Il est quand même étrange que le mouvement déclenché dans la police ait pu provoquer cette surprise apeurée. S’il y avait quelque chose de prévisible, c’était bien cette réaction d’exaspération d’un corps soumis à toutes sortes de pressions et qui mesure tous les jours qu’il n’a plus les moyens d’accomplir les missions qu’on exige de lui. Alors, bien évidemment ce mouvement d’humeur, qui n’est pas le prodrome d’un coup d’État fasciste, soyons sérieux, charrie beaucoup de choses.
Tout d’abord il n’est incontestablement pas homogène, même s’il n’y a aucune raison que l’influence du Front National n’y soit pas forte, comme dans le reste du pays où l’on n’est pas loin de voir un Français sur trois envisager de lui apporter sa voix. Il y a ensuite ce rapport très français à la police, où chaque couche sociale aspirant à l’hédonisme sécuritaire et comptant sur la police pour le lui assurer, est prompte, quand elle est confrontée à celle-ci, à faire sien le folklore anti-flics. Et dans la situation d’aujourd’hui, les fonctionnaires de police vivent de plus en plus mal leurs mises en cause systématiques, et la complaisance avec laquelle la bien-pensance médiatique les relaie. Alors, débarrassons-nous des fantasmes de 6 février 34 et des «no pasaran » de pacotille, et essayons de comprendre ce que raconte cet épisode, et pourquoi, aujourd’hui, l’institution chargée du sale boulot, le corps qui est par définition chargé de se taper le sale boulot se met à renâcler.
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