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5 janvier 2015

USA vs RUSSIE - le prix du pétrole est redevenu une arme géopolitique

En dehors de considérations - amusantes - sur les "amateurs de complot géostratégique", cet article de mediapart a le mérite, sur quelques paragraphes,  de reconnaitre certains enjeux et objectifs géostratégiques. Il a le  mérite d'une certaine objectivité sur la question de l'affrontement Washington/Moscou. .. mais aussi de la posture et de la position dans laquelle est maintenue  l'"Europe"  (citation: "les Européens, une fois de plus, ne sont même pas conviés à la table de jeu")

NB -  Est-il si courant de convier les " toutous" à la table de jeu?..

 

Sur MEDIAPART

L'extrait de l'article "Pourquoi le prix du pétrole est redevenu une arme géopolitique" ,

|  Par Philippe Riès


..."La Russie dans le collimateur de Washington

Mais amener Téhéran à résipiscence est sans doute désormais moins crucial que déstabiliser une Russie poutinienne dont le jeu géostratégique est devenu pour le pouvoir américain bien plus qu’une nuisance. « La Russie apparaît comme le principal obstacle à leurs menées politiques », observe Kenneth Courtis. L’opposition de Moscou à la stratégie, à vrai dire incohérente, de l’administration Obama en Syrie est désormais presque anecdotique. Coopération sans cesse renforcée avec la Chine, y compris dans le domaine de l’énergie, nouvelles ouvertures nucléaires en direction de l’Inde, complicité active avec l’Iran (notamment pour aider ce pays à contourner l’embargo pétrolier occidental), et enfin, situation de guerre plus vraiment « froide » en Ukraine : cela fait beaucoup vu de Washington où le retour de la confrontation avec le Kremlin semble avoir redonné audience à certaines voix néo-conservatrices au département d’État et même à la Maison-Blanche.

« Les Américains lucides savent que c’est bien davantage la baisse continue du prix du pétrole à partir de 1979 que la stratégie offensive de Ronald Reagan qui a mis à genoux une Union soviétique rendue incapable de se refinancer », rappelle Kenneth Courtis. La question est de savoir si l’approche « énergétique » peut donner les mêmes résultats avec la Russie poutinienne qu’avec l’URSS brejnévienne, et dans quels délais.

Calculée en rouble dévalué, la chute des prix du brut n’est pas aussi dramatique qu’en dollar réévalué. « Le baril en rouble vaut plus cher qu’il y a un an », relève Kenneth Courtis. D’autre part, poursuit-il, les sanctions des États-Unis et de leurs alliés européens ainsi que les mesures de représailles décidées par le Kremlin conduisent la machine économique russe à modifier ses sources d’approvisionnement. Auprès de pays qui, le « hasard » faisant bien les choses, ont aussi connu des dévaluations parfois même supérieures à celles de la Russie. « Les entreprises japonaises ne demandent qu’à se substituer à leurs concurrentes allemandes pour les biens d’équipement, explique-t-il. Le Brésil, la Turquie, et demain peut-être la Thaïlande, prennent des parts de marché agricoles aux Européens. »

Beaucoup plus nocives, les sanctions financières « furtives »,qui ont pratiquement coupé l’accès de la Russie, et spécialement de son système bancaire, aux marchés de capitaux internationaux. « En marge des réunions annuelles du FMI et de la Banque mondiale à Washington, nous avons interrogé 36 des principaux groupes bancaires mondiaux. Plus aucun n’accepte de prêter aux Russes, confie Courtis. La peur du gendarme. » L’amende de près de 9 milliards de dollars infligée à BNP Paribas par les autorités américaines a laissé des traces profondes.

Ce qui veut dire que les entreprises russes faisant face à des échéances de remboursement en dollar doivent se tourner vers l’État. La journée noire du 16 décembre 2014, qui a vu le rouble chuter de 50 à 80 pour un dollar, les banques russes avaient dû émettre pour 16 milliards d’obligations en dollars pour en prêter une douzaine au géant pétrolier public Rosneft, la Banque centrale du pays s’étant révélée être le seul acheteur. « Les Chinois sont prêts à aider la Russie mais ils ne peuvent se substituer aux marchés mondiaux de capitaux », explique Courtis.

À la fin 2013 (voir graphique), la dette extérieure russe dépassait les 600 milliards de dollars, soit plus que les réserves de la Banque centrale, estimées à quelque 400 milliards. La Russie peut-elle endurer une crise qui durerait encore deux ans, comme l’affirme Vladimir Poutine ? Une part majoritaire de la dette, celle des entreprises privées et étatiques non financières, est adossée à des actifs relativement liquides, qui vont du pétrole et du gaz aux diamants en passant par toute la gamme des métaux non ferreux. Des transactions récentes, par exemple concernant l’aluminium sur le London Metal Exchange, démontrent que les vendeurs russes peuvent obtenir des dollars, même s’il leur faut pour cela sacrifier leurs bénéfices.

La dette extérieure russe par catégories
La dette extérieure russe par catégories © Starfort Holdings

La dette des banques d’État russes, à quelque 120 milliards, ne représentait que 20 % du total. « Ce n’est pas mortel », commente Kenneth Courtis. Pour le moment, la Banque centrale peut faire face. Elle vient d’annoncer la recapitalisation de VTB, la deuxième banque publique, pour 1,4 milliard d’euros. En face, il faut mettre en balance l’exposition des banques étrangères, c’est-à-dire pour l’essentiel européennes, à la Russie, estimée à 170 milliards de dollars.

Autrement dit, sur les plans économiques et financiers, ce sont clairement les Européens qui payent la facture et assument le risque de la confrontation entre Washington et Moscou. Jusqu’à quel point et pour combien de temps ? "...

 

L'équilibre structurel modifié du marché pétrolier mondial

C’est ici que le facteur temps doit être pris en compte dans l’équation. Autrement dit, la chute des cours du brut est-elle un accident de parcours ou au contraire un phénomène durable, imposé par des facteurs structurels que les différents acteurs ont plus ou moins bien anticipé pour en tirer avantage ?

Selon Anatole Kaletsky, le « kal » de Gavekal, « le prix du pétrole va rester déprimé au moins pour toute l’année 2015, jusqu’à ce que les Saoudiens soient convaincus d’avoir fait suffisamment mal à leurs concurrents géopolitiques et économiques pour regagner leur pouvoir de fixer les prix. La grande question est maintenant de savoir si un prix autour de 50 dollars le baril, soit encore 10 à 15 % inférieur au niveau actuel, sera le plancher de la fourchette pour les années à venir, comme ce fut le cas entre 2005 et 2014, ou si 50 dollars s’installe comme le plafond d’une nouvelle fourchette basse, qui prévalait de 1986 à 2004 ».

Un élément essentiel est la modification structurelle du marché provoquée par la « révolution de l’huile de schiste » venue des États-Unis. Non seulement, elle contribue à l’excédent durable de l’offre sur une demande mondiale déprimée mais à une redistribution des rôles. Il est vrai que les coûts de production dans les plaines du Dakota sont très supérieurs à ceux du désert de la péninsule arabique, mais les investissements sont relativement modestes par rapport à l’exploration/production traditionnelle et l’extraction elle-même, bien plus flexible.

« Dans l’avenir, explique Anatole Kaletsky, les producteurs d’équilibre (swing producers) qui assurent l’équilibre global entre l’offre et la demande de pétrole seront les producteurs américains de pétrole de schiste plutôt que les responsables saoudiens. S’il y a une rationalité économique derrière l’action récente des Saoudiens, c’est bien de garantir que les producteurs à bas coûts de l’OPEP puissent pomper à pleine capacité, les producteurs américains réduisant leur production quand les prix sont bas pour la doper quand ils remontent. C’est pourquoi, sur le marché pétrolier du futur, le coût de production marginal des producteurs américains d’huile de schiste fixera le plafond des prix globaux, pas le plancher. »

Or, ce coût de production, en moyenne de 60 dollars le baril, mais parfois à peine 30, devrait encore baisser dans l’avenir. L’industrie est engagée dans une course technologique à la réduction des « intrants » (eau, produits chimiques) nécessaires à la fracturation. La mise de fond pour chaque puits est relativement modeste (de 2 à 7 millions de dollars), la durée de vie brève mais le taux de récupération de l’huile très élevé (jusqu’à près de 100 %).

Les producteurs d’huile de schiste américains sont donc probablement moins vulnérables à des cours tournant autour de 50 dollars que les exploitants de gisements, certes géants, mais qui nécessitent des investissements colossaux (déjà 36 milliards investis pour Kashagan en mer Caspienne, et ce n’est pas fini) et des prouesses technologiques (offshore très profond au Brésil ou dans le golfe de Guinée). En dessous de 90 dollars le baril, ces gisements pourraient rejoindre ce que Anatole Kaletsky appelle des « actifs échoués », à l’image de ces immenses réserves mondiales de charbon qui ne seront jamais exploitées. L’équipe de Kenneth Courtis évalue les investissements menacés à quelque mille milliards de dollars. Et cela inclut l’Arctique, y compris en Russie, et les sables bitumineux au Canada.

Poutine peut attendre ? Peut-être. Mais moins longtemps que les États-Unis dont l’économie diversifiée va bénéficier globalement de la chute des cours du brut, le secteur de l’énergie, et plus encore de la seule exploration/production (E/P), y tenant une place somme toute modeste. L’E/P pèse 2,5 % du PIB américain, 0,2 % de l’emploi, 3 % de la capitalisation du S&P 500 et même seulement 11,8 % du secteur des obligations à haut risque (junk bonds) qui ont financé une bonne part de l’investissement dans l’huile de schiste. À l’inverse, la chute des cours du brut va transformer la stagnation russe en récession brutale en 2015.

À noter enfin que dans cette partie de poker planétaire, les Européens, une fois de plus, ne sont même pas conviés à la table de jeu.(...)...

 

 

 

QUELQUES UNS DES COMMENTAIRES ECLAIRES

04/01/2015, 12:28 | Par Lionel Chilaud

On peut lire une analyse assez différente de la vôtre sur le blog "pétrole" de Matthieu Auzzaneau, ainsi que sur celui de Jacques Sapir, en particulier sur l'impact du prix du baril dans la concurrence entre pétrole conventionnel (OPEP et Arabie Saoudite en tête) vs. pétroles non conventionel (sables bitmineux au Canada et surtout pétrole de schiste aux Etats Unis) dont vous semblez minorer l'impact et le cout de production (plutot autour de 80$/baril pour Sapir), ainsi que le modéle de financement basé sur un schéma de Ponzi et une bulle spéculative de type subprime à la clé, dont les effets si la bulle créve pourraient être bien plus important sur l'économie US que son poids apparent (en emplois directs et % de PIB)...

http://petrole.blog.lemonde.fr/2014/11/29/contre-choc-petrolier-les-saoudiens-menent-une-guerre-des-prix-contre-les-etats-unis/

http://russeurope.hypotheses.org/3215

http://www.mediapart.fr/journal/economie/060711/la-bulle-des-gaz-de-schiste

http://blogs.mediapart.fr/blog/benjamin-dessus/151214/gaz-et-petrole-de-schiste-americain-l-environnement-sacrifie-avec-en-prime-la-deroute-energetiq

 

 

04/01/2015, 15:13 | Par Patrice Coste

http://www.npr.org/2014/12/29/372485968/transcript-president-obamas-full-npr-interview

Interview de Obama du 29 décembre où il dit en gros "on a tout fait pour affaiblir l'économie de la Russie" et pour le prix du pétrole "on savait que ça allait se produire un jour ou l'autre et que ça allait leur causer des problèmes", soit en clair :je ne dis pas qu'on l'a fait mais ça ne peut pas mieux tomber.

"And if, in fact, we were steady in applying sanction pressure, which we have been, that over time it would make the economy of Russia sufficiently vulnerable that if and when there

 

04/01/2015, 21:47 | Par eder

Les pays impactés par la chute des cours du pétrole ne sont pas les meilleurs amis des Etats Unis ni de l'Arabie Saoudite. Un hasard sans doute, penser le contraire relèverait de la théorie du complot Sourire .

Mais il est vrai qu'il y a une dualité sur les conséquences possibles, car ce que ne le dit pas votre ami Kenneth Courtis -ex de Goldman Sachs, une référence- c'est que l'exploitation du pétrole de schiste qui a permis environ 50 % de la croissance américaine sur 3 ans (avec des dégâts environnementaux considérables) va être très durement touchée par la baisse des cours, et donc aussi des emprunteurs insolvables : emprunts + assurances titrisés -> éclatement de bulle spéculative possible d'ici à l'été prochain, si les responsables US n'ont pas prévu de pare-feu ..

A ce petit jeu de qui cèdera le premier,  où il n'est pas fait mention ici des difficultés de l'économie US artificiellement soutenue par les QE à répétition, les russes ne sont pas les plus désavantagés, même si les économistes prévoient chez eux une récession qui coutera environ 4 % de leur PIB . Mais rappelons que la dette de ce pays, c'est 9 % du PIB,soit 10 fois moins qu'en France...

Les conséquences de ces attaques contre l'économie russe, c'est que ce pays va réorganiser son économie en ne comptant plus sur la seule de la rente pétrolière,  il va accélérer la dédollarisation avec les BRICS, et orienter ses échanges vers l'Asie . Des éléments qui ne sont pas encore en faveur des États Unis .  L'article conclut que les européens ne sont pas conviés à la table de ce jeu planétaire. Pire, ils ont laissé faire, quand ils n'ont pas encouragé cette politique du chaos comme en Ukraine qui est en faillite totale .Il faudra bien contribuer à la note finale .

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