700 000 euros à la Haute Autorité pour la transparence de la vie politique. Mediapart révèle qu'il devrait subir un redressement fiscal sur son impôt sur la fortune, qui pourrait atteindre 50 000 euros rien que sur l'année 2013.

 

C'est la deuxième plus grosse fortune du gouvernement après Laurent Fabius. Mais Jean-Marie Le Guen est surtout le troisième ministre de François Hollande, après Jérôme Cahuzac et Yamina Benguigui, à n'avoir pas déclaré l'ampleur exacte de son patrimoine aux autorités. Après une longue enquête sur les revenus et les biens de Jean-Marie Le Guen, Mediapart est en mesure de révéler que le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, épinglé ce vendredi 27 juin par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HAT), a minoré la valeur de ses propriétés immobilières auprès de l'administration fiscale de quelque 700 000 euros, et ce depuis des années.

Selon plusieurs sources convergentes, cet ancien député de Paris proche de Manuel Valls, soumis à l'impôt sur la fortune (ISF), est désormais menacé par un redressement fiscal qui pourrait atteindre plus de 50 000 euros, rien que sur l'année 2013. « Je n'ai jamais eu de redressement fiscal », répond pour l'instant Jean-Marie Le Guen à Mediapart.

L'administration est tombée sur cet « os » à l'occasion des vérifications fiscales prévues pour tous les ministres depuis les lois sur la transparence d'octobre 2013, organisées sous l'autorité de la HAT. Créée en réponse à l'affaire Cahuzac, cette haute autorité indépendante, présidée par l'ancien magistrat Jean-Louis Nadal, vient ainsi de contrôler les déclarations de patrimoine et d'intérêts remplies par l'ensemble du gouvernement Valls (à l'exception des deux derniers entrants), avant de les publier ce vendredi 27 juin sur son site internet. Une première.

Jean-Marie Le Guen y apparaît notamment propriétaire de trois lots parisiens de 94 m2, 40 m2 et 39 m2 (plus un garage), respectivement acquis en 1987, 1990 et 1997, tous situés à la même adresse dans le très chic quartier de l'École militaire (VIIe arrondissement). Le secrétaire d'État détient un autre appartement de 52 m2 dans le XVe arrondissement, un immeuble à Biarritz (une « donation »), une permanence parlementaire dans son ancienne circonscription du XIIIe arrondissement de Paris, ainsi que deux terrains dans les Landes, comportant des constructions.

La déclaration des biens immobiliers de Jean-Marie Le Guen après qu'il l'eut rectifiéeLa déclaration des biens immobiliers de Jean-Marie Le Guen après qu'il l'eut rectifiée

 À l'arrivée, sur les trente ministres concernés, Jean-Marie Le Guen est le seul à écoper d'une « appréciation » de la HAT, une sorte de blâme apposé au fer rouge, ainsi formulé : « La Haute Autorité a relevé que les biens et droits immobiliers détenus par l’intéressé étaient évalués à des montants inférieurs aux prix constatés pour des biens comparables. Malgré la difficulté inhérente à la valorisation de biens immobiliers, notamment lorsqu’ils sont détenus en indivision, la Haute Autorité a estimé que ces évaluations étaient susceptibles de porter atteinte au caractère exact de cette déclaration. »

D’après nos informations, cette déclaration finale signalée le 10 juin par Jean-Marie Le Guen, et dévoilant un patrimoine immobilier de 2 689 000 euros, diffère catégoriquement de la première version qu'il a fournie au lendemain de son entrée au gouvernement. Le secrétaire d'État y chiffrait alors ses biens à quelque 2 millions d'euros seulement. Ces valeurs vénales initialement indiquées par Jean-Marie Le Guen, en droite ligne avec ses déclarations antérieures à l'administration fiscale, se sont avérées déconnectées des prix du marché, en particulier pour ses appartements parisiens et son immeuble de Biarritz.

Jean-Marie Le Guen possède plusieurs biens dans cet immeuble du très chic VIIe arrondissement de Paris Jean-Marie Le Guen possède plusieurs biens dans cet immeuble du très chic VIIe arrondissement de Paris © DR

La HAT s'en est rendu compte dès qu'elle a demandé (comme pour tous les ministres) une évaluation « maison » à la direction générale des finances publiques de Bercy, qui a fourni une estimation à près de 2,8 millions d'euros. Les services fiscaux n'avaient visiblement pas contrôlé l'élu depuis des années.

Après une série d'échanges écrits avec la Haute Autorité, Jean-Marie Le Guen a ainsi concédé une réévaluation de son patrimoine de quelque 600 000 euros (d'environ 30 %), soit quelque 100 000 euros de moins que l'estimation de l'administration fiscale, d'après nos informations. Ce montant rappelle les 600 000 euros dissimulés par Jérôme Cahuzac sur son compte en Suisse au jour de ses aveux...

« J'ai choisi de reprendre l'estimation de (mon patrimoine) effectuée par la HAT, assure Jean-Marie Le Guen vendredi matin. Personne ne peut donc parler de sous-estimation. »

La HAT ne saisit pas la justice

Dans ces conditions, l'institution présidée par Jean-Louis Nadal a choisi de ne pas saisir le parquet, à l'inverse de la décision prise en mars 2014 pour Yamina Benguigui, l'ancienne ministre de la francophonie du gouvernement Ayrault, soupçonnée d'avoir dissimulé des actions en Belgique – ce qu'elle a démenti. À l'époque, la Haute Autorité avait saisi le procureur de Paris en évoquant un « doute sérieux quant à l'exhaustivité, l'exactitude et la sincérité » des déclarations de patrimoine de l'intéressée, des « faits susceptibles de constituer des infractions pénales ».

En effet, depuis la loi sur la transparence de la fin 2013, le seul fait pour un ministre « d'omettre de déclarer une partie substantielle de son patrimoine (…) ou de fournir une évaluation mensongère » est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende.

Manuel Valls et Jean-Marie Le Guen sur le banc des ministres à l'Assemblée nationaleManuel Valls et Jean-Marie Le Guen sur le banc des ministres à l'Assemblée nationale © Reuters

Alors pourquoi ne pas saisir le parquet dans le cas de Jean-Marie Le Guen ? La HAT a visiblement considéré que le secrétaire d'État n'avait dissimulé aucun de ses biens, ni menti sciemment sur leur valeur. « Aucune information portée à ce jour à la connaissance de la Haute Autorité n’est de nature à mettre en cause le caractère exhaustif, exact et sincère de la déclaration », écrit-elle vendredi. Sans doute Jean-Louis Nadal aura-t-il à cœur d'expliquer le sens de cette jurisprudence...

De son côté, le procureur de Paris peut évidemment déclencher des poursuites de lui-même, s’il estime qu’une fraude fiscale peut être caractérisée.

Peut-être la Haute Autorité pourra-t-elle, par ailleurs, questionner la cohérence – ou non – entre les revenus déclarés par Jean-Marie Le Guen et la variation de son patrimoine au fil des ans. Comment a-t-il financé l'acquisition de ses biens ? Ses revenus officiels peuvent-ils suffire ? À ce stade de son travail, la HAT n'a vérifié et rendu publiques que les activités exercées par Jean-Marie Le Guen ces cinq dernières années, en parallèle de ses mandats d'élus, ainsi que les rémunérations afférentes, comme le prévoit la loi.

Comme intervenant à l’université Paris-Dauphine, le secrétaire d’État gagne 3 000 euros par an depuis cinq ans, alors qu’il ne déclare aucune rémunération pour son poste de président du conseil d’administration de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, puis de président du conseil de surveillance.

De médecin, Jean-Marie Le Guen a surtout le titre. L’actuel secrétaire d’État est plutôt un professionnel de la politique. Depuis son plus jeune âge, il grenouille dans ce milieu. À 20 ans, il est membre du Parti socialiste. À 24, il devient premier secrétaire du MJS (Mouvement de la jeunesse socialiste). À 27, membre fondateur du syndicat étudiant l’UNEF-ID et vice-président de la mutuelle des étudiants de France (MNEF).

Lors de l'élection présidentielle de 1981, il travaille pour le directeur de campagne de François Mitterrand, Paul Quilès, qu’il supplée à l’Assemblée nationale en 1988. Un an plus tard, en 1989, alors même qu’il est député, il commence parallèlement à se faire rémunérer par la MNEF, dont il restera salarié jusqu’en 1997, d’abord en tant que directeur médical, puis en tant que conseil à partir de 1993.

Mais en 1998, « l’affaire de la MNEF » éclate : des révélations sur des enrichissements personnels et des emplois fictifs éclaboussent des personnalités liées au Parti socialiste. Les juges en charge du dossier se demandent si Jean-Marie Le Guen, qu’ils mettent en examen, n’a pas indûment touché 1,5 million de francs : les traces de sa présence et de son travail sont quasi nulles. Mais les preuves sont finalement jugées insuffisantes. Contrairement à Jean-Christophe Cambadélis, il n’est pas condamné. L’argent amassé à cette époque a-t-il pu participer à la constitution de son patrimoine ? C'est fort possible. Mais il s’agit d’une autre histoire.

Schéma explicatif du "parcours des déclarations" par la HAT :

 

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Commentaires
J
ARGHHHH! je m'étouffe de rire (jaune...) pépette.
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P
c'est beau le monde politique....
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J
Merci... j'avais oublié, et n'avais pas fait de rapport avec cette affaire... à suivre
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G
ça fait plus de 20 ans que l'on parle de la "pouponnière de la MNEF"..., des négociations Amitiés france-Taïwan dont le siège était rue Tiphaine, locaux de la MNEF avec Spitakis, Le Guen...0ù en est l'investigation journalistique ou historique ou socialiste ou judiciaire...?
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