Ariane Walter:"Coup d'Etat" au FDG?
Pourquoi Pierre Laurent a-t-il choisi Jean-Luc Mélenchon comme représentant du parti communiste pour les élections présidentielles de 2012 ? On sait qu’il a joué un rôle essentiel dans ce choix. Que bien des communistes y ont été opposés. Le résultat : 60%/40% en est la marque. Connaissant le tribun, s’est-il dit qu’il serait utile au renouveau de son parti ?
Il y a pourtant une faute originelle, dans ce choix, qui ne pouvait manquer de faire jaillir des serpents. Mélenchon a quitté le PS. Le PC est allié du PS dans de nombreuses municipalités et conseils. On pouvait certes penser que Mélenchon critiquerait le libéralisme des fauxcialistes mais à ce point ! La surprise a été là ! Mélenchon me fait penser à un gladiateur qu’on engage pour combattre des lions, symboles du pouvoir, et qui bondit dans la loge des puissants, les traîne dans le sable et crie : « Le mal est là ! »
Ce qu’a fait Mélenchon pendant cette campagne est historiquement exceptionnel et, à mon avis, ne sera jamais reproduit. Il a dit au peuple qu’il n’y avait pas de coulisses pour lui et que ce parti socialiste auquel il avait participé, oui, était traître à sa cause ! Choc. Que certains le sachent, c’est une chose, que ce soit crié en public en est une autre.
Les communistes observaient tout cela, ravis et tremblants. J’ai assez d’amis communistes pour savoir que le discours de Mélenchon les a transportés. Mais pour certains, à la fin de la campagne, il fallait quand même retourner dans la maison socialiste. Ecrivant alors des articles qui suivaient la campagne de Mélenchon, ayant titré l’un d’eux : « Socialistes, on vous hait » à la suite de leur vote lors du MES, je fus accablée de posts qui me disaient : « Mais arrêtez de critiquer les socialistes, le FDG va travailler avec eux ! » Nous n’étions donc, comme le dénonçaient des FN contre qui je luttais post à post que « la voiture-balai du PS » !
Le fameux soir où Mélenchon a demandé, dans un élan d’une brutalité que lui inspirait sa propre déception, de voter sans réfléchir pour éliminer Sarkozy, j’ai reçu une lance dans le corps, comme beaucoup. Un des défauts de Mélenchon est, étant pris entre ses propres convictions et celles de ses alliés, de passer d’une opinion à une autre, opposée, ce qui est très déstabilisant pour ceux qui l’écoutent. Ainsi, après avoir dit à maintes reprises que les temps avaient changé , qu’il n’était pas maître des voix qui le choisissaient , le soir des résultats , on ne peut pas dire le soir de la défaite car la progression de 3 à 11 est inconcevable, il disposait de ces voix en leur donnant l’ordre de voter « contre Sarkozy », « sans réfléchir ».
Il aurait pu faire autrement. Je propose :
« Mes amis, nous ne sommes pas sous le coup d’une défaite ce soir. Nous nous sommes retrouvés. Nous avons posé les jalons d’une histoire de la gauche, la vraie gauche, celle des peuples qui se lèvent contre leurs oppresseurs. Nous sommes en route. Nous sommes une force qui est passée de 3% à 11 %. Jamais jeune parti n’aura réalisé, grâce à vous, un tel exploit. Que nous reste-t-il à faire ? Le bipartisme de cette politique américanisée qui nous ronge nous impose de choisir entre deux hommes de leur clan qui ne méritent ni l’un ni l’autre notre choix. Sarkozy ou Hollande, n’en doutons pas, le résultat sera le même. Et pourtant, un vote s’impose. Il s’impose à moi. A vous, c’est en votre âme et conscience que vous déciderez. Vos voix ne m’appartiennent pas. Voici mes conclusions. S’abstenir, il n’en est pas question. Le vote est une arme. Je vais l’utiliser. Si je refuse de voter Hollande, souhaitant sanctionner sa traîtrise de libéral, Sarkozy passera. Je ne le souhaite pas. Car s’il était élu les partisans de Hollande pourraient dire : « Ah ! Si nous étions au pouvoir ! » Je vais donc voter Hollande en sachant qu’il continuera cette éternelle politique de trahison que j’ai dénoncée dans cette campagne. On m’a dit que j’étais excessif dans mes attaques et je vous dis : « Vous allez voir que j‘étais indulgent car ce qu’il va nous faire sera pire que ce que vous pouvez imaginer. Mais beaucoup l’ignorent. Beaucoup pense encore qu’il est de gauche. Nous devons le mettre à l’épreuve de la réalité. »
Mais le temps n’était peut-être pas à la dentelle. Je me souviens d’un article de Patrick Piet qui disait que si Mélenchon n’avait pas jeté son aura dans cette dernière bataille, appelant à voter contre Sarkozy , Hollande n’aurait pas été élu. Et ferait encore rêver.
L’année qui suivit fut, suite à cette faute originelle qui avait uni des alliés du PS et un de leurs ennemis le plus flambant, une année horrible. « Dans l’opposition, pas dans l’opposition ». Avec cette honte pour nous, sur les marchés (les vrais), d’entendre :« Vous critiquez Hollande , puis vous votez pour lui ! » Comment être fier de son parti quand il invente des formules aussi alambiquées que « autonomie conquérante » Kesaco ? Quel sparadrap pour cacher que Mélenchon était poings liés dans la maison PS ?
Il est bien évident que Mélenchon est le seul homme politique d’envergure de ce temps. Tous les autres sont des nains de jardin, des employés de banque, des girouettes, des crapules, des mafieux. Il a peut-être des défauts notre Jean-Luc, il est un peu volcan d’Indonésie qui pète jusqu’au ciel les cendres de sa tristesse, mais il est, et c’est ainsi qu’il nous a cueillis, bien plus que lui-même, la voix des peuples malheureux de l’Histoire qui disent : « Non » !, qui s’instruisent et qui partent au combat. Il est, plus que lui-même, enraciné dans l’éternité des luttes populaires. Il suffisait de voir les visages fascinés, non pas de groupies, mais des témoins de ce passage de relai entre tous les courageux de l’histoire et nous. Car il en a sorti des mollasses de leurs fauteuils, de leurs télés, de petites bourgeoises comme moi qui, soudain, se retrouvaient à lever le poing et à chanter l’Internationale comme dans une comédie musicale à Broadway ! C’était surréaliste ! Théâtral et vrai ! Gamin et profond. Unique .
Et notre vie, la vie de nos enfants en dépendait dans ce monde de corruption infecte qu’il dénonçait, lui, le seul courageux à dire qu’il fallait sortir de l’OTAN, ridiculisant les Américains lors de leur histoire foireuse de mort de Ben Laden. Le courageux Mélenchon !
Imaginons les frissons d’angoisse du PC. Qui suit pas à pas la ligne de politique étrangère du PS !
Mais le pire était à venir.
Les municipales.
Là, il s’agit de places et de rentrées d’argent. Et dans ce domaine les hommes sont des loups de Neandertal. Certes, je le sais, l’importance d’un parti est lié au nombre de ses élus. La force des campagnes est liée à l’argent qui les supporte. Et le PC qui était à 1,93% aux avant-dernières présidentielles, a des villes, des bastions à défendre. Mais pour les défendre, il faut qu’il se soumette au PS. Qu’il salisse son histoire glorieuse en s’alliant avec les plus violents des libéraux.
C’est ce qui a dû se négocier quand Laurent est allé voir Hollande. J’aimerais bien avoir l’enregistrement de cette conversation. Elle éviterait bien des discours. Il y a une question que je me pose. Y-a-t-il dans ce contrat l’engagement de se débarrasser de Mélenchon ? De faire passer le message qu’il est nuisible ?
On le dirait si l’on s’en tient à la déclaration de Laurent, « je refuse la provocation et l’invective. » qui met le feu au poudre.
Mélenchon, informé de cette phrase lors de l’émission des « Quatre vérités », face à un Bornstein, synthèse de tous les interviewers qui ont l’insolence des larbins qui en font des caisses quand leurs patrons les observent derrière des moucharabieh, a cru, ou a feint de croire, qu’elle s’adressait à Désir qui l’avait traité de « bouffeur de coca ». Mais non, c’était un scud pour lui. Quelle faute politique de Pierre Laurent, indigne du représentant d’un grand parti. Une phrase qui met en cause l’unité du FDG. Mais c’est peut-être un bien car le FDG ne peut pas vivre éternellement assis sur une chaise bancale.
Mélenchon a répondu à Pierre Laurent lors de son discours de clôture des remue-méninges du Front de Gauche. Il a l’habitude, quand il a quelque chose à dire, de partir de loin et d’arriver sur le point fatal ,comme un oiseau, traçant de vastes cercles avant de fondre. C’est comme pour les « Salopards » de Delapierre. Tout le monde attend Mélenchon sur le sujet. Et lui aussi attend… Et au moment où l’on pense qu’il fera l’impasse il ouvre la plaie d’un coup de couteau dont la lame est faite de mots d’acier.
« On ne gagne rien à donner un coup de couteau dans le dos ».
Oui, Pierre Laurent, de la manière la plus maladroite a tenté un coup foireux qui dénonce en lui le boutiquier.
Les raisons en sont politiques. Il a dû s’engager à des unions avec le PS dès le premier tour des municipales. C’est ainsi que dans l’interview de Libé, il reconnaissait être en pourparler avec la mairie de Paris pour une dizaine de sièges ce qui engagerait leur départ avec eux dès le premier tour.
Ainsi, amis du FDG qui tractez et collez des affiches, vous le ferez pour que passe Mme Hidalgogo du PS ! On se fout de la gueule de qui, pour parler, plus que dru et cru, pour parler clair ? Et c’est le parti communiste qui est la base de cet accord ? Dites-moi que je rêve !
Le parti communiste, non. Un représentant qui le représente bien mal. Dartigolles, le porte-parole du PC a sauvé l’honneur. Hier Mélenchon lui a rendu grâce. Dartigolles a eu sa phase jalouse en d’autres temps, mais son attitude au sujet du pique-nique d’enfants avec Ayrault révèle un tempérament jeune qui tout à coup ne supporte pas la trahison de l’appareil vis à vis d’un idéal et d’une histoire. M.Dartigolles est communiste. C’est tout à son honneur de ne pas faire un pas de plus quand il sent que la limite de l’insupportable est atteinte. Et je ne parle pas des militants PC qui veulent déchirer leur carte en cas d’accords déshonorants avec des libéraux .
Par ailleurs, je mets en garde contre une trouvaille de je ne sais quel communicant, peut-être ceux qui ont conseillé à DSK de venir à la télé avec l’attestation du juge disant qu’il était libre (d’un ridicule !) ou Cahuzac avec sa merveilleuse formule « en bloc et en détail » qui signale l’épicier.
Donc on nous dit que La France croit que le PS est à gauche et qu’il faut en tenir compte… J’aurais pensé, bête que je suis, qu’il fallait les informer du contraire, mais non. Imaginons qu’à Chicago , les citoyens croient qu’ Al Capone est honnête, on pourrait travailler avec Al Capone ! Ou du moins les amis d’Al Capone qui croient qu’il fait commerce de boudins car il y a beaucoup de sang chez lui…
Il y a vraiment du jésuitisme chez ceux qui tiennent un raisonnement pareil ! Ils ont dû prendre des leçons avec le pape François qui admet l’homosexualité à condition qu’elle ne soit pas sexuelle !!
Ce clan veut absolument que la « gauche » passe. Mais quelle gauche ? Mélenchon a eu hier un grand cri : « Le gouvernement est à droite !»
Mais il faut aller plus loin M. Mélenchon si vous voulez être crédible. Si le PS est à droite, aucun électeur de gauche n’est tenu à voter pour eux. Que va-t-on nous sortir cet argument qui sent la soupe au fond du couloir : Union de la gauche contre la droite et l’extrême-droite !
Quelle gauche ? Hollande, Sarkozy et Le Pen sont des libéraux qui travaillent pour les mêmes patrons ! Arrêtez de nous faire peur avec votre FN nazi !! J’ai beaucoup plus peur de la vente à la découpe de notre pays sous cette fausse gauche qui s’apprête à voler nos retraites pour je ne sais quelle banque qui perdra aussitôt cet argent dans je ne sais quel jeu de casino !
Le PS se présente en rempart contre le FN ? Mais pourquoi dans le Vaucluse, y aurait-il eu des accords entre PS ET FN pour faire élire Marion Le Pen ? ( Lol pour mes amis PC. On se comprend.) Quel symbole cette élection ! Et pendant ce temps les mêmes torpillaient Mélenchon dans le Nord ! Là où il a fait une campagne d’une humanité et d’une puissance à tomber !
Bon. Concluons.
Pierre Laurent s’est déconsidéré. Son alliance avec le PS est insupportable. Il va défiler contre les retraites et va ensuite s’allier à ceux qui cassent les retraites ? Bonjour ! Qu’il fasse ça tout seul. Il est minable. De cette politique-là, on n’en veut plus c’est fini. Mais des postes seront perdus ? Et alors ?
Les temps changent. Ils sont violents . Il faut prendre tous les risques.
Je voudrais régler un point. On dit que le FDG ne progresse pas. Mais si le FDG n’avait pas l’image d’un parti qui ne sait pas ce qu’il veut, peut-être progresserait-il ! Si Mélenchon refusait d’être le porte-parole d’un communisme décadent , peut-être qu’il progresserait ! Amis communistes, les vrais, soutenez-le ! C’est en attaquant le PS que Mélenchon est passé à 11 %. On ne va pas nous dire qu’en leur léchant les bottes ça va donner le même résultat !
Pour que le FDG progresse il faut :
- qu’il ne laisse jamais sur aucun media les « journalistes » parler du PS en disant « la gauche ». Il faut s’y opposer formellement. Ils sont de droite. Mais il ne faut pas le dire une fois. Il faut le dire à chaque fois, sans cesse.
-Il faut refuser la moindre alliance au premier et au second tour avec des socialistes ou des EELV ou des n’importe quoi qui ne se déclarent pas clairement opposés et outrés du jeu libéral des fauxcialistes.
-Il faut arrêter de se faire peur en disant : « La droite passera. » La droite est passée. La pire droite qu’on n’ait jamais vue. La plus dangereuse. La plus soumise au pouvoir de l’UE. Je ne vois pas ce que Le Pen pourrait faire de plus, entre parenthèses…Non, elle ne mettra pas les gens dans des cars et dans des trains car ça coute cher de déplacer les gens et que les libéraux qui la marionnettisent , elle et l’UMPSFN, préfèrent laisser les gens mourir sur place. Economie. Et ça on est en plein dedans. La droite est au pouvoir ! Elle a le visage de Hollande, de Moscovici, de Fabius et de Valls ! Et ceux qui votent pour eux ne valent pas mieux !
-Il faut demander clairement une sortie de l’UE. Nous sommes victimes de malfrats. Toute l’Europe doit engager une action en justice contre TOUTES les décisions qui ont été prises par leurs troïkas mises en place par la finance. Nous sommes dans l’illégalité absolue. Dites-le M. Mélenchon, prenez contact avec tous les partis anti-libéraux d’Europe ! Lancez cette campagne !
Non, M. Mélenchon, si vous êtes élu, vous n’irez pas voir Merkel pour discuter avec elle. On n’a jamais vu un président de la république rendre visite à une employée de banque. Nous avons été enferrés dans cette UE par un abus de Sarkozy qui doit être jugé pour cela. Haute trahison. Entente avec l’ennemi.
-Il faut parler de notre nation. Oui, nous aimons la France. Ce n’est pas un sujet que pour Blondie. Nous voulons le meilleur pour notre pays afin qu’il aide les autres. Mais il faudrait peut-être commencer à le sortir du désastre dans lequel il coule !
-Il faut créer une seconde monnaie qui viendrait, pour les plus démunis , en complément de leurs salaires en euro. Cette monnaie développerait le commerce local. Elle n’aurait que cette vocation. Elle serait en dehors de tout boursicotage. Les 1700 euros, qui représentent en effet un minimum vital, pourrait être en partie atteints par ces nouveaux francs. On pourrait offrir aux touristes entrant en France mille francs qui ne pourraient être dépensés que dans des commerces locaux. Toute notre industrie touristique gagnerait mille fois plus que la mise.
-Il faut, quand vous parlez d’écosocialisme, ne pas perdre une occasion d’évoquer le drame absolu de Fukushima. Il faut appeler les nations à s’unir ! Souligner l’inconscience assassine des pouvoirs en place qui veulent poursuivre l’exploitation de l’atome pour des raisons militaires. ( Ignorez les PC pro-atome. Adoptez la seule ligne qui s’impose, comme vous le faites souvent : celle des nouvelles énergies.)
Je crois, cher Jean-Luc, que c’est à vous de faire « un coup d’Etat » au FDG. Ils ont raté le leur. Ne ratez pas le vôtre. Que ceux qui veulent bosser avec le PS s’inscrivent avec le PS. Qu’ils cessent de faire du FDG un rassemblement dont on rit. Notre époque a besoin d’engagements sans ombres. Et de perdre, peut-être, pour pouvoir gagner.
Avec vous et tous ceux qui veulent une alliance anti-UE et anti-libérale.
« Sabre au clair, général Mélenchon ! »
(Le titre d’un de mes anciens articles quand nous étions tous, unis, dans le bonheur de ce cri : « Nous nous sommes retrouvés ! » )