Crise financière européenne: Un système irrationnel et immoral
Il faudrait aujourd’hui, car un an d’hésitations se payent au prix
fort, 100 à 120 milliards d’euros pour sauver la Grèce. 100 à 120
milliards pour combler le gouffre creusé par la spéculation. Or 120
milliards correspond à ce que la France devrait, elle-même, économiser
en trois ans pour remettre ses propres comptes publics dans les clous.
En d’autres termes, ce n’est qu’en creusant des déficits considérables,
mais devenus ordinaires, qu’on parviendra à éteindre l’incendie provoqué
par un déficit, celui de la Grèce, déclaré extraordinaire. Ajoutons que
ce n’est même pas forcément une mauvaise affaire car on emprunte à
moins de 3% pour prêter à plus de 5%. Absurde.
Une réflexion ici
s’impose.
Un système, de quelque nature qu’il soit, capitalisme,
socialisme, peut être considéré comme plus ou moins juste, plus ou moins
démocratique, plus ou moins égalitaire, respectant plus ou moins
certains droits. Mais sa pérennité n’est garantie que s’il parvient à
convaincre qu’il obéit à une logique, la sienne, et qu’il est fidèle à
des valeurs, les siennes. Autrement dit, qu’il a sa propre cohérence, et
sa propre morale.
C’est à partir du moment où le système soviétique
est apparu, aux yeux mêmes de ses propres défenseurs, totalement
irrationnel et totalement immoral, qu’il s’est effondré.
Or que
montre, une fois encore, une fois de plus, la crise déclenchée par la
semi-faillite grecque : elle montre que le système (celui-là même qui
fut à l’origine du méga crack de 2008 mais qu’on a maintenu en l’état)
est devenu intrinsèquement irrationnel et intrinsèquement immoral. Ce n’est pas là une opinion. C’est un constat. Qui peut affirmer qu’il
ne le partage pas ?
Or combien de temps peut tenir un système global
qui ne peut plus se réclamer de la moindre cohérence et de la moindre
éthique ?
On peut dire, par exemple : pour sauver un pays — en
l’occurrence la Grèce — de la banqueroute, il faut que sa population se
serre les coudes et la ceinture, c’est-à-dire accepte des sacrifices.
On
peut évidemment discuter de la répartition de ces sacrifices, mais
l’affirmation n’est ni incohérente ni immorale. Dès lors, en revanche,
que les sacrifices effectivement imposés et plus ou moins consentis
permettent d’économiser 5 mais que, dans le même temps, la spéculation
internationale coûte 10 (spéculation qui, rappelons-le, est à l’origine
d’une crise qui a nécessité qu’on emprunte massivement) et dès lors en
outre que la récession provoquée par ces sacrifices et les taux
d’intérêt exigés par les prêteurs malgré les sacrifices creusent les
déficits de 15… où est la logique, ou est l’éthique ?
Et on pourrait
généraliser la démonstration, le scandale Goldman Sachs qui indigne
l’Amérique n’en étant qu’une illustration.
On pouvait dire, par
exemple, hier, quand les entreprises annonçaient des profits records,
« les profits d’aujourd’hui sont les emplois de demain ». C’était
cohérent et pas immoral. Mais quand les profits d’aujourd’hui sont à la
fois la cause et la conséquence des délocalisations boursières qui
induisent des suppressions d’emplois aujourd’hui et demain, où est la
cohérence, où est la morale ? ....Lire la suite...........