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22 avril 2013

MELENCHON - Au-delà des formules-chocs et de l'art de la rhétorique...

Sur LE POINT

 

Mélenchon, ah, ça ira !

Publié le 21/04/2013 à 17:45 - Modifié le 22/04/2013 à 10:23

Au-delà des formules-chocs et de l'art de la rhétorique, pour Nathalie Rheims, le coprésident du Parti de gauche prépare sa révolution

Jean-Luc Mélenchon, coprésident du Parti de gauche (PG).

Jean-Luc Mélenchon, coprésident du Parti de gauche (PG).© Emile Pol / Sipa

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Dans un débat qui se déroula le 7 janvier 2013, Jérôme Cahuzac l'avait traité de "clown" sur le plateau de Mots croisés sur France 2, animé par Yves Calvi. Jean-Luc Mélenchon lui avait répondu : "Chacun aura noté quel sens vous avez du respect de l'autre. Moi, je ne vous traite pas de clown, ni de corrompu, ni de rien." Il venait d'évoquer l'avenir de la France, allant avec Hollande et Cahuzac (rebaptisés pour l'occasion Hollandreou et Cahuzandreou) de plan d'austérité en plan d'austérité sans jamais parvenir à tenir les promesses faites aux Français.

Mélenchon était de retour samedi à la télévision, invité par Laurent Ruquier dans On n'est pas couché sur France 2. Cela m'a donné envie de voir en replay les débats entre les deux hommes. C'est édifiant : un résumé de la confrontation entre la vérité et le mensonge, où l'on voit qu'avant de mentir sur lui-même Cahuzac le faisait déjà, au nom de son gouvernement, du pouvoir de gauche, de Hollande, sur l'état de la France et sur les actions à mener. Il mentait là-dessus avec la même arrogance et le même mépris qu'il affichait à l'encontre de Mélenchon en le traitant de "clown".

 

Mélenchon, un excellent "client"

J'ai donc regardé Mélenchon samedi soir. C'est vrai que c'est une star de la télé. Il en a compris tous les codes, toutes les ruses. C'est sûr qu'il a le sens des formules-chocs qui font rire et que son art de la rhétorique emprunte souvent au "stand-up". Mais derrière cette méthode oratoire, malgré elle parfois, on devine une démarche, une pensée, une action qui sont particulièrement cohérentes. Je me garde bien de parler, ici, de politique. Ce n'est pas mon rôle, je ne regarde pas la télévision en tant que citoyenne, je me tiens à ma situation de téléspectatrice. De ce seul point de vue, Mélenchon est bon, c'est une évidence, c'est un excellent "client". Si l'on met de côté les représentants de l'UMP et du PS, ils sont deux, avec Marine Le Pen, qui, sur le même terrain, est aussi très performante. Il n'en reste pas moins qu'à la dernière élection présidentielle elle a réalisé le score de 17,8 %, tandis que Mélenchon, malgré la dynamique de sa campagne, était à 11,1 %. Il y avait un écart de 6,8 % entre eux, dont les analystes savent qu'il ne s'agissait pas de CSP+.

Face à Le Pen, au regard de la classe ouvrière, Mélenchon traîne un certain nombre de boulets liés aux vestiges d'une idéologie marxiste ou communiste devant laquelle les travailleurs ont tendance à dire : "C'est bon ! On a déjà donné !" Pour eux, Marine Le Pen représente une solution paradoxalement plus inédite et plus transgressive. Mais en regardant et en écoutant Mélenchon samedi soir chez Ruquier, je me suis dit qu'il était en train de régler son principal handicap. Ce qui ne lui allait pas, c'était d'être candidat à la présidence de la République, d'une République qui ne lui allait pas non plus. C'est ce qui explique en partie la relative faiblesse de son score à la présidentielle. Beaucoup de ceux qui désiraient avant tout le départ de Sarkozy, ne voulant pas prendre le risque d'une Marine Le Pen au second tour, n'ont pas voulu affaiblir Hollande et ont trouvé plus sage le fameux "vote utile".

 

Mélenchon, le tribun

Aujourd'hui, Mélenchon revient, ayant trouvé son véritable rôle, débarrassé des enjeux de l'élection présidentielle. Il n'est pas un candidat plausible à ce genre d'élection. Surtout avec une Constitution comme celle de la Ve République. Il a trouvé son emploi et son texte. D'abord, c'est un tribun. Ensuite, il doit se débarrasser de l'héritage marxiste. Enfin, il est le seul à pouvoir mener un mouvement pour changer de Constitution. Le choix du 5 mai souligne ces trois aspects. Il rejoint l'hypothèse, celle de la une du Point, que nous sommes en 1789.

Dans ce cas, le 5 mai est une date décisive. Ce jour-là s'ouvraient à Versailles les états généraux. Louis XVI avait été obligé de les convoquer, car le royaume était confronté à une grave crise budgétaire. Cette assemblée, qui ne s'était pas réunie depuis 1614, était la seule qui pouvait imposer aux "privilégiés" la réforme fiscale nécessaire et restera dans l'histoire comme l'acteur d'un changement politique majeur : le passage de la souveraineté royale à la souveraineté du peuple. C'est là où Mélenchon a trouvé la clé de son nouveau positionnement historique. En débordant les luttes de la classe ouvrière, il retrouve les racines de la révolution bourgeoise que fut 1789.

D'une certaine façon, l'enjeu de la classe ouvrière est aujourd'hui dépassé et son glissement vers le Front national semble assez irréversible, compte tenu de la sensibilité à la question de l'immigration et du rapport à l'islamisme radical. Ce qui devient important, ce sont les classes moyennes en crise. C'est là que se trouvent les éléments du puzzle disparate qui peut servir d'impulsion à une révolution bourgeoise. Le 5 mai, il y aura le défilé pour la VIe République, mais aussi celui contre la loi Taubira, considérée comme attentatoire aux fondements de la famille bourgeoise. Le véritable but du 5 mai 2013, comme en 1789, c'est l'assemblée constituante.

 

Courons-nous un danger à suivre Mélenchon ?

Pourquoi la Ve République serait-elle, aujourd'hui, dépassée ? C'est la vraie question que soulève Mélenchon. À première vue, on serait tenté de soutenir le contraire. Si elle n'existait pas, la France serait déjà dans la "chienlit" politique qui touche les pays du sud de l'Europe, comme l'Italie, incapable de former un gouvernement qui tienne face à la crise. On peut dire que, aujourd'hui, les institutions de la Ve République, c'est la seule chose qui soit encore debout, y toucher serait une erreur dramatique, un retour au désordre et à l'impuissance politique de la IVe République, contrainte d'aller chercher l'homme providentiel, de Gaulle, en 1958 pour la sortir de l'impasse.

Soit. Mais sommes-nous condamnés à ne pouvoir choisir qu'entre les règles de la Ve et celles de la IVe ? Cela mérite, au minimum, un peu de réflexion. La Constitution de 1958 a été rédigée par des hommes remarquables, comme Michel Debré, pour une nation souveraine, confrontée à la chute de son empire colonial. Le rôle central d'un président de la République élu au suffrage universel et le système de l'élection majoritaire à deux tours des parlementaires qui verrouille sa majorité, et donc son gouvernement, encore renforcé par le quinquennat, étaient nécessaires à l'époque. On peut se demander si c'est toujours le cas aujourd'hui.

Avec l'évolution d'une Europe qui a adopté une monnaie unique et une banque centrale indépendante, on se rend compte que cette souveraineté n'est plus que de façade, et que la marge de manoeuvre des chefs d'État comme Sarkozy ou Hollande, face à la crise, est extrêmement étroite. À quoi bon protéger un pouvoir qu'on ne peut plus utiliser ? Ouvrir un débat sur les règles du jeu politique serait autrement plus intéressant que celui qui nous agite depuis six mois sur le mariage. Que risque-t-on vraiment, avec des discussions sur ce que devrait être la VIe République ? Quel danger courons-nous à suivre la proposition de Mélenchon ? Affaiblir le Front national ? Je pensais à cela en écoutant sa confrontation avec Aymeric Caron à propos de Robespierre. Je me disais que, si j'avais eu un prof d'histoire comme Mélenchon à l'école, ça aurait tout changé.

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