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7 juillet 2014

A vomir…

 

RUSSEUROPE

 

A vomir…

6 juillet 2014
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Ainsi donc Michel Sapin, dont tout un chacun glose sur la proximité avec notre Président, François Hollande, a déclaré dans une intervention aux Rencontres économiques d’Aix-en- Provence ce dimanche 6 juillet 2014 : “Nous avons à répondre à une très belle question : « ‘Y a-t-il une finance heureuse, au service d’investissements heureux ?’ Je l’exprimerai autrement et vous verrez ma part de provocation. Notre amie c’est la finance : la bonne finance »[1].

La formule frappe, par ce qu’elle est à contre-pieds de celle du même François Hollande, alors simple candidat à l’élection présidentielle, qui, lors de son discours au Bourget, avait qualifié la finance « d’ennemie »[2]. Cette formule avait été d’ailleurs beaucoup commentée à l’époque, et François Hollande avait dû s’en défendre à Londres quelques jours plus tard…Mais, peu importe. Du « socialisme » en décomposition émane des odeurs pestilentielles qui provoquent l’écœurement. On ne pourra bientôt lire une déclaration d’un membre du gouvernement que muni, par précaution, d’un sac sanitaire, comme dans les avions. Mais, ici, il y a trois raisons bien précises.

  • (1)  Cette déclaration, tout comme celle du Bourget, ne fait pas de différence entre la « finance » et le processus de financiarisation de l’économie. Or, ce qui importe tout d’abord c’est bien un processus qui met l’ensemble des activités productives sous la coupe des puissances financières[3]. C’est ce processus qui engendre le basculement de notre économie vers un court-termisme chaque jour plus suicidaire et qui condamne en fait l’innovation réelle[4]. C’est ce processus qui engendre des monstruosités comme les fameux « licenciements boursiers ». Tout ceci est connu depuis maintenant plus de 20 ans. Ce processus s’articule et se combine avec la globalisation financière[5]. On peut considérer qu’il correspond à une négation de l’économie capitaliste tout comme à son achèvement[6].C’est ce processus qu’est venu couronner l’Euro, dont on ne dira jamais assez le rôle essentiel de pivot qu’il a dans l’extension de la financiarisation de la France et de l’Europe. Cette confusion entre « finance » et « financiarisation » est indigne de personnes ayant fait les études qui furent celles de Michel Sapin ou de François Hollande. On voit bien que le crétinisme communicationnel a remplacé la réflexion, voire le simple bon sens. Rien que cela est à vomir.
  • (2)  Mais, de plus, Michel Sapin, ministre du gouvernement français, fait cette déclaration alors que depuis deux ans le dit gouvernement, dont il est un membre éminent, se perd en palinodies et en compromissions sur la question de la réglementation des banques. Alors, oser parler de « bonne finance », quand on n’a rien fait, moins que les britanniques qui eux, au moins, se sont décidés à réglementer leurs banques[7], cela passe les bornes. On a envie de hurler « pas vous, pas ça ». On se souvient des vers de Victor Hugo dans Le Roi s’amuse que l’on pourrait, pensant à Jerôme Cahuzac et à quelques autres, intimes du Président, ainsi paraphraser[8] « vos Frères/ Sous les huées / A des banquiers / Se sont prostitués ». Ce sont ces Sapins, ces Cambadèlis, ces Hollande, qui viennent ensuite pleurer sur l’état de la France et du « socialisme » dont ils ont été les principaux artisans du malheur. Que dire, si ce n’est par la bouche grand Hugo « quand on n’a plus d’honneur Sire, on n’a plus de famille ». Encore une fois, on a envie de vomir.
  • (3)  Mais il y a pire. François Hollande, Président de la République, se renie publiquement[9]. Soit. Mais qu’il le fasse par sa bouche. Qu’il ne passe pas par un intermédiaire dont il pourrait, au cas ou la déclaration ferait trop de fracas, renier les propos. Il y a là une astuce qui n’est autre qu’une bassesse. Là où l’on prétend faire preuve d’habileté, il n’y a qu’une immense lâcheté. C’est, encore une fois, à vomir.

Alors, que le Président et ses ministres ne s’étonnent pas du discrédit qui les frappe. Qu’il ne s’étonne pas d’avoir perdu le peu de légitimité qui leur restait. Qu’il ne s’étonne pas si des vents mauvais se lèvent sur la France. Ils en portent l’entière et totale responsabilité.


[3] Roubini, Nouriel et Stephen MIHM. Économie de crise. Une introduction à la finance du

futur, Jc Lattès, 2010, 462 p

[4] Stiglitz J., Le prix de l’inégalité, Paris, Les Liens qui Libèrent, 2012

[5] Sapir J., La démondialisation, Le Seuil, Paris, 2011.

[8] La citation exacte étant : « vos mères/ Sous les huées / A des laquais / Se sont prostituées »


Ses travaux de chercheur se sont orientés dans trois dimensions, l’étude de l’économie russe et de la transition, l’analyse des crises financières et des recherches théoriques sur les institutions économiques et les interactions entre les comportements individuels. Il a poursuivi ses recherches à partir de 2000 sur les interactions entre les régimes de change, la structuration des systèmes financiers et les instabilités macroéconomiques. Depuis 2007 il s'est impliqué dans l’analyse de la crise financière actuelle, et en particulier dans la crise de la zone Euro.

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