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2 juillet 2016

922 – Éric Zemmour: Comment les Anglais ont dynamité l’Europe

 

Sur sansapriori

 

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En entrant dans le Marché commun, les Anglais n’avaient qu’une idée en tête : faire prévaloir leurs intérêts et imposer leur conception du commerce. Ce qu’ils ont réussi à faire. Mais ils n’avaient pas prévu que l’Union européenne leur apporterait une immigration incontrôlée et remettrait en cause leur modèle social, culturel et civilisationnel. C’est pourquoi ils en sont sortis.

Par Eric Zemmour -Publié le 01/07/2016 à 08h55

C’était en 1958. Le général de Gaulle (cf lien 1) est revenu au pouvoir depuis quelques mois. A la surprise générale, il ne remet pas en cause le traité de Rome (cf lien 2), signé un an plus tôt, et fondant le Marché commun avec l’Allemagne de l’Ouest, l’Italie et les pays du Benelux. Le ministre britannique des Affaires étrangères, Harold Macmillan, est un des premiers à demander une audience à l’Élysée. Il est particulièrement remonté. Il prévient vivement son hôte: ce Marché commun signifie pour l’Angleterre le retour du «blocus continental» ; et les conséquences seront les mêmes qu’avec Napoléon, c’est-à-dire «la guerre»( cf lien 3). Le Général apaise le courroux de son interlocuteur britannique comme il peut ; mais il n’en pense pas moins.

Pour lui aussi, comme il le confiera quelques années plus tard à Alain Peyrefitte (C’était de Gaulle), ce Marché commun ressemble beaucoup à l’ancien empire de Napoléon (ou à l’empire carolingien de Charlemagne) et permettra à la France, qui doit en prendre la tête, de retrouver le «rang mondial qu’elle a perdu en 1815». L’Europe des Six sera, selon le rêve du Général, le «levier d’Archimède» de la puissance française. A l’époque, les politiques connaissent leur histoire. Et leur géographie. Quand de Gaulle refuse à deux reprises, en 1963 et en 1967, l’entrée des Britanniques dans le club, il ne le fait ni par ingratitude pour la nation qui l’a accueilli en 1940, ni même parce que les Anglais ont mis leur arme nucléaire sous la tutelle américaine, comme le prétendront les historiens d’outre-Manche ; mais parce qu’il a compris que l’entrée de l’Angleterre dans le Marché commun signifierait en réalité l’entrée du Marché commun dans un ensemble beaucoup plus vaste où il serait noyé, et la prédominance française avec lui.

De Gaulle a deviné qu’à son «levier d’Archimède», les Anglais répondront par le «cheval de Troie». A chacun sa stratégie et sa référence antique ; mais, à l’arrivée, le cheval de Troie vaincra le levier d’Archimède. Les Anglais saperont de l’intérieur le Marché commun ; ils détruiront une seconde fois le «blocus continental». Même de Gaulle n’imagine pas sans doute à quel point il a vu juste. Lui craint alors le Commonwealth et l’ensemble du monde anglo-saxon.

C’est de là, en effet, que viendront les premières dérogations accordées aux négociateurs anglais lorsque Pompidou lèvera le veto français en 1972. Ils pourront continuer de se nourrir avec des produits venus d’Australie, d’Argentine ou de Nouvelle-Zélande. Premières brèches ouvertes dans la préférence communautaire et la politique agricole commune, trésors du marché commun selon de Gaulle. Des brèches que les Anglais s’empresseront d’élargir. Au fil des négociations commerciales dans le cadre de l’OMC, ils parviendront à désarmer entièrement la «forteresse Europe» que craignaient tant les grands groupes américains.

La vision britannique d’un monde ouvert aux quatre vents, sans frontières, ni pour les marchandises, ni pour les capitaux, ni pour les hommes, est devenue celle du continent.

A partir des années 1980, la vague libérale de Thatcher et Reagan déferle sur l’Europe. Le combat n’est plus seulement commercial, mais culturel. La Commission européenne se convertit à l’idéologie libérale. La direction de la concurrence devient la reine de Bruxelles. Toute l’Europe du grand marché est régentée par le droit et le marché.

  • Les sociaux-démocrates français et allemands se soumettent aux libéraux anglais.
  • Les juges européens se convertissent peu à peu au droit anglo-saxon, fondé sur la négociation (le deal) et la coutume, au détriment du droit écrit, d’inspiration napoléonienne et romaine.

Last but not least, les Anglais imposent leur langue comme outil de travail des institutions européennes, alors même que le président Pompidou avait fait promettre au Premier ministre Edouard Heath que les Anglais respecteraient l’usage de la langue française dans les travaux de la Commission.

Mais les promesses n’engagent que ceux qui y croient.

La langue est davantage qu’un outil de communication ; elle est une manière de penser, d’appréhender le monde. Et la vision britannique d’un monde ouvert aux quatre vents, sans frontières, ni pour les marchandises, ni pour les capitaux, ni pour les hommes, est devenue celle du continent. Les Britanniques se liguent avec l’Allemagne réunifiée pour contraindre une France rétive à élargir l’Union aux anciennes démocraties populaires. L’Union européenne sera un grand marché et ne sera qu’un grand marché.

Elle sera le marché le plus ouvert au monde.
Les Britanniques convertissent l’Europe à un système forgé autour de la domination de la finance sur l’industrie et l’abaissement des coûts par la dérégulation sociale, les délocalisations industrielles en Chine et dans les pays pauvres et une immigration de masse pour peser sur les salaires des activités non délocalisables. Tous les pays d’Europe se soumettent, dans l’allégresse pour les pays du nord, dans la fureur et la souffrance pour les pays du sud, au modèle britannique.
L’Europe française est morte,
mais l’Europe anglaise détruit la nation anglaise.

Mais la victoire de l’Angleterre s’avère une victoire à la Pyrrhus. L’Europe française est morte, mais l’Europe anglaise détruit la nation anglaise. L’immigration massive subie par le royaume depuis des années – immigration venue de l’Europe de l’Est et du sud du continent indien – a transformé le pays, et en particulier sa capitale, en une ville-monde où les Anglais ne sont plus en Angleterre. L’élection d’un musulman d’origine pakistanaise à la mairie de Londres a incarné la lente et inexorable mutation d’une ville où les résidences huppées des traders et des riches expatriés côtoient les quartiers islamisés où la charia s’applique sans fard.

Les Anglais ont l’habitude de défendre sans vergogne leurs intérêts.

  • Ils ont voulu entrer dans le Marché commun pour profiter de la zone économique la plus dynamique du monde.
  • C’était alors l’époque des «miracles» allemand, italien, et même français.
  • Aujourd’hui, la zone euro fait tache par sa croissance faible, et les Anglais se bénissent d’avoir échappé à la monnaie unique.

Les Anglais n’ont pas le même rapport à l’Europe parce qu’ils n’ont pas la même histoire.

  • Ils n’ont pas perdu une seule guerre depuis deux siècles. A chaque fois, ils ont fait les bons choix. Ils ont joué la Prusse contre la France de Napoléon ; et ont joué la France de la IIIe République contre l’Allemagne de Guillaume II, avant de jouer la Russie et les États-Unis contre l’Allemagne d’Hitler.
  • Ils ont une confiance nationale en eux que nous avons perdue au fil des défaites militaires et des occupations. Ils se sentent européens, mais pas continentaux.
  • Depuis qu’ils ont établi leur régime parlementaire en 1689, rien n’a changé ou presque. Ni 1789 ni 1848 ni 1917 n’ont rien modifié.
Ils nous donnent une double leçon paradoxale.
Le peuple le mieux outillé mentalement et idéologiquement pour la mondialisation rejette un modèle multiculturaliste qui est en train de détruire son âme ; le vote contrasté entre Londres et le reste du pays, entre les classes sociales et entre les générations, entre vainqueurs et vaincus de la mondialisation, montre bien qu’au-delà de l’enjeu européen, l’Angleterre ne se reconnaît plus dans le miroir que lui tend sa capitale.
La nation d’Europe la plus réputée pour son pragmatisme et son matérialisme, la «nation de boutiquiers» brocardée par Napoléon sacrifie délibérément une part de ses intérêts économiques à sa pérennité culturelle et civilisationnelle. A la sauvegarde de son identité. «Il y a trois sortes de biens, disait Erasme: les biens de l’âme, les biens du corps, et les biens extérieurs ; il faudra veiller à ne pas mesurer le bonheur de la cité essentiellement par les biens extérieurs.» Ces leçons valent pour tous les peuples d’Europe et pour tous les temps.

2016.04.25 9

lien 1/-http://premium.lefigaro.fr/histoire/archives/2015/11/06/26010-20151106ARTFIG00304-de-gaulle-ses-dix-expressions-devenues-cultes.php

lien 2/-http://www.lefigaro.fr/international/2007/10/29/01003-20071029ARTFIG00148-le-traite-de-rome-bible-de-lunion-europeenne.php?redirect_premium

lien3/-http://premium.lefigaro.fr/histoire/livres/2016/03/21/26008-20160321ARTFIG00234-l-art-militaire-de-napoleon.php


source/http://premium.lefigaro.fr/vox/monde/2016/07/01/31002-20160701ARTFIG00074-eric-zemmour-comment-les-anglais-ont-dynamite-l-europe.php

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