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9 juillet 2015

Giulietto Chiesa - " Pour pouvoir dire la Vérité il faut venir en Russie"

 

G. Chiesa. Pour pouvoir dire la Vérité il faut venir en Russie.

C’est surtout « par défaut » que le texte ci-dessous parle de la Russie. Son auteur, Giulietto Chiesa , est journaliste, politicien d’origine italienne. Il a longuement vécu et travaillé en Russie, le russe est devenu sa seconde langue maternelle. Il est également membre du Club d’Izborsk, sur le site duquel cet article a été publié le 06 juillet 2015. Il y expose brièvement sa vision comparée de la liberté d’expression en Occident et en Russie.


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Dès l’époque de l’URSS, l’Occident a reproché à notre pays l’absence de liberté d’expression, et il continue à le faire aujourd’hui encore. Mais cette même liberté est-elle en usage en Occident ?Le journaliste et analyste politique Giulietto Chiesa est convaincu de ce que la liberté de parole a disparu d’Occident depuis longtemps.
Si l’on veut mettre en exergue la liberté d’expression, il faut tenir compte des époques. Entre les journalistes actuels de Russie et d’Occident, la différence n’est pas énorme. La fonction des uns et des autres est similaire. C’est l’idéologie qui diffère.
Les journalistes de Russie sont mécontents car jusqu’ici ils considèrent qu’ils ne sont pas libres. Du point de vue pratique, c’est le cas, car la liberté ne va pas jusqu’à leur permettre de raconter ce qu’ils pensent dans n’importe quel média. Ils imaginent dès lors qu’ils ne sont pas libres alors que les journalistes en Occident le seraient. Voilà une opinion grotesque et naïve, dont le fondement se situe au niveau idéologique, dans un sentiment  d’infériorité. Ils s’imaginent qu’en Russie les gens n’ont jamais été libres et que, par contre, en Occident, tout le monde peut dire ce que bon lui semble. On peut dévoiler les scandales, dénoncer haut et fort la corruption, etc.
Effectivement, il fut un temps lors duquel le pluralisme existait en Occident. Ce pluralisme existait dans de nombreux pays. En Amérique, par exemple, il fut un temps où la presse, la radio, étaient libres. Souvenons-nous du célèbre film « Le quatrième Pouvoir ». Ce fut réellement ainsi à un moment de l’histoire de l’espace de l’information aux États-Unis d’Amérique ; il existait une concurrence entre les idées. L’information était une marchandise, et pour faire des bénéfices, il fallait mener une lutte sans merci, dire la vérité, dévoiler des secrets. Ce fut réellement le cas. Aujourd’hui ? Ce ne l’est plus. On a mis fin à tout cela. Pas au même moment dans tous les Etats ; l’histoire n’est pas uniforme.
Il fut un temps en Europe aussi, où la presse était libre. A cette époque, il existait des partis d’opposition, communistes, socialistes, et ils avaient leurs médias. On pouvait donc fournir une information alternative, du moins une information pas identique à celle du pouvoir. En fait, cela a duré environ un demi-siècle. On assistait à un véritable combat entre les idées, au débat entre les opinions. La lutte entre les différentes tendances se déroulait non seulement dans les journaux et les magazines, mais aussi au cinéma.
Toutefois, on peut estimer que dans la société occidentale, le véritable pluralisme est mort au début des années ’70. A cette époque, une autre situation s’est installée, dont la presse, la télévision constituaient une partie. Il fut un temps où toutes les chaînes de télévision en Europe étaient des chaînes d’État, et malgré cela elles accueillaient les débats et luttes d’idées. Et il existait aussi une lutte entre elles. Les idées pouvaient être bonnes ou mauvaises ; au moins, les gens avaient la possibilité d’apprendre et de comprendre en quoi consistaient ces idées. En principe, la démocratie propose un choix : si une chose ne plaît pas, il est possible d’en choisir une autre.
Mais au cours des 40 dernières années, un processus d’unification s’est mis en place en Occident, dont la conséquence est la formation d’une pensée unique. Les autorités détiennent le pouvoir et l’information est entre leurs mains. A des moments différents selon les pays, les partis d’opposition disparurent les uns après les autres, et les sources d’information alternatives se tarirent. Il ne restait que la multiplication des journaux et des chaînes de télévision. Et tous disent la même chose. Il ne s’agit plus de pluralisme, mais d’une fiction de pluralisme, d’une tromperie, d’une illusion, comme si on disait, regardez combien les sources sont nombreuses. Mais fondamentalement, toutes disent les mêmes choses. Voilà l’état actuel de l’information en Occident ; il n’y a plus de réel pluralisme. Il reste de petites niches exigües destinées aux opinions alternatives. On ne m’interdit pas de dire ce que je veux, mais où puis-je le dire ? Sur l’internet. Toutes les chaînes de télévision et les journaux me sont fermés, comme ils le sont pour tous ceux qui adoptent des points de vue différents de celui qui prévaut dans le cadre de la politique d’information officielle.

Et paradoxalement, pour que je puisse dire la vérité, je dois prendre l’avion jusque Moscou. Et je raconte à mes collègues en Russie qu’ils se trompent en imaginant que la liberté de parole existe en Occident. Plus personne n’y est libre !
Source.

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