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31 octobre 2007

Les syndicats: financement et légitimité

LE MONDE ECONOMIE | 29.10.07 | 11h56  •  Mis à jour le 29.10.07 | 20h03

Des affaires, il y en avait déjà beaucoup eu. En 2000, un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) montrait que la Caisse de retraite interentreprises (CRI) rémunérait des permanents des cinq centrales syndicales (CGT, CFDT, CFTC, FO et CFE-CGC). Deux ans plus tard, on apprenait que la Mairie de Paris avait pris en charge la rémunération du chauffeur-garde du corps de Marc Blondel de 1990 à 2001. L'ancien secrétaire général de FO a attribué cela à une "erreur dans l'affectation des ressources". Aujourd'hui, c'est l'Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM) qui est prise la main dans le pot de confiture. Denis Gautier-Sauvagnac, "DGS", son futur ex-président (il ne demandera pas le renouvellement de son mandat en novembre), a fait retirer au cours des huit dernières années quelque 24 millions d'euros en liquide sur plusieurs de ses comptes bancaires. A qui étaient destinés ces fonds ? D'où provenaient-ils précisément ? Le parquet de Paris mène l'enquête.

Est-ce l'importance des sommes concernées ? L'argent fructifiait sur une "caisse de secours mutuel" pour atteindre une cagnotte de 600 millions d'euros. Est-ce l'aplomb avec lequel "DGS" et ses prédécesseurs expliquent que le système mis en cause "existe depuis le Comité des forges de 1864", l'ancêtre de l'UIMM ? Toujours est-il que la coupe semble pleine. Salariés et retraités regardent d'un oeil soupçonneux ceux - syndicats et patronat - qui négocient en leur nom les règles sociales de demain. La question de la représentativité des partenaires sociaux (avec un taux de syndicalisation compris entre 7 % et 8 %) était déjà sur toutes les lèvres, voilà que vient s'ajouter avec fracas celle de leur financement.

Mais comment a-t-on pu en arriver là ? Deux éléments semblent en cause.

La faiblesse - pour ne pas dire la lâcheté politique - de gouvernements de droite comme de gauche qui ont toujours repoussé à plus tard les réformes nécessaires. "DGS" peut ainsi affirmer que son organisation a agi en toute légalité, en se référant à la loi Waldeck-Rousseau de 1884 sur les syndicats professionnels, sous les auspices de laquelle a été créée l'UIMM en 1900. Le texte n'impose aucune obligation en matière de comptabilité. Même anachronisme concernant la représentativité des organisations syndicales. Les règles datent de plus d'un demi-siècle, de la loi du 11 février 1950 qui en a fixé les cinq critères : les effectifs, l'indépendance (vis-à-vis de l'entreprise), le versement de cotisations, l'expérience et l'ancienneté, l'attitude patriotique pendant l'Occupation. Les confédérations qui satisfont à ces critères au niveau national et interprofessionnel - selon une liste établie par un arrêté ministériel du 31 mars 1966 et devenue immuable - se sont vu reconnaître une "présomption irréfragable" de représentativité qui leur permet de signer des accords dans des entreprises et d'y présenter des candidats dès le premier tour des élections, même si elles n'y ont pas d'adhérents. Bref, une assurance tous risques. Les portes des grand-messes interprofessionnelles sont donc encore fermées à l'UNSA ou à Solidaires, nouveaux venus dans le paysage syndical.

Ni Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi de Lionel Jospin en 2001, ni Jean-Louis Borloo, ministre du travail de Jean-Pierre Raffarin en 2004, n'obtiendront le feu vert de Matignon pour sortir de leurs cartons des réformes prêtes à être discutées.

Second élément : l'inertie des appareils, côté patronal comme syndical, qui ont longtemps oublié - protégés par l'arrêté de 1966 - de s'interroger sur leurs liens avec la réalité d'une économie française qui, en se tertiarisant, abandonnait petit à petit ses cathédrales industrielles et ses cohortes d'ouvriers, inventait de nouveaux modes d'organisation du travail diminuant les niveaux hiérarchiques et conduisant à plus d'individualisme. Les partenaires sociaux, de leur côté, se sont "professionnalisés" et bureaucratisés, se montrant de moins en moins attractifs pour les générations montantes. Le tout dans un jeu de rôle où aucun n'osait remettre l'autre en cause, de peur de faire tomber l'ensemble de l'édifice. Pourtant l'UIMM, décidée à moderniser son image, avait fait un effort : le 2 juillet 2001, la fédération changeait son nom d'Union des industries métallurgiques et minières en Union des industries et métiers de la métallurgie. Cela n'aura pas suffi...

Marie-Béatrice Baudet

La mue a eu lieu à Strasbourg le 27 octobre 1998. Ce jour-là, devant un parterre de 1 700 chefs d'entreprise - aucun membre du gouvernement Jospin, aucun ténor de l'opposition, aucun syndicaliste n'avaient été invités -, Ernest-Antoine Seillière, président du Conseil national du patronat français (CNPF), et Denis Kessler, vice-président, posent la première pierre de la révolution "idéologique" de l'organisation. Afin de replacer l'entreprise "au centre de la société française", le CNPF devient le Mouvement des entreprises de France (Medef) dont le projet, d'ancrage libéral, vise à mener "une véritable guerre de terrain contre l'interventionnisme d'Etat" et à exercer un "leadership d'influence" pour défendre "les entreprises françaises, les plus mal traitéesd'Europe".

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