L'identité nationale en débats...
Le ministre Eric Besson a ouvert le débat hier, uniquement sur Internet. Car les préfectures ne sont pas encore prêtes: elles n'ont reçu leurs instructions qu'hier
... www.debatidentitenationale.fr/.../pour-vous-qu-est-ce-qu-etre/ -
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(.....) La création du ministère de l'immigration et de l'identité nationale était une des promesses de campagne de Nicolas Sarkozy. En 2007, le candidat déclarait: "Parler de l'identité nationale ne me fait pas peur", même si "pour certains c'est un gros mot. (...) Je ne veux pas laisser le monopole de la nation à l'extrême droite. Je veux parler de la nation française parce que je n'accepte pas l'image qu'en donne Jean-Marie Le Pen." Le ministère a finalement été créé le 18 mai 2007 dès le premier gouvernement Fillon sous l'intitulé complet de "ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire". L'identité nationale, une affaire politique ou philosophique ? En réclamant le débat, Eric Besson a suscité un tollé dans l'opposition qui y a vu un thème emprunté à l'extrême droite. Pour le philosophe et écrivain Michel Onfray c'est au contraire une bonne occasion de se réapproprier le débat et de dire que l'identité nationale "est une certaine conception de la République qui fait preuve d'ouverture et de solidarité".
NOUVELOBS.COM | 03.11.2009 | 08:59
(....... ) Pour moi, il y a deux façons de concevoir
l'identité. Celle de l'identité du sang, de la race et l'autre de la
raison et de l'intelligence. Donc je trouve très bien de dire ce qu'est
la France et comment elle fonctionne. Et ce n'est pas parce que la
droite et l'extrême-droite ont défini une certaine idée de l'identité
de la France, qu'il faut leur laisser dire. C'est une bonne occasion de
dire que la France c'est la Révolution française, c'est une certaine
conception de la République qui fait preuve d'ouverture, de solidarité
et de fraternité.
Que reste-t-il de cette identité nationale aujourd'hui ?
- Je crois qu'elle est mal en point parce que justement nous avons
laissé cette question là à la droite et à l'extrême-droite. Et que la
gauche considère que le simple fait de parler d'"identité nationale",
cela revient à utiliser le langage de l'extrême-droite. Ce qui n'est
pas vrai. (......)
Interview de Michel Onfray par Sarah Diffalah (sur le N.OBS)
(le mardi 27 octobre 2009)
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Faut-il que les jeunes Français chantent au moins une fois par an l'hymne national ? Pour le journaliste et intellectuel Jacques Julliard le cérémonial n'est pas tout. L'identité nationale existe bien mais elle est en perpétuelle évolution. Interview.
(...... ) Comment peut-on la définir ?
- Cette conscience est très forte et visible quand la nation est
menacée. Et si aujourd'hui on se pose la question de savoir ce qu'elle
est, c'est justement parce que nous ne sommes pas menacés. En cas de
menace, l'identité nationale se définira toute seule. Longtemps
l'identité nationale s'est formée dans la continuité, dans le temps et
dans l'espace : nos ancêtres les Gaulois. Est-ce qu'aujourd'hui, la
conscience nationale peut se définir par un passé commun ? Je dis non.
Par un territoire ? Ce n'est pas certain. Les migrations sont devenues
un phénomène de masse et l'erreur est d'ignorer le temps qui passe. Il
n'y a pas que le présent qu'on s'invente en commun. Le passé aussi doit
être créé. Les derniers arrivants en France se valoriseront par rapport
à la nation, seulement s'ils se constituent un passé commun. (...)
Je
crains qu'Eric Besson ne veuille définir l'identité nationale de
manière statique. Alors un débat pourquoi pas, mais seulement dans un
esprit d'accueil.
Interview de Jacques Julliard par Sarah Diffalah (sur le N.Obs)
(le mardi 27 octobre 2009)
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Alors que s'ouvre le "grand débat sur l'identité nationale", Nouvelobs.com donne la parole à Michel Rocard : "L'idée que l'identité nationale fasse doute et qu'il faille en rediscuter me stupéfie", explique l'ancien Premier ministre, car "la logique de fabrication de la France se détruit si on la ferme". Interview.
(...) je crains beaucoup que le fait d'ouvrir le débat ne se traduise, comme souvent en France, par une volonté de formaliser, de décrire et de mettre dans des textes, ce qui va figer. C'est idiot… C'est idiot parce que je n'ose pas caresser l'espoir que dans ce débat sur l'immigration, la victoire aille à cette définition : la France est la seule identité nationale au monde qui soit en définition évolutive et constamment en train d'agglomérer de nouvelles sensibilités et de nouvelles représentations linguistiques ou de couleurs de peau.
C'est votre définition ?
- Oui. Absolument. En 1789, les Français secouent le joug de la
monarchie absolue. Les trois ordres se réunissent, ils écrivent la
déclaration des Droits de l'homme et du citoyen, et il ne leur vient
pas à l'idée de n'écrire que pour eux. Ils écrivent pour le monde
entier. Les deux premiers mots sont "Les hommes",
sans distinction géographique, linguistique ou raciale. "Les Hommes
naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions
sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune."
C'est un trait culturel. Et toute idée que le cadeau de la France au
monde qu'est ce texte puisse être terni, par le fait qu'on donnerait
plus d'importante à certains hommes qui sont rassemblés dans l'hexagone
sur certains autres, c'est un attentat à la grandeur de la France.
Le débat sur l'identité nationale de la France est-il relancé à des buts électoralistes ?
- La perspective électoraliste ne peut pas être dissociée, c'est vrai. Mais dès lors qu'on ouvre le débat, la perspective électoraliste disparait. Il y a le sujet, et il y a ce qu'on va en faire.(....)
Propos de Michel Rocard recueillis par Baptiste Legrand
le lundi 2 novembre 2009 - Nouvelobs.com