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10 octobre 2014

DONBASS - Alexandre Zakhartchenko : « Cette guerre est pire que la guerre civile de 1917, car nous nous battons contre les nôtre

 LE COURRIER DE RUSSIE

 Alexandre Zakhartchenko : « Cette guerre est pire que la guerre civile de 1917, car nous nous battons contre les nôtres »

Le 2 novembre, la république populaire de Donetsk (RPD) doit se choisir un parlement et un président. Selon toute probabilité, l’élection présidentielle sera remportée par l’actuel commandant en chef et Premier ministre de la république autoproclamée : Alexandre Zakhartchenko. Avant la guerre, Zakhartchenko était électricien dans une mine de Donetsk. La correspondante de la revue Rousskiï Reporter Marina Akhmedova a interviewé le chef de guerre. Le Courrier de Russie traduit les fragments les plus marquants de leur entretien.

Alexandre Zakhartchenko lors d'une cérémonie en hommage aux soldats de Donetsk qui ont péri durant la Seconde Guerre mondiale, le 8 septembre, à Donetsk. Crédits: Marko Djurica, Reuters

Alexandre Zakhartchenko lors d’une cérémonie en hommage aux soldats de Donetsk qui ont péri durant la Seconde Guerre mondiale, le 8 septembre, à Donetsk. Crédits: Marko Djurica, Reuters

Nous étions prêts à affronter la mort

Vous me demandez si j’ai un rêve. J’en ai un. Vous le trouverez peut-être idiot, mais j’aimerais que les gens du Donbass vivent mieux qu’en Pologne. Parce que notre pays est unique, il regorge de ressources naturelles.

Mon père était mineur, il a travaillé trente ans dans les mines. Je me souviendrai toujours de la première fois où j’y suis descendu, je n’avais pas peur, je voulais juste voir comment c’était en réalité. Vous savez, nous, les mineurs, nous avons un rapport très particulier à la mort. Nous n’oublions jamais qu’en descendant dans la mine, nous pouvons ne jamais remonter. La mort n’est jamais très loin, nous en avons conscience – mais cette conscience nous rend plus forts.

Vous savez pourquoi ils ont réussi à faire plier Kharkov et Odessa, mais pas nous ? Pour Odessa, ce qui lui est arrivé a été un énorme choc. Et la ville est toujours sous l’effet de ce choc. Odessa s’est figée. [Le 2 mai, une quarantaine d’habitants d’Odessa ont péri dans un incendie à la Maison des syndicats, ndlr]. Mais nous, nous étions prêts à affronter la mort. Ce qui nous est arrivé nous a seulement incités à nous révolter.

Vous savez comment ça meurt, un mineur ? Il y a deux types de mort : soit tu brûles vif, soit tu es lentement écrasé par la matière, tu t’asphyxies, tu agonises des jours durant, en subissant une très forte pression. Et tu sais que tu ne seras pas secouru, que le temps de creuser le tunnel pour venir te sauver, tu seras mort de toute façon.

Il n’y a que les idiots qui n’ont pas peur de la mort, et je ne suis pas un idiot. Mais s’il faut mourir pour atteindre notre but, je mourrai. Le prix de la cause pour laquelle nous nous battons est largement supérieur à celui de nos vies.

Quand j’avais huit ans, une voiture a écrasé mon chien, et j’ai pleuré. Je voulais tuer le chauffeur, et je me suis vengé de lui, je lui ai crevé ses pneus. Adulte, j’ai vu une petite fille mourir sous mes yeux. Je n’ai pas pleuré mais j’ai ressenti une envie… j’essaye de la combattre. J’ai eu envie que les autres éprouvent ce que nous éprouvons nous, ici.

On a fait des fiers Slaves que nous étions des esclaves !

J’irais bien à Varsovie – j’ai des comptes à régler avec les Polonais. J’aimerais avoir Lviv au bout de ma longue-vue… J’ai un régiment de Lviv qui se bat ici, des anciens Berkout [ex-forces spéciales de la police ukrainienne], ils veulent tous aller voir comment ça se passe dans leur ville natale.

Sous l’URSS, nous étions fiers, nous regardions le monde droit dans les yeux. Nous ne nous sentions ni humiliés, ni abattus. Et puis, on nous a changé notre mentalité. On a fait des fiers Slaves que nous étions des esclaves !

La première fois que je me suis senti esclave, c’est quand j’ai échoué à faire traduire en justice un homme qui, sous mes yeux, avait écrasé un passant en voiture. Je suis passé par toutes les instances, mais je n’ai rien pu faire. Il a été relaxé. C’est là que j’ai compris que, pour ce système, je n’étais rien de plus qu’un esclave.

Souvent, les Russes pensent que nous ne sommes qu’un tas de malheureux, que nous avons pris les armes pour oublier la faim et la misère. Mais le Donbass est en réalité l’une des régions les plus riches d’Ukraine – que Dieu permette à toutes les régions russes de vivre aussi bien que le Donbass vivait en Ukraine. Nous étions plus riches et plus heureux que beaucoup de Russes en Russie.

La deuxième fois que je me suis senti esclave, c’est quand j’ai vu à la télévision les manifestations sur la place Maïdan à Kiev. Et pour refuser cet esclavage, j’ai pris ma pelle, et j’ai déterré mon automatique de sous mes plates-bandes. Là-dessous, j’avais aussi deux pistolets, une boîte de grenades et un fusil. Pourquoi je les conservais ? Je vous répondrai comme un vrai Ukrainien : « Au cas où ».

Je suis russe par ma mère et ukrainien par mon père. Mais ma mère russe a vécu toute sa vie en Ukraine et mon père ukrainien, toute sa vie en Russie… Et je suis quoi, moi, alors ?

Je pense que les Slaves – les Russes, les Biélorusses et les Ukrainiens – doivent vivre ensemble. Mais vivre ensemble, ça ne veut pas toujours dire être égaux, alors de deux maux, nous devons choisir le moindre. C’est ce que je fais en ce moment – je tue les fascistes et les nazis, les radicaux, appelez-les comme vous voudrez.

Nous devons suivre notre propre voie – qu’elle soit bonne ou mauvaise

J’estime que nous n’avons rien à faire ni dans l’Union douanière, ni en Europe. Nous devons suivre notre propre voie – qu’elle soit bonne ou mauvaise. Être esclave en Europe, c’est honteux et humiliant. Être un peuple rattaché à la Russie… il vaut mieux que nous fassions en sorte d’être égaux avec les Russes.

Vous savez, je suis un combattant. Imaginez que vous avez en face de vous un soldat… Il a sa vérité, et j’ai la mienne – mais si je ne tire pas, c’est lui qui me visera. Il y a des séparations par le territoire, par les opinions, et aussi par le sang. Ce soldat et moi, nous sommes séparés par le sang.

Les Européens pensent effectivement que nous sommes des barbares, mais c’est une image qu’on leur a imposée. Je suis le petit-fils de mon grand-père et l’arrière-petit-fils de mon arrière-grand-père. Je conserve leurs médailles, je les regarde – et je me dis que si mes grands-pères ont tout surmonté, je peux le faire aussi. Et quand j’arriverai parmi eux, je n’aurai pas honte de porter leur nom. Parmi eux, je ne serai pas un enfant, mais un homme.

C’est moi qui ai eu l’idée du défilé des prisonniers [Le 24 août, les insurgés ont contraint plusieurs dizaines de prisonniers ukrainiens à marcher dans le centre de Donetsk, ndlr]. Je ne le regrette pas. J’étais là, j’observais, je ressentais de la pitié – non pour les prisonniers, mais pour ceux qui les avaient envoyés ici. J’avais près de moi un homme dont les deux fils ont été tués. Et puis une mère, dont le fils a été étranglé. Ce défilé a bouleversé les gens, et particulièrement ceux qui envoient leurs fils au Donbass. Je suis haï, je le sais. À ce défilé, j’étais le plus malheureux de toute la foule. J’ai beaucoup bu après. Mais dites-vous bien que ce défilé est parvenu à faire changer la perception de ce qui se passe chez nous. Après ça, les gens ont compris que ce n’était pas une « opération antiterroriste ». Que c’est bien une guerre.

Cette guerre est pire que la guerre civile de 1917, car nous nous battons contre les nôtres. Beaucoup de nos voisins ne partagent pas nos convictions et se battent dans l’autre camp, la plupart des militaires de l’autre côté des barricades sont originaires du Donbass, et ils planifient des bombardements sur leurs propres positions afin de nous exterminer – quitte à y perdre la vie. Nous faisons pareil. Je veux que tout ça cesse. Je veux que la paix revienne.

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3 thoughts on “Alexandre Zakhartchenko : « Cette guerre est pire que la guerre civile de 1917, car nous nous battons contre les nôtres »

GUNSBOURG Vendredi 10 octobre 2014 à 12:59

C’est une guerre voulue par de grands argentiers américains (Soros par ex) , soutenue par une UE obligée par chantage parce qu’ aux abois financièrement. Alexandre Zakhartchenko et son entourage sont héroïques de se battre contre l’esclavage qui les attend ; il doit être rappeler aussi qu’ils se battent d’abord contre des truands héritiers des SS, des mercenaires, des Polonais, des Lituaniens aidés par des organismes américains sans honneur , avant de se battre contre des Ukrainiens fascinés par la richesse imaginée de l’UE dans laquelle ils formeront une main-doeuvre à « bas coût » . Cette UE fabuleuse si bien décrite par madame Victoria Nuland, plénipotentiaire étatsunienne,par son expression Historique : « FUCK THE EU » : c’est celle là que ces Ukrainiens perdus veulent rejoindre par la grâce de leur Président Gauleiter POROCHENKO milliardaire redevable aux premiers cités

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