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29 septembre 2012

Débat à l'Onu entre liberté de parole et respect des religions

Sur YAHOO

 

NATIONS UNIES (Reuters) - Les dirigeants du monde musulman étaient à l'unisson cette semaine aux Nations unies pour reprocher aux Occidentaux de se cacher derrière leur défense de la liberté d'expression et d'ignorer les sensibilités culturelles.

Le chef de la diplomatie turque, Ahmet Davutoglu, a ainsi estimé qu'il était temps d'en finir avec une islamophobie avançant sous le masque de la liberté de parole.

"L'islamophobie est malheureusement devenue une nouvelle forme de racisme, à l'égal de l'antisémitisme. On ne peut pas la tolérer davantage sous l'apparence de la liberté d'expression. La liberté, ce n'est pas l'anarchie", a-t-il dit vendredi à la tribune de la 67e Assemblée générale des Nations unies.

Avant lui, d'autres dirigeants de pays musulmans ont exprimé des sentiments similaires en se saisissant de l'actualité récente: le film "L'innocence des musulmans", réalisé en Californie et décrivant le prophète Mahomet comme un demeuré, puis les caricatures publiées par l'hebdomadaire français Charlie Hebdo, qui ont ravivé les craintes d'un affrontement.

Mohamed Morsi, le président égyptien issu de la confrérie islamiste des Frères musulmans, a expliqué mercredi que l'Egypte respectait "une liberté d'expression dont on ne se sert pas pour inciter à la haine".

"Nous attendons des autres, comme ils l'attendent de nous-mêmes, qu'ils respectent nos spécificités culturelles et nos références religieuses, et non qu'ils nous imposent des concepts ou des cultures qui nous sont inacceptables", a-t-il ajouté.

Asif Ali Zardari, le président du Pakistan où les manifestations contre les attaques visant le prophète ont fait une quinzaine de morts, a réclamé pour sa part que les insultes contre les religions soient érigées en crime.

"La communauté internationale ne doit pas devenir un observateur silencieux mais devrait criminaliser ces actes qui détruisent la paix et mettent en danger la sécurité du monde en abusant de la liberté d'expression", a-t-il dit.

COMBATTRE L'ISLAMOPHOBIE AU MÊME TITRE QUE L'ANTISÉMITISME

Les pays occidentaux, qui ont soutenu le "printemps arabe", ont exhorté les pays touchés par cette vague d'émancipation, comme la Tunisie, la Libye ou l'Egypte, à engager des réformes démocratiques et à adhérer aux principes des droits de l'homme et aux libertés fondamentales, redoutant parallèlement l'émergence de pouvoirs islamistes.

Dans son discours à l'Onu, le président américain Barack Obama a de nouveau condamné le film californien à l'origine de violentes manifestations, mais a aussi défendu avec vigueur la liberté d'expression.

"L'arme la plus puissante contre les discours de haine, ce n'est pas la répression, mais c'est encore plus de discours, ce sont les voix de la tolérance qui se rassemblent contre le sectarisme et le blasphème", a-t-il dit.

Illustrant le degré de colère atteint dans une partie du monde arabo-musulman, quelque 150 manifestants ont réclamé justice devant le siège new-yorkais de l'Onu, réclamant que les Nations unies fassent du blasphème un crime.

L'Organisation de la coopération islamique (OCI), qui regroupe 57 pays, a réclamé cette semaine devant le Conseil des droits de l'homme des Nations unies à Genève que l'islamophobie soit combattue par la loi au même titre que l'antisémitisme ou la négation de l'holocauste.

Les pays occidentaux redoutent eux les effets d'une loi sur le blasphème comme celle qui est en vigueur au Pakistan par exemple, et y voient un risque de répression et d'oppression des minorités religieuses.

Le débat entre liberté d'expression et respect des sentiments religieux ressurgit régulièrement et avec violence à travers le monde.

Il en va ainsi de la fatwa lancée en 1989 par l'ayatollah Khomeini contre l'écrivain britannique Salman Rushdie, coupable à ses yeux de blasphème dans son roman Les Versets sataniques, ou des manifestations provoquées par la parution de caricatures du prophète Mahomet en 2005 dans un journal danois.

"NOUS NE POUVONS PAS ÉVITER LES TSUNAMI, MAIS NOUS POUVONS EN LIMITER LES DÉGÂTS"

Pour certains, la nouvelle flambée de violences déclenchée de Tunis à Islamabad par la diffusion sur YouTube d'extraits du film tourné en Californie sont la confirmation d'un "choc des civilisations", la thèse développée dans les années 1990 par l'Américain Samuel Huntington, qui prédisait que les conflits à venir ne se noueraient plus autour de la quête de territoires ou d'affrontements idéologiques, mais de confrontations culturelles.

Jeudi, le ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle, s'est inscrit en faux contre cette thèse. Les images d'ambassades en feu ne sont pas la preuve d'un choc des civilisations, a-t-il dit. "Nous ne devons pas nous laisser tromper par de tels arguments. Ce n'est pas un choc des civilisations, mais un choc au sein des civilisations", a-t-il poursuivi. "C'est aussi une lutte pour l'âme du mouvement de changement dans le monde arabe."

Le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a insisté pour sa part sur le travail de l'Alliance des civilisations (UNAOC), une initiative lancée en 2005 sous le patronage des Nations unies.

"Nous savons que nous ne pouvons pas éviter les tremblements de terre ou les tsunamis, mais nous pouvons en limiter les dégâts et sauver des vies. Faisons de même lorsqu'il est question de compréhension interculturelle", a-t-il dit.

"Dans notre époque où l'information est interconnectée, nous ne pourrons peut-être pas éviter tous les marchands de haine dans tous les recoins de la planète, mais nous pouvons construire des ponts qui soient suffisamment solides pour résister à ces forces, nous pouvons priver ceux qui sèment la division de ce qu'ils veulent le plus: davantage de haine, davantage de bouleversement, davantage de publicité."

Henri-Pierre André pour le service français

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