Ségolène Royal: Témoignage d'un de ses anciens collaborateurs
Par Antielephant
le 28/02/2010
A un moment où la droite et ses complices du palais de Solférino font tout pour mettre en doute les compétences et les qualités humaines et relationnelles de Ségolène Royal, et tente de gommer soigneusement toutes ses actions positives au service de l’intérêt général, pour la faire passer de façon fallacieuse pour une femme soiltaire et autoritaire, en voici un témoignage honnête et sans complaisance d’un untellectuel et ancien collaborateur de Mme Royal qui rétablit la vérité et qui devrait par la même occasion tordre le coup à toutes les colomnies propagées par ses adversaires politiques. Extraits:
Témoignage de Jean Baubérot, historien et sociologue. Il fut aussi conseiller de Ségolène Royal, ministre déléguée à l'Enseignement scolaire.:
propos recueillis par Jean-Luc MOUTON
Dans quelles conditions avez-vous
été amené à faire partie du cabinet de Ségolène Royal?
J’ai publié, en 1997, un ouvrage sur
la morale laïque que l’éditeur a envoyé à diverses personnalités, dont
Ségolène Royal. Elle était alors ministre déléguée à l’Enseignement
scolaire. C’est elle qui a pris contact avec moi, ce qui est bien dans
sa manière, simple et directe. Lors de ce rendez-vous, j’ai été séduit
par sa spontanéité et sa disponibilité. Elle m’a proposé de m’occuper
des «initiatives citoyennes» qu’elle venait de lancer. Il fallait
impulser une formation à la citoyenneté et soutenir les expériences
intéressantes déjà faites par certains professeurs.
J’ai accepté de tenter l’aventure
pour six mois. J’y suis resté treize mois et je suis parti quand j’ai
été élu président de l’Ecole pratique des hautes études.
Quels
souvenirs gardez-vous de son comportement avec ses collaborateurs?
Certains ouvrages récemment parus la décrivent comme cassante, dure,
autoritaire…
Elle
est avant tout très exigeante. Elle s’estime chef d’orchestre et a des
objectifs précis. Il faut que ses divers collaborateurs fonctionnement à
partir du tempo qu’elle donne. Au début, je me suis fait un peu
«remonter les bretelles» car j’avais l’habitude de commander et donc je
prenais des initiatives sans lui en référer. Mais je peux témoigner
qu’elle l’a toujours fait en me respectant, en m’expliquant ce qui
n’allait pas, jamais devant d’autres personnes du cabinet... et avec un
charmant sourire ! Je ne l’ai jamais trouvé cassante. Et j’ai vite
compris comment il fallait fonctionner. Par contre, une fois l’erreur
venait d’elle, elle l’a assumée sans essayer de me faire porter le
chapeau. C’est assez rare pour être noté.
Je pense qu’une femme qui fait une carrière politique est
forcément un peu autoritaire.
Certains hommes n’acceptent pas facilement d’être commandés par une femme.
Ses
détracteurs la disent encore obsédée par les questions d’image et de
présence dans les médias depuis de longues années…
Elle est soucieuse de son image, cela
au service de ses convictions. Elle a de vraies convictions.
Elle ne ménageait pas ses efforts pour rétablir une bonne image des profs, à l’encontre de son ministre, Claude Allègre, qui ne les épargnait pas.
Son ambition à de très hautes fonctions était-elle déjà
sensible ?
Sur le
moment, je ne l’ai pas senti. Avec le recul, certaines attitudes me font
penser qu’elle estimait ne pas avoir dit son dernier mot en étant
ministre. Je pense que, jeune conseillère de Mitterrand, elle a beaucoup
observé et appris. Nous avons parfois parlé de lui et de sa manière
terrienne de faire de la politique, comme si elle voulait s’en inspirer
dans une carrière qu’elle imaginait plus longue et plus ambitieuse.
Quelles sont, d’après vous,
ses convictions propres et la source de son engagement ?
Elle est de famille catholique et
semble avoir été marquée par cette éducation. Elle m’a pourtant confié
qu’elle s’était éloignée de l’Eglise catholique en raison de son
antiféminisme. Certaines valeurs chrétiennes l’intéressent, le
dépassement d’une raison instrumentale par exemple. François Hollande et
Ségolène Royal ont cheminé dans « l’écurie de Jacques Delors », et sans
doute là l’imprégnation d’un humanisme chrétien a continué, mais sans
référence explicite, dans une attitude d’attirance et de dissensus.
Sur le plan politique, elle
n’est ni marxiste ni d’un socialisme doctrinaire. Elle a un sentiment
aigu de l’injustice, des injustices commises à l’égard de personnes en
position de faiblesse. Ses combats contre le bizutage, contre la
pédophile partaient de là. Certains, y compris au cabinet, considéraient
que cela relevait d’une vision plutôt traditionnelle de la sexualité.
Mais souvenez-vous qu’elle a aussi introduit dans les lycées la « pilule
du lendemain ». D’où cet aspect inclassable. Elle est de gauche, mais
pas toujours à la manière de la gauche…
Est-elle assez compétente? Quand je
l’ai vue à l’œuvre, elle a montré une grande capacité à synthétiser les
dossiers et à prendre de bonnes décisions.
Elle est la première femme candidate crédible à la présidence.
Elle doit donc forcer un tabou, celui que l’on opposait aux premières
femmes pasteurs, avocates ou médecins. Pour moi, c’est plutôt le
maintien de certains archaïsmes du socialisme français qui m’interrogent
et surtout les pesanteurs culturelles de la France d’aujourd’hui.
http://www.jlturbet.net/article-5985156.html
Interview parue dans le N° 3210 du magazine Réforme