MITTERRAND: UN BON OS À RONGER...
A croire que les hommes politiques sont des Français comme les autres: s'ils achètent des best sellers, c'est moins pour les savourer que pour pouvoir en parler dans les dîners en ville...
09.10.2009
Jacques GUYON
On
lit de moins en moins en France. La preuve vient d'en être faite avec
«La mauvaise vie» de Frédéric Mitterrand et la polémique qui a
tellement enflé hier autour de cette autobiographie qu'il a fallu que
son auteur vienne hier soir à TF1 pour sauver sa tête de ministre de la
Culture vouée à rouler dans les cendres de l'infamie en s'expliquant
sur un livre qui avait pourtant été couvert de dithyrambes lors de sa
parution il y a quatre ans. On a ainsi assisté toute la journée d'hier
à un étonnant défilé radio-télévisé au cours duquel les spadassins de
l'indignation décapitante - les socialistes Benoît Hamon, Jean-Paul
Huchon, Arnaud Montebourg ou Manuel Valls - comme ceux qui sont montés
au front pour défendre leur collègue - les ministres Brice Hortefeux ou
Fadela Amara - finissaient tous par admettre... qu'ils n'avaient pas lu
le livre incriminé! A croire que dans le microcosme politique, deux
seules personnes avaient lu ce bouquin. Marine Le Pen qui a lancé la
polémique à partir d'une lecture quelque peu orientée et Nicolas
Sarkozy qui, lui, avait déclaré en juillet dernier dans une interview
au Nouvel Observateur qu'il avait trouvé le livre «courageux et
talentueux». A croire que les hommes politiques sont des Français comme
les autres: s'ils achètent des best sellers c'est moins pour les
savourer que pour pouvoir en parler dans les dîners en ville...
Dommage. Car la lecture de ce livre suffit largement à éteindre la
polémique. Les confessions de Frédéric Mitterrand sur le tourisme
sexuel, sur son homosexualité, sa description sans fard mais sans
complaisance d'une authentique souffrance n'ont rien à voir ni avec les
accusations de pédophilie ni avec celles de prosélytisme qu'agitent ses
détracteurs. Si les confessions de Frédéric Mitterrand constituaient un
«crime» qui peut penser que son éditeur l'aurait laissé passer?
Pourquoi alors ces attaques et pourquoi si tard? On peut discerner dans
cette campagne trois raisons principales. La première tient évidemment
à la façon maladroite et très excessive dont Frédéric Mitterrand a
réagi à l'arrestation de Roman Polanski. La seconde renvoie à ce que
son patronyme sert de muleta à la fois à la Sarkozie et à une partie de
la gauche socialiste. D'un côté, il sonne comme une nouvelle prise de
guerre. De l'autre, on semble estimer que bien que n'ayant jamais été
encarté à gauche, le simple fait de s'appeler Mitterrand interdit ce
qui est vu comme une mésalliance. Xavier Darcos a eu hier un lapsus qui
éclaire bien cette dimension quand, parlant du ministre de la Culture,
il a évoqué... François Mitterrand. Enfin, troisième raison: la
déréliction du débat politique. Et c'est là évidemment la plus
inquiétante.
Source: CHARENTE LIBRE