Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Vu au MACROSCOPE
Visiteurs
Depuis la création 1 378 953
Newsletter
28 août 2011

PS : Fabius le grand vizir joue au « petit notaire » et agace

Bichonné à l'université d'été de La Rochelle, l'ex-Premier ministre se pose en référence et exaspère les entourages des candidats.

Laurent Fabius à La Rochelle vendredi (Audrey Cerdan/Rue89).

(De La Rochelle) N'importe qui d'autre serait embarrassé par tant d'égards. Pas lui. Vendredi soir, Laurent Fabius est à la droite de Martine Aubry, devant les vitrines du Museum d'histoire naturelle de La Rochelle, où la candidate a donné rendez-vous aux journalistes.

Entourée des piliers de sa campagne, elle parle d'elle, de son « enthousiasme absolu », de sa « forme assez olympienne ». Et de « Laurent ». Une, deux, trois, quatre fois.

A ce niveau-là, ce n'est plus de la considération, c'est de la révérence. Lèvres tendues et sourcil gauche en accent circonflexe, Fabius savoure en silence. « Ça lui fait tellement plaisir… », souffle un militant en croquant dans une brochette de fruits.

 

Si Fabius s'incruste, des proches d'Hollande menacent de déserter

Ça lui fait peut-être plaisir, mais ce traitement de dignitaire agace. A tel point que sur le port, on commence à évoquer un « problème Fabius ». Alors que les six écuries ont vocation à fusionner à l'issue de la primaire, des cadres de l'équipe de François Hollande ont jugé nécessaire d'avertir leur patron : s'il l'emporte le 16 octobre, il n'a pas intérêt à confier le moindre rôle d'importance à l'ex-Premier ministre. Ou alors ils déserteront.

Dans cette université d'été où les démonstrations de force des candidats à la primaire sont sans surprise, l'exaspération affichée envers l'homme du Grand-Quevilly est l'un des rares ingrédients qui n'était pas écrit d'avance.

Samedi matin, c'est Jean-Marc Ayrault et Jean-Pierre Bel, les patrons des groupes socialistes des deux assemblées (également soutiens de François Hollande) qui ont voté avec leurs pieds. Invités à présenter, comme c'est la tradition, un bilan de l'activité parlementaire, ils avaient « planché tout l'été » (il est permis de juger la formule exagérée) pour préparer cette table-ronde.

« Au dernier moment », le programme a été modifié pour être centré sur la mission confiée par Martine Aubry à Laurent Fabius sur les premières réformes à entreprendre en 2012. Marylise Lebranchu, l'amie d'Aubry, fait mine de ne pas comprendre la vexation d'Ayrault et Bel :

« Laurent a pourtant travaillé avec de nombreux partisans d'Hollande… »

 

« J'avais imaginé un million d'autres choses à dire… »

L'incident illustre à merveille le reproche fait à l'équipe Aubry de truster, dans ce rassemblement, la majorité des tribunes et des places d'honneur. Sur la forme, le compte-rendu de la mission Fabius a été poussif (« je suis un peu long », « j'aurais mille choses à dire », « j'avais imaginé un million d'autres choses à dire ») mais sur le fond, il tenait presque du discours de politique générale.

Comme le dit Harlem Desir, le premier secrétaire du parti par interim, « Fabius va transmettre un rapport extrêmement précis au candidat qui sera désigné ».

Un strauss-kahnien fulmine :

« Il est urgent de nous émanciper de cette espèce de vassalisation intellectuelle. Fabius a commis quantité d'erreurs, et pas seulement sur l'Europe. Il est temps que le PS se libère de cette tutelle. »

Cette « tutelle » est exercée depuis trois ans. Aubry et Fabius avaient officialisé leur alliance ici même, il y a trois étés, avant d'aborder ensemble le Congrès de Reims.

Ils formaient le noyau des « reconstructeurs ». Ce mouvement rassemblait aussi les amis d'Arnaud Montebourg et une partie des strauss-kahniens, unis par la volonté de défendre une « gauche décomplexée » – et d'empêcher Ségolène Royal de prendre le parti. Leur tactique a fonctionné.

 

« J'“intuite” les choses comme ça »

Depuis que Fabius a officiellement renoncé à toute ambition personnelle – comme disent pudiquement ses amis, « Laurent n'a pas connu de rencontre avec les Français » – le PS dirigé par Aubry s'est mis à l'écouter comme Mauroy.

Impossible de contredire le grand vizir quand il dit « j'“intuite” les choses comme ça ». L'infaillibilité pontificale version socialiste. Depuis l'ouverture de la campagne pour la primaire, il exerce ce magistère au sein du « conseil politique » de Martine Aubry.

Lui-même est très conscient de son statut : il a beau se présenter en simple « petit notaire », greffier des propositions de « tout un groupe de travail », il ne peut s'empêcher d'ajouter :

« Je suis la seule personne vivante parmi les socialistes qui ait à la fois dirigé un gouvernement et présidé l'Assemblée nationale. »

Celui qui aurait dû être directeur de campagne de DSK aurait pu ajouter : ex-candidat à la primaire de 2006. Et, c'est inédit : tuteur virtuel d'un(e) président(e) pas élu(e). Pris d'une alaindelonite aiguë, il prévient : « Ce n'est pas Laurent Fabius ayant telle ou telle idée personnelle qui est en cause. C'est l'application de notre projet. »

Photo : Laurent Fabius à La Rochelle vendredi (Audrey Cerdan/Rue89).

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité
Vu au MACROSCOPE
Derniers commentaires
Archives
Publicité