Jean-Louis Bianco : "Ségolène Royal est loin d'être finie"
Publié le samedi 28 août 2010 à 14H31
Le président PS du Conseil général 04, qui nous révélait jeudi son envie d'être candidat aux primaires, va plus loin
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Le PS peut-il se contenter d'attendre le déclin dans les sondages de Nicolas Sarkozy pour passer à l'offensive ?
Bien sûr que non. Il faut que le PS soit de plus en plus dans la proposition. Un travail a été fait dans un climat plutôt bon. Le PS est en voie de redressement. Mais ça ne percute pas pour l'instant. Il nous faut trouver une manière d'être plus audibles. On a un an d'ici les primaires. Le souhait de victoire de la gauche est pour une fois très net. Mais ça ne suffit pas.
Le contexte semble pourtant favorable à la gauche...
Je
n'en suis pas sûr. Ne sous-estimons pas Nicolas Sarkozy. Il a une
capacité de réaction hors du commun. Il peut réussir à ce qu'on dise "
lui au moins il s'est bougé". Et
cela va très vite, d'autant que les Français n'ont plus confiance dans
les politiques. Il nous faut une méthode radicalement différente. On ne
peut pas se contenter d'analyses. Il faut une vraie rupture.
Martine Aubry n'aurait-elle pas dû s'exprimer plus tôt ?
Elle a fait le choix de ne pas se précipiter. Elle aurait pu aller un peu plus vite, mais Sarkozy va à toute allure sur des sujets qu'il choisit et il ne s'agit pas de courir derrière. On sortira de La Rochelle avec des propositions précises.
L'unité que cherche à montrer le PS à La Rochelle est-elle viable dans la perspective des primaires ?
Les militants ne veulent plus de la guerre des chefs. En outre, les différences idéologiques au sein du PS sont moins importantes qu'avant. Mais je crains cette guerre des chefs. C'est une énorme erreur de faire des primaires aussi tard. On a un vrai problème de leadership et on a beaucoup maltraité Ségolène Royal. Je ne crois pas à la possiblité de maintenir ces pactes de bonne volonté entre Aubry, Strauss-Kahn et Royal. Humainement, c'est impossible, même s'ils sont tous sincères. On a un an avant les primaires pour s'étriper. Ça ne tiendra pas.
Ségolène Royal est-elle toujours à vos yeux la meilleure chance du PS pour 2012 ?
Elle est loin d'être finie et représente toujours la meilleure chance par sa capacité à faire bouger les lignes, par son intuition. Elle parle sans aucun tabou et son langage est mieux compris chez les jeunes et les ouvriers. Et ce n'est pas grave si elle semble isolée. Les amis reviennent quand le vent change. C'est vrai qu'elle n'est pas bien en ce moment dans les sondages, mais elle a une force exceptionnelle et va rebondir. Et Martine Aubry, même si elle est légitime en tant que première secrétaire, n'est, en terme de réseaux, pas très forte au sein du parti.
Que feriez-vous si Ségolène Royal n'était pas candidate ?
J'attends de celui ou celle qui sera désigné par les primaires qu'il soit bon sur le fond et je ne me déterminerai qu'en fonction de cela. Je n'exclus pas de me présenter aux primaires. Je le ferai si les thèmes qui sont présentés au PS ne me conviennent pas. Mon livre d'entretiens qui sortira le 7 septembre chez Albin Michel est titré "Si j'étais président" et sous-titré "Que faire en 2012?" J'y propose une vision d'avenir plus qu'un programme.
Concrètement ?
La situation de la France sera pire en 2012. Il faut faire débattre, partir de l'individu tel qu'il est, non pas tel qu'on veut qu'il soit. Donner plus de pouvoir aux ouvriers dans les entreprises, faire des lois régionales et dix fois moins de décrets.
Vous représenterez-vous aux législatives de 2012 ?
Je
n'ai pas encore décidé. Il y a la question du cumul des mandats. Dans
l'absolu, je préfère le mandat local de président du Conseil général,
surtout dans l'état où est le Parlement. Néanmoins,
ma tendance est plutôt de me présenter aux législatives sur
tout si c'est dans un climat où on a perdu la présidentielle.
Pensez-vous que l'on puisse renoncer à Iter, après la polémique autour de son surcoût ?
Il faut continuer Iter. C'est une aventure extraordinaire. Le surcoût est inévitable. Je crois que se priver d'une telle chance, si le réacteur marche, n'est pas sérieux. En attendant que ça fonctionne et pour pallier la raréfaction des énergies fossiles, il faudra conserver le nucléaire. D'autre part, Iter est un formidable vecteur économique pour Manosque.
Digne semble être l'oubliée du développement par rapport à Manosque. Est-elle vouée à devenir "une réserve d'indiens ?
Il y a une raison géographique au développement de Manosque et du Val de Durance. Digne souffre de son enclavement. L'État abandonne l'A51 pour des raisons financières. Entre les Mées et Digne, le barreau autoroutier est aussi enterré. Une deux fois deux voies coûterait aussi cher qu'une autoroute. Quant à une route à trois voies, elle va poser des problèmes de sécurité routière. On a perdu beaucoup de temps sur l'A51.
Tous les gouvernements ont leur part de responsabilité mais depuis 2002, on aurait pu bouger un peu plus! Si Manosque se développe beaucoup, Digne ne recule pas pour autant. Je crois beaucoup à la carte de l'IUT où déjà 300 étudiants sont inscrits pour développer la région dignoise.
Propos recueillis par Philippe FANER, Roberto FIGAROLI et François TONNEAU dans LA PROVENCE