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23 décembre 2014

Vladimir Fédorovski : «La chute de Poutine n'est qu'un fantasme»

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 Vladimir Fédorovski : «La chute de Poutine n'est qu'un fantasme»

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Par Mis à jour le 18/12/2014 à 18:17
Publié le 18/12/2014 à 18:16

 

FIGAROVOX/ENTRETIEN - Après un début de semaine chaotique, le président russe est intervenu jeudi pour rassurer ses concitoyens, ainsi que les marchés internationaux. Pour Vladimir Fédorovski, ce dernier pourrait encore sortir renforcé de la crise.


Vladimir Fédorovski est un écrivain russe d'origine ukrainienne, actuellement le plus édité en France. Diplomate, il a joué un rôle actif dans la chute du communisme, il fut promoteur de la perestroika puis porte-parole d'un des premiers partis démocratiques russes. Il a écrit de nombreux ouvrages sur la Russie mythique, et dernièrement un essai sur Poutine intitulé Poutine, l'itinéraire secret, (Editions du Rocher, 2014). Son dernier livre «la Magie de Moscou» vient de paraître aux éditions du Rocher.


FigaroVox: Vladimir Poutine s'est exprimé jeudi, après la chute spectaculaire du rouble cette semaine. Que faut-il retenir du discours du président russe?

Vladimir FEDOROVSKI: Le discours du président russe était un véritable numéro d'équilibriste, une psychothérapie collective destinée à la fois au peuple russe, aux milieux financiers internationaux et au marché intérieur. Il a assumé ses erreurs, et a déclaré qu'il se donnait deux ans pour améliorer la situation. Le rouble a d'ailleurs d'ores et déjà commencé à retrouver des couleurs, après l'intervention de la banque centrale, et, surtout, du gouvernement.

Celui-ci peut-il suffire à rassurer les russes et les marchés?

On constate également, dans cette intervention, une nouvelle tonalité, plus modérée, plus conviviale et ouverte au dialogue avec l'Occident.

Chacun a pu être rassuré par son intervention, durant laquelle il multipliait les adresses aux uns et aux autres. A court terme, son numéro d'équilibriste semble porter ses fruits.

Son discours était tout particulièrement adressé à ses concitoyens qui souffrent de la crise. Vladimir Poutine a assumé les défauts de sa politique, et a promis des améliorations dans les deux ans à venir.

On constate également, dans cette intervention, une nouvelle tonalité, plus modérée, plus conviviale et ouverte au dialogue avec l'Occident. Celle-ci était déjà sensible lors de la visite surprise de François Hollande à Moscou. Vladimir Poutine cherche visiblement à calmer le jeu, notamment vis-à-vis de l'Europe, ce qui devrait contribuer à rassurer les marchés internationaux.

Cette chute du rouble révèle-t-elle finalement les fragilités de la Russie et de son dirigeant? Poutine est-il un colosse aux pieds d'argile?

Les analystes occidentaux prennent leurs désirs pour des réalités. En d'autres termes, ils aimeraient que cette crise cause la chute de Poutine ; or, il n'en est rien. Pour l'instant, on ne trouve aucune indication sur une quelconque baisse de popularité du président russe.

La Russie n'a pas suffisamment utilisé l'argent du pétrole ou du gaz pour améliorer son outil de production et mener une politique industrielle intelligente.

Vladimir Poutine, on l'a vu, a cherché à concilier les contraires, à trouver une posture médiane, capable de rassurer tous les bords: dans l'entourage du président, certains souhaitent la rupture avec l'Occident, et pensent que les sanctions européennes sont l'occasion idéale pour une réorientation vers la Chine, l'Asie ; à l'inverse, d'autres souhaitent que la Russie se réconcilie avec l'Union européenne. Poutine doit conjuguer ces aspirations contraires, et, jusqu'ici, y arrive particulièrement bien.

De plus, le président russe reste apprécié par une population, qui, en temps de crise, développe historiquement un réflexe nationaliste. On retrouve ici la mentalité russe de la citadelle assiégée: acculés, les citoyens se sentent victimes d'un complot occidental, et font bloc derrière leur chef. Paradoxalement, la crise actuelle, loin de fragiliser Poutine, le renforce donc.

Alors qu'il semblait en mesure de gagner la guerre diplomatique, Vladimir Poutine est-il en train de perdre la guerre économique?

La notion de guerre économique est loin d'être évidente. D'abord, le président russe a assumé ses erreurs, et a notamment déclaré que la crise actuelle était la conséquence, en grande partie, du retard de l'économie nationale. En d'autres termes, la Russie n'a pas suffisamment utilisé l'argent du pétrole ou du gaz pour améliorer son outil de production et mener une politique industrielle intelligente. Elle n'a pas transformé son économie, et a pris, ce faisant, un retard considérable vis-à-vis des pays de l'ouest. C'est ainsi que certains, dans l'entourage de Poutine, voient les sanctions européennes comme une chance pour la Russie, qui, isolée, sera obligée de réformer son économie pour produire les biens qu'elle avait jusqu'ici l'habitude d'importer.

Quel rôle ont joué les sanctions européennes dans cette crise économique?

Pris dans la tempête, Vladimir Poutine cherche à atterrir en évitant au maximum les turbulences.

Poutine estime que les sanctions ont contribué, à hauteur d'un quart, à la crise actuelle. En réalité, celle-ci est surtout due à la jonction de facteurs dont nous avons parlé, et notamment au retard de l'économie russe dans la mondialisation. Poutine souhaite donc désormais réformer le système de production, grâce à l'argent du pétrole et du gaz: c'est son principal défi pour les années à venir.

On peut toutefois dire que les sanctions ont été contreproductives, sur le plan géopolitique. Elles pourraient pousser la Russie à conclure une alliance avec la Chine militaire. Elles renforcent également les forces anti-occidentales du pays.

Quelle est, selon vous, la part de responsabilité des Etats-Unis dans la chute du rouble?

Chacun sait que les Etats-Unis, l'Arabie Saoudite et l'Europe ont déjà utilisé une tactique similaire pour causer la chute de l'Union soviétique.

Poutine aurait pu, lors de son intervention, accentuer ce point, et jouer sur la fibre patriotique, en blâmant les pays étrangers. Fort heureusement, il a préféré tenir un discours plus mesuré, tout en lançant quelques piques à l'Occident. Son but, désormais, est de recréer un climat d'entente, et non de mettre le feu aux poudres. Pris dans la tempête, il cherche à atterrir en évitant au maximum les turbulences.

Ces difficultés économiques peuvent-elles infléchir la politique de Vladimir Poutine?

Dans son discours, le président russe a mis l'accent sur l'idée de l'autonomie, de l'autosuffisance: il souhaite, implicitement, une Russie indépendante, notamment vis-à-vis de l'Occident. Il préfèrerait mettre en place un nouveau pôle avec la Chine et l'Inde.

Poutine reste un personnage incontournable de la vie politique russe, et sa chute n'est, à mon sens, qu'un fantasme. Les Russes restent soudés, regroupés derrière leur chef, tout particulièrement lors des épreuves difficiles.

La principale question est celle du délai: le président russe pourra-t-il tenir ses engagements? Va-t-il réussir à transformer l'économie nationale? Il a d'ores et déjà demandé aux russes des efforts supplémentaires pour améliorer le pays.

Sa chute, finalement, est-elle aujourd'hui imaginable?

Absolument pas. Poutine reste un personnage incontournable de la vie politique russe, et sa chute n'est, à mon sens, qu'un fantasme.

Les Russes restent soudés, regroupés derrière leur chef, tout particulièrement lors des épreuves difficiles. Ils ont survécu malgré les 25 millions de morts du communisme, et les 26 millions de victimes du nazisme. Ils ont su résister aux 1800% d'inflation de 1992, qui paralysaient le pays. Ils savent endurer la souffrance, et n'ont pas peur des difficultés.

Cette mentalité est parfois difficile à comprendre pour un occidental. Une anecdote est, à mon sens, révélatrice: je regardais, en compagnie d'un ambassadeur américain chevronné, une discours de Barack Obama, dans lequel le président américain se félicitait d'avoir isolé les russes. L'ambassadeur déclara alors qu'il aurait mieux valu isoler Poutine, et qu'Obama était un néophyte. Je lui répondis que le président devrait relire Tolstoï ; et lui me lâcha: «Non: il faut qu'il lise Tolstoï».

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98 commentaires

  • Ah, Fédorovski ! Notre agent d'ambiance préféré...

  • C'est drôle ce vieux fantasme russe... La Russie CONTRE l'occident, l'orient, le Sud...

    M. Fédérovski en est resté à la Russie des Tsars, pays de conquêtes (Sibérie, Pays Baltes, Pologne, Ukraine, Caucase...)

    Il n'a pas compris que la Russie EST dans l'occident.

    Sinon, la Russie "rétrécira" coincée entre l'Europe et la Chine.

  • "- Pour Vladimir Fédorovski, ce dernier pourrait encore sortir renforcé de la crise."

    - Oui ... il pourrait , mais simplement pourrait .....! RIEN N'EST SÛR !

  • Federovsky résume bien la logique bizarre de Poutine : "la Russie est en crise économique, car son économie est trop dépendante du pétrole, donc elle doit faire... une alliance militaire avec la Chine !!".
    On imagine l'hilarité si la France avait envisagé, pour sortir de la crise des subprimes en 2008, une alliance militaire avec l'Australie ou le Brésil !
    Mais cela correspond bien à l'esprit de Poutine, qui n'envisage les rapports entre les Etats que comme des rapports de force, comme une guerre permanente.
    Federovsky sait-il que la Russie est peu de choses par rapport à la Chine : le 5ème de son PIB (et le 9ème de celui des USA) ?
    Sait-il que l'Inde, l'Italie, le Brésil vont dépasser la Russie en 2015 et que cette "grande Russie" ne sera plus, l'année prochaine, que le 12ème pays au monde en PIB...
    Pour les USA la Chine est un partenaire, peut-être un rival dans le futur. Mais Chinois comme Américains savent bien que le commerce leur est profitable, tandis que des menaces de guerres sont toujours ruineuses.
    Comme Poutine, Federovsky semble jouer à "Risk" (un jeu de stratégie où tous les pays du monde sont en guerre), mais il ne comprend pas que ce jeu ne correspond pas à la réalité du monde du XXIème siècle.

  • Selon Federovsky, quoi que fasse Poutine, l'Occident doit lui sourire, de peur de le vexer. S'il envoie ses troupes à Kiev, bombarde Varsovie et envahit Riga, il faudra sans doute le remercier...
    Mais je rappelle que le budget de l'Etat russe a été bâti sur un baril de pétrole à 100$, et il est à 55$. Et qu'on ne transforme pas une économie de rente comme celle de la Russie en quelques années, surtout en l'absence d'Etat de droit , et dans un des pays les plus corrompu au monde. Poutine a ruiné lui-même son pays, et il n'y a pas de "complot de l'Occident contre la Russie".
    Il était inévitable que les prix du pétrole finissent par baisser ("les arbres ne montent pas au ciel"), ce qui est bénéfique pour la Chine (et l'Inde), à l'économie bien plus diversifiée, et une catastrophe pour la Russie, qui est un "émirat pétrolier, sans les palmiers".

  • la Russie est 1 immense pays , aux richesses colossales.1 peuple très fort , qui maitrise toutes les technologies . 1 très grande puissance nucléaire militaire , plus puissante que les USA . Et qui a beaucoup d'alliés, y compris en Europe . Personne fera reculer les russes .

  • Federovsky est devenu pro-Poutine mais il reprend trop facilement les thèses Poutiniennes qui ne reflètent pas la réalité.
    1- après 15 ans de pouvoir, où il n'a jamais modifié cette économie de rente pétrolière, il ne le fera pas maintenant. D'autant plus que cette rente pétrolière lui est indispensable pour lui et ses amis du KGB.
    2- l'alliance avec la Chine et l'Inde (!) est un pur fantasme "eurasiatique" : les Chinois veulent bien évidemment acheter gaz et pétrole russe, mais ils ne veulent certanement pas entrer en conflit avec les USA. Leur premier objectif est le développement, tout comme pour l'Inde. D'ailleurs la Chine a refusé séchement de faire partie d el'Union eurasiatique en 2013, et ne s'est pas opposée à la condamnation de l'annexion de la Crimée à l'ONU.
    3- D'une manière générale, Poutine pense que tous les pays sont en conflits permanents, et que le commerce est un jeu à somme nulle, donc inutile pour la Russie. Il ne comprends pas le monde moderne, et reste ancré dans son éducation marxiste. Tout le contraire des dirigeants Chinois.

  • L'Ours russe a pris un coup de pied dans les tibias et les rodomontades des poutinolâtres plumitifs stipendiés ou non n'y changeront rien. Ce n'est pas dénigrant les journalistes qu'ils modifieront la réalité.

  • Oui, les russes restent soudés derrière Poutine car c'est un vrai président qui défend des valeurs que de nombreuses démocraties occidentales abandonnent ou ont déjà abandonné comme c'est le cas pour la France.
    Je me souviendrai tout le restant de ma vie (87 ans) de mon voyage à Moscou et Leningrad les 6,7 et 8 mai 1975 (30ème anniversaire de la victoire de 1945).
    Quelle tristesse dans les yeux de ces russes excepté une armée qui défilait avec fierté et qui, à l'époque aurait mis 3 jours pour arriver à Brest ou au Havre.
    De pauvres malheureux qui priaient sur les marches d'une église fermée.
    Un pauvre paysanne qui tentait de vendre trois salades au coin d'une rue et des femmes cantonnières réparant des trous dans une rue !!
    Je pense que je retrouverais une autre vision de la Russie à l'heure actuelle si d'aventure je m'avisais de revoir ce grand pays !!

  • Il ne serait pas bon pour l'Europe non plus que la Russie s'effondre car c'est un pays avec qui le commerce extérieur travaille bien; les producteurs français le sentent bien dans leurs finances que l'embargo est là !

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