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8 mars 2013

Chavez: pourquoi tant de haine?

Sur MARIANNE

Mercredi 6 Mars 2013 à 14:00 | Lu 18309 fois I 100 commentaire(s)

 

Jack Dion - Marianne

Chavez restera comme l’homme politique le plus détesté des médias d’Occident en général, et de France en particulier. Quoi qu’il n’ait jamais enfreint le suffrage universel et qu’il ait été réélu trois fois, il a été traité au mieux de « populiste » (c’est devenu l’injure suprême) et au pire de dictateur

 

Victor R. Caivano/AP/SIPA
Victor R. Caivano/AP/SIPA

Chavez restera comme l’homme politique le plus détesté des médias d’Occident en général, et de France en particulier. Quoi qu’il n’ait jamais enfreint le suffrage universel et qu’il ait été réélu trois fois, il a été traité au mieux de « populiste » (c’est devenu l’injure suprême) et au pire de dictateur. Il a même été affublé de l’étiquette de « Mussolini des Caraïbes ». Le Monde et Libération en ont fait leur cible préférée, instruisant à son encontre des procès perpétuels (dont celui d’antisémitisme pour Libé). Alors que le président du Venezuela a toujours eu contre lui l’immense majorité des médias de son pays, possédés par des équivalents locaux de Dassault, on l’a systématiquement suspecté de mettre la presse au pas.
 

Bref, dans un monde médiatique fonctionnant sur le mode binaire –  les bons contre les méchants – Chavez était d’office classé dans le camp du Mal. Le Venezuela devait être mis en banc de la civilisation,  à la différence du Qatar ou de l’Arabie Saoudite, par exemple, ces pays amis de l’Occident, forcément respectueux des droits de l’homme, de la femme et du citoyen (surtout de la femme). 
 

Serait-il donc impossible d’avoir une approche complexe et contradictoire d’un homme politique dont on commence à reconnaître aujourd’hui qu’il a rendu un peu de dignité au petit peuple ? Aider les pauvres, serait-ce un crime contre l’humanité ? 
 

Avant l’arrivée d’Hugo Chavez au pouvoir, le Venezuela  alignait une dette publique colossale (40 % du PIB) malgré un programme de privatisations et d’austérité imposé au milieu des années 1990 par le FMI. En 1998, lorsqu’il a été élu pour la première fois, près de la moitié de la population vivait avec moins de deux dollars par jour, alors que le pays figurait aux premiers rangs mondiaux pour l’exportation d’or noir. 
 

En reprenant possession des ressources nationales au moment même où les prix filaient vers le haut, Hugo Chavez s’est payé le luxe, si l’on peut dire, de rembourser le FMI, avant d’en claquer la porte. De grandes entreprises de la sidérurgie, des télécommunications, de l’énergie, naguèrevendues à bas prix sur recommandation du FMI, sont repassées dans le giron national. Une politique de redistribution en direction des plus défavorisés a été mise en place. Du haut de leur suffisance, certains « experts » ont décrété qu’il s’agissait de la forme suprême de la démagogie. Ah bon. 
 

Soyons clair. Que l’ex président du Venezuela ait manifesté des tendances marquées à l’autocratie, c’est certain. Que la corruption rode dans son entourage le plus proche, c’est évident. Qu’il n’ait fait ni dans la dentelle, ni dans la nuance, cela saute aux yeux. S’il ne fut en rien un dictateur, Chavez avait une conception très personnelle de l’exercice du pouvoir et du culte du chef. 
 

De plus, son hostilité aux Etats-Unis (réflexe assez répandu dans la région) virait souvent à un antiaméricanisme de pacotille pouvant le conduire à des amitiés particulières d’un goût douteux. Malgré ses déclarations tonitruantes contre « l’impérialisme prédateur », le Venezuela n’en a pas moins continué à vendre son pétrole aux Etats-Unis, qui demeurent le premier client de Caracas, au nom d’un pragmatisme largement partagé. 
 

Tout cela est avéré, et il n’y a aucune raison de faire de Chavez un petit Saint. Mais il n’est pas le Diable non plus. Après tout, un pays doté démocratiquement d’un gouvernement qui prétend œuvrer pour le bien public, s’opposer au diktat des multinationales, et chercher une voie originale de développement, c’est chose relativement nouvelle sur un continent sud-américain qui a majoritairement basculé à gauche dans la dernière décennie, avec des expériences diverses et variées. Cela ne fonde pas un modèle Chaviste. D’ailleurs, il n’y a plus de modèles. Mais cela devrait inciter à porter un regard circonstancié sur le bilan réel de celui qui se voulait le descendant spirituel de Bolivar.   
 

A force d’avoir un jugement préconçu et des dogmes à la place des idées, on finit par ne plus pouvoir expliquer pourquoi le peuple du Venezuela s’est reconnu si longtemps dans un président qui ne mérite ni excès d’honneur ni indignité à perpétuité.

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