Le débat fait fureur sous les lambris du Palais-Bourbon et du Palais du Luxembourg. A la salle des fêtes de Sombernon (Côte-d'Or), la question du cumul des mandats n'est pas tout à fait absente non plus. 

Venu parler collectivités territoriales et ruralité devant les élus du Pays de l'Auxois-Morvan, mardi 12 mars, François Hollande a répété que la réforme interdisant le cumul des mandats interviendrait "dans le quinquennat", mais qu'elle ne pouvait être établie que si "un statut pour les élus" était mis en place. Une exigence formulée par de nombreux parlementaires, pour qui le non-cumul doit aller de pair avec des garanties plus fortes (indemnités, indépendance, etc.).

 

Cumuler, une assurance en cas de défaite électorale

Parmi la centaine d'élus présents ce mardi à Sombernon, pour la plupart sans étiquette mais plutôt marqués à gauche, le cumul des mandats n'est a priori pas le sujet le plus concernant : la loi à venir touchera avant tout les parlementaires. Mais les élus ruraux sont souvent présentés comme attachés à un système qui permet à des barons locaux de peser aussi lourd à Paris que des énarques ou des polytechniciens. Surprise, ceux rencontrés mardi par francetv info sont plutôt favorables à la réforme.

"Cela devrait être fait depuis longtemps, il n'y a aucune raison que cette réforme soit bloquée, juge par exemple Jean-François Neugnot, maire de Massingy-lès-Semur, 210 âmes. Pour ceux qui cumulent, avoir plusieurs mandats c'est une assurance personnelle, c'est tout ! Un maire influent, s'il est élu ailleurs et qu'il choisit de démissionner, il ne pourra plus revenir les années suivantes. Une fois que vous avez laissé la place, vous l'avez perdue !", explique-t-il.

 

"Un homme, un mandat"

Pour cet édile, le cumul des mandats, c'est aussi le cumul dans le temps, qui empêche le renouvellement du personnel politique : "Vous voyez, ici, il y a très peu de femmes et beaucoup de cheveux blancs, dit-il en observant la salle. Les élus s'installent dans la longueur, mais à force, ils se déconnectent des attentes de la population." 

D'autres essaient de se projeter en cumulards. Sans conviction. "Si j'étais maire d'une ville, je ne pense pas que je pourrais assumer un mandat de plus. Je n'aurais pas le temps de tout gérer", témoigne Jacques Collignon, adjoint au maire de Montbard (5 500 habitants). "Pour moi, c'est un homme, un mandat. Sinon, vous n'avez plus de proximité avec vos administrés, complète le maire d'une commune de 600 habitants. Si vous cumulez, vous devez forcément déléguer une partie de vos prérogatives à d'autres personnes."

 

Garder un lien entre national et local

Reste que pour certains, un élu national se doit de garder un pied sur le terrain pour ne pas se couper des réalités. "Ce qui est très ennuyeux dans le non-cumul des mandats, c'est qu'il n'y aura plus de lien entre les niveaux de décision. Or, on ne peut pas être élu dans les hautes sphères sans avoir conscience de ce qui se passe localement", estime Christelle Muther, adjointe au maire de Semur-en-Auxois (4 000 habitants), qui n'est pas encartée mais se dit "centriste".

L'élue peut se rassurer : les huit parlementaires de la Côte-d'Or, sans exception, cumulent. Trois députés sur cinq et trois sénateurs sur trois disposent même d'un mandat exécutif local, ce que la future loi interdira. Parmi eux, le président de la région Bourgogne, François Patriat (PS), le président du conseil général, François Sauvadet (UDI), et le maire de Dijon, François Rebsamen (PS), très hostile au non-cumul. Ce dernier, proche du chef de l'Etat, avait pris soin de préciser, lundi, que la venue de François Hollande dans sa ville n'avait "rien à voir" avec cette question.

Ilan Caro