Régionales: Ebriété interdite!
Par Gilles savary, mercredi 31 mars 2010
La Gauche,
et plus encore le Parti socialiste, ont de bonnes raisons de se
satisfaire de leur victoire éclatante aux élections régionales.
Elle est sensiblement différente de celle de 2004, non seulement par
son ampleur sans appel, mais surtout parce qu'elle démystifie et
pulvérise d'un coup la Citadelle politique opiniâtrement construite par
Nicolas Sarkozy.
Dissolution du front National dans la Droite classique, Union granitique
de toutes les Droites républicaines, Discipline de fer de l'UMP,
Verdissement up to date de l'Elysée, Ouverture à gauche: toutes ces
briques de l'édifice sarkozyste viennent de voler en éclat, comme paille
au vent !
Martine Aubry a plutôt bien géré sa victoire en évitant de faire
entendre l'habituel chant du coq de Solférino avant même que l'aube soit
claire.
La situation du Parti Socialiste reste en effet celle d'un grand
convalescent qui a encore beaucoup de chemin à parcourir pour prétendre
affronter la compétition de 2012.
D'abord, même s'il s'est mis lui-même dans l'embarras, Nicolas
Sarkozy dispose encore d'intentions de votes étonnemment élevées si la
présidentielle devait avoir lieu aujourd'hui : 48% contre Martine Aubry
au plus chaud d'une dérouillée historique, ça doit inviter à la
prudence. Et puis Fillon, Villepin, Juppé pourraient constituer un banc
des remplaçants à ne pas négliger.
En second lieu Solférino serait bien avisé de méditer l'écart qui sépare
encore ses jeux d'appareil et sa logomachie dogmatique des pratiques
politiques concrètes de ses Présidents de Région pour identifier qui a
vraiment gagné ces élections. La Victoire de George Frêche en Languedoc
Roussillon confirme qu'il y a encore très loin de Solférino au
terrain...
Et puis, qu'ils le veuillent ou non, les Socialistes vont devoir
composer avec Ségolène Royal sauf à s'amputer d'une base populaire qui
lui reste très attachée. Gérable au sein du Parti au prix d'une absence
de scrupules, un nouvel épisode du "tout sauf Ségolène" ferait plus de
dégâts devant l'électeur français.
Même s'ils s'efforcent de se tenir, on sent poindre à nouveau des
frétillements d'avidité parmi les nombreuses beautés fatales que compte
le Parti Socialiste.
Rien ne serait pire pourtant que d'entretenir encore le postulat toxique
qui nous empoisonne depuis le Congrés de Rennes, selon lequel
l'alternance est automatique et la prochaine élection "imperdable".
C'est précisément cette illusion post mitterrandienne qui a transformé le PS en arène de sélection et de compétition interpersonnelles implacables plutôt qu'en Parti de projet et d'espérance pour la Société française d'aujourd'hui.
En d'autre termes, si l'on veut gagner en 2012, ayons l'humilité de penser que cette élection est perdable, même après la magnifique leçon de ces Régionales!
Gilles SAVARY vice président du conseil Général de la Gironde