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20 janvier 2015

C. H. (suites) - Jean-Jacques Candelier sur l'Irak . Tout est dit!

 http://jeanjacquescandelier.fr/


Jean-Jacques Candelier sur l'Irak par lavoixdunord

Interventions diverses en séance publique
Le 13 janvier 2015
Vote sur la prolongation de l’intervention militaire en Irak

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, madame et monsieur les ministres, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, ce vote sur la poursuite de l’intervention française en Irak a lieu alors que notre pays vient d’être attaqué par des criminels fanatiques dont le profil est similaire à ceux qui sévissent en Irak et en Syrie. Ici comme là-bas, la question des modalités de notre réponse à la barbarie se pose.

Notre réaction doit-elle se résumer à une logique sécuritaire et guerrière ? Telle n’est pas la conviction des députés du Front de gauche. Que veulent en effet les terroristes, si ce n’est toujours plus de violence, le carburant de leur propagande et de leur machine de haine ? Toute l’histoire des vingt dernières années en Irak, en Afghanistan et en Libye le démontre : les interventions militaires occidentales directes ont toutes eu pour résultat de renforcer les groupes armés islamistes. La stratégie de guerre au terrorisme se solde par un échec patent, produisant même les effets inverses de ceux recherchés.

Qu’en est-il de cette intervention ? Quatre mois après le début des bombardements, le peuple irakien continue de souffrir et les États-Unis ont décidé d’envoyer plus de 3 000 conseillers militaires supplémentaires. Les violences en Irak ont coûté la vie à plus de 15 000 personnes l’année dernière, soit deux fois plus qu’en 2013.

Le bilan est encore plus lourd en Syrie, du fait de la guerre civile. Avec plus de 76 000 morts en 2014, ce pays vient de connaître son année la plus meurtrière.

Derrière ces chiffres, il y a des atrocités, des sociétés meurtries, des peuples déchirés. Il est temps de réfléchir au sens et à l’efficacité de notre intervention militaire, conduite sous l’égide des États-Unis.

D’un côté, l’avancée de l’État islamique en Irak a été freinée par les frappes aériennes de la coalition, par l’action des forces kurdes et irakiennes, avec le soutien indispensable de la coalition, ainsi que de milices chiites et des pasdarans iraniens.

De l’autre, la coalition est impuissante sur le front diplomatique. L’action militaire n’a pas permis d’éliminer les capacités offensives de l’État islamique. Cette secte barbare – car il ne s’agit pas d’un État – reconstitue ses troupes et pratique la guérilla. Sa stratégie consistant à se mêler aux civils rend difficile la poursuite des bombardements. Ces islamistes tiennent toujours Mossoul ainsi que des pans entiers du pays, où ils font régner la terreur. Les civils en paient le prix fort, en particulier les minorités kurde, chrétienne et yézidie. Personne n’échappe à cet enfer, pas même les musulmans, qui essaient de fuir la folie meurtrière de Daech.

Face à ces forces obscures, l’inaction ne peut être de mise. Cependant, il est aussi de notre responsabilité de réaffirmer les principes du droit international face à la décision de l’exécutif d’engager la France sous un commandement américain et sous la tutelle de l’OTAN.

Faute d’avoir été informée par le Gouvernement, c’est par la presse que la représentation nationale a appris la décision de déployer un groupe aéronaval dans la région du Golfe persique, où le porte-avions Charles-de-Gaulle doit se positionner. Nous le répétons : la France doit retrouver une voix indépendante face à l’OTAN et aux États-Unis, dont nous ne partageons ni la vision du monde, ni les intérêts.

Nous pouvons d’autant moins accepter le leadership américain que les États-Unis sont à l’origine du chaos irakien.

Il est aussi temps de prendre nos distances avec les pétromonarchies. Ai-je besoin de rappeler que l’État islamique n’est pas un phénomène spontané ? Il résulte à la fois de l’effondrement de l’État irakien, laminé par George W. Bush en 2003, et de la guerre civile syrienne, alimentée depuis 2011 par les Américains et leurs satellites. Ironie de l’histoire, les États-Unis sont à la tête de la coalition contre Daech, tout comme ils avaient combattu Ben Laden, alors que celui-ci avait été utilisé par la CIA contre les Soviétiques. La guerre contre Daech est la conséquence de la destruction de l’armée irakienne par l’occupant américain.

C’est la « guerre contre le terrorisme » qui a conduit à l’extension internationale du djihad armé. Les peuples ne cessent de payer le prix de cette folle entreprise qui vise à refaçonner la carte de ces pays en y imposant la démocratie par la force, quitte à exploiter les extrémistes. N’est-ce pas Laurent Fabius qui, avant de se rétracter en mai 2013, avait refusé d’inscrire le Front al-Nosra sur la liste des organisations terroristes, au motif qu’il faisait du « bon boulot en Syrie » ? Dans le même temps, la France refuse de retirer le PKK, le parti des travailleurs du Kurdistan, et le PYD, le parti de l’union démocratique, de la liste des organisations terroristes, alors que ce sont des forces démocratiques, qui défendent aujourd’hui la population de Kobané contre Daech.

Aujourd’hui, le groupe État islamique jouit d’une notoriété inégalée, qui lui permet de recruter dans le monde entier, et domine un territoire immense. L’intervention armée de l’Occident risque de nourrir le fantasme du « choc des civilisations ».

La division de l’Irak en entités ethniques et confessionnelles ne date pas de Daech, qui n’a fait que profiter de la situation. L’hypothèse d’un éclatement de l’Irak n’a cessé de se renforcer depuis l’invasion illégale du pays au nom de la « guerre globale contre le terrorisme » et du mensonge des armes de destruction massive.

Comment remédier à ce foyer du terrorisme international qu’est l’État islamique ? La solution ne réside pas dans de nouveaux bombardements, alors que les opérations précédentes n’ont fait qu’empirer la situation. Hormis dans des cas ponctuels d’urgence ou de légitime défense, la violence n’est pas une réponse durable aux crises, sauf à accepter d’entrer dans un cercle vicieux mortifère.

Tirons les leçons du bourbier afghan et de ce qui se passe en Libye ! Il faut attaquer le mal à la racine. Nous considérons que la réponse au défi lancé par le groupe « État islamique » ne doit pas être seulement militaire : elle doit aussi être politique, économique et diplomatique. Le « tout répressif » est incapable de venir à bout des aspirants au terrorisme, toujours plus nombreux, y compris en France.

Si la sécurité et la souveraineté de l’Irak relève des Irakiens et des acteurs de la région, la communauté internationale, qui a une responsabilité dans la situation actuelle, doit jouer un rôle. Une stratégie globale impliquant tous ses membres, notamment les pays du Golfe et la Turquie, doit conduire à priver les islamistes de leurs moyens militaires et financiers. Concrètement, il convient d’intensifier la lutte contre le trafic de pétrole, d’armes et d’argent qui alimente Daech. Le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté une résolution en ce sens : elle doit être pleinement appliquée. La vente de pétrole rapporte quelque deux millions de dollars par jour à Daech, auxquels s’ajoute le milliard de dollars de subventions annuelles que lui versent des milliardaires sunnites du Golfe.

C’est l’avenir de l’Irak comme État nation qui est en jeu. La voie à suivre est celle du dialogue politique interne. La France doit se mettre au service de la paix, et non à celui de l’atlantisme. Telle est sa vocation, tel est son intérêt, telle est sa responsabilité morale.

Notre pays doit exploiter le capital de sympathie dont il jouit encore dans la région pour aider nos amis irakiens. Il doit prendre l’initiative d’une conférence réunissant, sous l’égide de l’ONU, tous les pays de la région, en particulier l’Iran, la Turquie et les monarchies du Golfe.

Il faut aider l’Irak, confronté à la difficile répartition du pouvoir entre ses différentes composantes ethniques et religieuses. Le nouveau Premier ministre irakien a fait un geste en direction de la communauté sunnite ; désormais, certaines tribus sunnites combattent les islamistes aux côtés de l’armée irakienne. Il a également lancé le chantier de la modernisation de l’armée irakienne – cela s’imposait eu égard à sa débandade de l’été dernier devant Daech. Les relations avec les Kurdes se sont elles aussi apaisées depuis la prise de fonction du Premier ministre.

Après des mois de frappes aériennes, l’engagement français reste entouré d’opacité et ses objectifs ambigus. La question de sa légalité se pose. À défaut d’un mandat de l’ONU, l’appel à l’aide du gouvernement irakien est certes susceptible de fonder une action armée, mais seulement temporairement, comme le stipule l’article 51 de la Charte des Nations Unies. De plus, l’extension des frappes de la coalition au territoire syrien, en dehors de tout cadre légal, pose problème.

Dès lors, dans la mesure où cette intervention se fait sous l’égide, non pas du Conseil de sécurité de l’ONU, mais de l’OTAN, et où nous doutons de l’efficacité de nouvelles frappes, nous nous abstiendrons, tout en précisant qu’il convient d’aider l’État irakien à éradiquer ces barbares.

Dernière mise à jour du site le : 17 décembre 2014
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Commentaires
J
Effectivement. Mais vous avez remarqué qu'il parle de l'actualité des acharnements des US (et de l'OTAN) au Moyen Orient.... Plus qu'un réquisitoire et une récapitulation de l'histoire des exactions d'un néocolonialisme au MO, il tente de prévenir contre une poursuite de ces interventions (qui comme vous le savez sont soutenues avec acharnement par Fabius, Hollande, "Botul" etc... au prix d'une lourde désinformation des citoyens français.) C'est l'urgence actuelle qu'il faut dénoncer. .<br /> <br /> (NB: je doute qu'il ignore ce qui s'est passé en Libye et à quelles fins, mais hélas... le chapitre est clos, et le chaos y est installé sans recours...) <br /> <br /> Notez bien ce qu'il a eu le courage de dire (il est le seul à ma connaissance!) :<br /> <br /> "Il est aussi temps de prendre nos distances avec les pétromonarchies. Ai-je besoin de rappeler que l’État islamique n’est pas un phénomène spontané ? Il résulte à la fois de l’effondrement de l’État irakien, laminé par George W. Bush en 2003, et de la guerre civile syrienne, alimentée depuis 2011 par les Américains et leurs satellites. Ironie de l’histoire, les États-Unis sont à la tête de la coalition contre Daech, tout comme ils avaient combattu Ben Laden, alors que celui-ci avait été utilisé par la CIA contre les Soviétiques. La guerre contre Daech est la conséquence de la destruction de l’armée irakienne par l’occupant américain."<br /> <br /> <br /> <br /> A droite il y en a eu un autre (voir Villepin - en nov 2014 je crois - dans le dossier CHARLIE HEBDO 2015 sur ce blog qui a aussi plaidé dans ce sens ... mais avec moins de force il me semble)<br /> <br /> <br /> <br /> Ce Monsieur a toute mon estime pour le travail permanent qu'il accomplit pas à pas jour après jour.
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M
Le monsieur dénonce les interventions qui divise et détruit des peuples et il pointe du doigt les USA le méchant qu' il faut se détacher mais il évite soigneusement de mentionner le massacre et les crimes que la France a commis en Libye... Pfff
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