INTERNATIONAL - Alors que son ministre des Affaires étrangères rencontre ce jeudi 17 avril ses homologues ukrainien, américain et européen, Vladimir Poutine se livre de son coté à sa séance annuelle de questions-réponses avec des citoyens pendant plusieurs heures.

Cet exercice de communication bien réglé offre au président l'occasion d'aborder des sujets divers et variés tout en cultivant son image auprès de la population. Une image bien éloignée de celle véhiculée dans les médias occidentaux où le dirigeant apparaît souvent comme une brute autoritaire et froide.

L'occasion de se pencher sur cette autre perception de Poutine qu'ont les Russes (où il enregistre une cote de popularité exceptionnelle qui ferait pâlir Hollande ou Obama), un regard bien différent de celui des occidentaux dont la France où il récoltait récemment près de 85% de mauvaises opinions.

L'homme qui a sauvé la Russie

Si en Occident Poutine est parfois dépeint comme un dictateur, il est avant tout vu en Russie comme celui qui a su relever le pays après le chaos des années 90, à la suite de la chute de l'URSS. "Il a participé à la stabilisation du pays, c'est tout à fait vrai", confirme au HuffPost Galia Ackerman, journaliste et historienne spécialiste de la Russie.

Il a aussi, sur le plan économique, permis au pays de trouver un nouveau souffle. "Le niveau de vie a fortement augmenté", concède Galia Ackerman qui souligne cependant que Poutine "en a profité pour améliorer davantage le niveau de vie des fonctionnaires et dans les secteurs proches de l'État comme la sécurité ou la justice."

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Poutine est par ailleurs perçu par le peuple comme celui qui a fait le ménage au sein du Kremlin. "Boris Eltsine s'était entouré d'oligarques qui pompaient le pays sans payer d'impôts", avait par exemple regretté auprès du Figaro Vladimir Barychov, un médecin russe, satisfait d'avoir vu l'actuel président s'attaquer à certaines connivences entre pouvoir et milliardaires à son arrivée en 2000.

La nostalgie du tsar à poigne

"Si les Russes sont si proches de Poutine, c'est aussi en grande partie grâce au matraquage propagandiste actuel", décrypte Galia Ackerman. Pour l'historienne, cette pratique a même atteint une ampleur que l'on "n'avait pas vue depuis l'époque stalinienne".

L'autre point fort de Vladimir Poutine est en effet son image. Moquée en France, la diffusion régulière de photos du président torse nu à cheval, torse nu à la pêche ou encore torse nu à la chasse fait son petit effet à l'Est.

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Les activités sportives de Vladimir Poutine
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Et les résultats de cette communication millimétrée sont là: "J'aime Poutine plus que ma vie", avait-on pu entendre lors d'une manifestation lors des élections présidentielles de 2012. "Nous avons la culture des dirigeants durs et autoritaires et Poutine rempli ces critères-là", explique au HuffPost Ekaterina Agafonova, journaliste russe.

"Avec ces photos, les gens ne voient que son côté guerrier, son côté tsar." Une apparence diffusée avec l'aide des médias russes, assure la jeune femme: "Quand on regarde le journal télévisé, on a toujours l'impression que Poutine est supérieur, qu'il sait prendre les bonnes décisions et qu'il est là pour nous protéger".

La Russie de nouveau sous les feux des projecteurs

Poutine joue donc les protecteurs sur les dangers intérieurs mais aussi sur les menaces extérieures. Le poids nouveau de Moscou dans les dossiers internationaux plaît effectivement beaucoup aux citoyens qui considèrent leur pays à nouveau élevé au rang de grande puissance.

D'une part grâce au dossier syrien qui a ravivé un semblant de guerre froide. En soutenant Bachar el-Assad coûte que coûte et en s'opposant à toute intervention dans le pays en guerre depuis mars 2011, Poutine est apparu en position de force face à la communauté internationale et plus particulièrement face aux États-Unis, au point de mériter, selon certains, un prix Nobel de la paix (voir la vidéo ci-dessous).

Ensuite avec l'Ukraine, en faisant fi des menaces de l'Union Européenne et en annexant la Crimée. Et même si la Russie a accepté de prendre part à la réunion de crise à Genève ce jeudi 17 avril, Poutine a d'ores et déjà annoncé ses intentions envers son voisin: il assurera "à tout prix" la sécurité des populations russophones de l'ex-URSS.

"La presse russe insiste sur la fermeté de Poutine et son isolement sur ces sujets pour renforcer l'impression d'un retour vers un monde bipolaire", estime Ekaterina Agafonova.

Une volonté de ne pas se soumettre à la pression internationale que les citoyens ont aussi retrouvé sur les questions de société, comme en amont des JO de Sotchi lorsque la loi contre "la propagande gay" a été votée et maintenue malgré les menaces de boycott, les lettres ouvertes et les manifestations. De quoi satisfaire les 88% de la population qui soutenaient la mesure, d'après un sondage.