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22 décembre 2014

L'affaire Zemmour -

Sur JFORUM

 

Éric Zemmour ne correspond plus à la ligne éditoriale d’i>Télé qui a annoncé mettre fin à sa collaboration avec le polémiste. Une décision qui fait des vagues.

Il était chroniqueur dans l’émission "Ça se dispute" depuis plusieurs années. Mais Eric Zemmour est au coeur d’une polémique après des propos controversés sur l’islam. Plusieurs associations ont réclamé qu’il soit privé d’antenne. Un voeu visiblement entendu par i-Télé.

Extraits

Des journalistes défendent la liberté d’expression

Premier à réagir. Celui qui lui donnait la réplique sur le plateau de "Ca se dispute". Nicolas Domenach a regretté sur Twitter la décision de la chaîne d’informations en continu. « Avec Zemmour, on s’est débattu. On s’est affronté. On s’est aimé, on s’est exaspéré, mais toujours respecté. Un temps d’échanges. Quelle tristesse ! »

- L’association SOS Racisme, qui avait annoncé jeudi préparer une plainte pour incitation à la haine raciale contre le journaliste et essayiste, s’est « félicité de la décision d’iTELE ». « Nous attendons de RTL, de Paris Première et du Figaro qu’ils prennent la même décision, comme l’ont d’ores et déjà réclamé plus de 10.000 personnes dans une pétition lancée par SOS Racisme », poursuit l’association en référence aux autres médias où intervient Zemmour.

D’autres, sans partager les opinions de Eric Zemmour, déplorent aussi le choix de i-Télé. Sur Twitter le rédacteur en chef du Figaro Magazine dit ne pas comprendre non plus. Pour lui, il s’agit de liberté d’expression.

 

Réaction de Jean François Kahn dans le Figaro

Etes-vous choqué par le fait qu’I-Télé se sépare d’Eric Zemmour suite à une polémique lancée par Jean-Luc Mélenchon et relayée par le patron des députés PS et ministre de l’Intérieur ?

Jean-François Kahn : Oui, je suis extrêmement choqué pour trois raisons. D’abord, à travers le succès inouï de son livre, on voit qu’une part importante de la population se reconnaît dans ce que dit Éric Zemmour. On peut le regretter, c’est parfois mon cas. Mais peut-on se réfugier dans le déni ? Peut-on vraiment rayer de la sorte une sensibilité forte dans le pays ? D’une certaine manière, le cas Zemmour rejoint celui du scrutin électoral. Peut-on vraiment se réjouir du fait qu’un parti qui obtient 19% des suffrages ne soit représenté que par deux députés à l’Assemblée nationale ? Le cas Zemmour pose le problème du manque de pluralisme dans notre démocratie.

Deuxièmement, le fait qu’i-Télé cède à une campagne de presse, qui confine au lynchage médiatique, me choque. Eric Zemmour ne dit rien de nouveau. Cela fait vingt ans qu’il tient le même discours. i-Télé l’a engagé en connaissance de cause, et peut-être d’ailleurs parce qu’il défendait ces idées. Pourquoi s’en séparer maintenant ? A cause d’un « mot » qu’il n’a même pas prononcé. Je trouve le procédé qui consiste à utiliser un « mot » ou une « phrase », souvent sorti de son contexte, pour éliminer quelqu’un, détestable. Je le dis d’autant plus volontiers que j’ai été moi-même victime de cette méthode.

Enfin, il faut rappeler que Ça se dispute, est une émission de débat dans laquelle Eric Zemmour doit faire face à un contradicteur. Ce n’est pas comme s’il bénéficiait d’une tribune libre. Dans un débat, il est normal qu’il y ait deux sensibilités. On ne peut pas décider que l’une d’entre elle n’est pas propre et qu’il faut la virer. Ce qui me choque aujourd’hui à la télé, ce ne sont pas les débats où il y a un véritable affrontement idéologique, mais les débats où tout le monde est d’accord. Il y a aujourd’hui dans les médias une ligne modernisto-libérale dominante qu’Alain Minc qualifiait de « cercle de la raison ». Cette ligne n’est pas pas forcément mauvaise, mais si elle continue d’être hégémonique, les conséquences peuvent être terrifiantes.

En virant Zemmour, on ne fait que nourrir le ressentiment d’une partie de la population, qui, à juste titre, ne se sent plus représentée. C’est effectivement un formidable cadeau pour Marine Le Pen.

Diriez-vous que Marine Le Pen peut dire merci à tous ceux qui préfèrent interdire que contredire ?

En virant Zemmour, on ne fait que nourrir le ressentiment d’une partie de la population, qui, à juste titre, ne se sent plus représentée. C’est effectivement un formidable cadeau pour Marine Le Pen. Cela légitime évidemment sa rhétorique antisystème. J’ajoute que c’est un formidable cadeau à Eric Zemmour lui-même qui aura beau jeu de se faire passer pour un martyr du politiquement correct. On peut être sûr qu’il va vendre 40 000 livres de plus et que cela va renforcer son statut de rebelle anti-establishment qu’il adore.

 

Comprenez-vous que des associations demandent qu’un journaliste n’ait plus de tribune ?

Là aussi, on s’éloigne de plus en plus des principes fondamentaux de la démocratie. Qui nomme et qui élit les associations ? Leur poids politique me paraît démesuré par rapport à leur représentativité. Suffit-il de réunir douze personnes et de faire des communiqués pour être légitime ? Ces associations sont des imams laïcs, pas toujours laïcs d’ailleurs, qui lancent des fatwas. Si le Suicide français est le livre le plus réactionnaire écrit depuis longtemps, c’est aussi un brûlot antilibéral. Sur le plan économique et social, c’est un véritable manifeste néo-marxiste dans lequel Zemmour se déchaîne contre le capitalisme financier

 

N’y a-t-il pas, malgré tout, des limites à la liberté d’expression ? Éric Zemmour les a-t-il franchies ?

Il y a des lois, notamment sur le racisme ou l’apologie du crime de guerre. Mais à partir du moment où vous représentez une forte sensibilité sans violer la loi, vous devez avoir la possibilité de vous exprimer. Aujourd’hui, ce n’est pas le cas en particulier en matière économique et sociale si on s’avise de sortir du consensus « modernisto-néolibéral ». La question de la sortie de l’euro est par exemple taboue. On se souvient également qu’en 2005, 90% des médias s’étaient prononcés pour le « Oui » au traité constitutionnel en diabolisant au passage toute forme d’opposition. Le« Non », qui était très peu représenté, l’avait pourtant emporté.

 

Peut-on encore débattre aujourd’hui ?

Tout d’abord, il faut rappeler que le livre de Zemmour est assez difficile à lire. Si on est occupé par ailleurs, cela demande une semaine. Or, le jour de sa sortie il y a eu des pages entières consacrées au Suicide français dans la presse de gauche. Il est évident que la plupart des journalistes n’avait lu que quelques extraits. On a donc assisté à la montée en puissance d’une polémique à partir d’un livre que personne n’avait lu. On s’est polarisé sur le chapitre sans intérêt consacré à Vichy alors qu’il y avait de nombreux passages beaucoup plus intéressants. Je pense notamment au chapitre sur le Crif qui dénonce l’évolution communautariste de beaucoup de Français juifs. Il n’y a pourtant pas eu un seul article sur cette question.

En réaction au déchaînement de la presse de gauche, la presse de droite a plutôt fait l’éloge du livre. Pourtant, de toute évidence, celle-ci non plus ne l’avait pas lu. En effet, si le Suicide français est le livre le plus réactionnaire écrit depuis longtemps, c’est aussi un brûlot antilibéral. Sur le plan économique et social, c’est un véritable manifeste néo-marxiste dans lequel Zemmour se déchaîne contre le capitalisme financier responsable, selon lui, de toutes les dérives. Il faut lire les dix pages d’éloges qu’il consacre à Georges Marchais ou le chapitre dithyrambique où il soutient le mouvement social contre les lois Juppé en 1996. Tout cela en dit long sur le débat d’idées aujourd’hui : on ne lit plus, on raisonne par étiquette et on lance des anathèmes à partir de petites phrases.

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