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23 février 2009

HUMOUR : DSK « dynamité » par Stéphane Guillon sur France Inter, « façon puzzle » : méchanceté ou critique légitime ?

Article de Paul VILLACH sur AGORAVOX


On l’avoue, on a jubilé, mardi 17 février 2008, en écoutant sur "France Inter" Stéphane Guillon tourner DSK en ridicule. On a même pris plaisir à le réécouter plusieurs fois sur Internet. Il ne l’a pas volé, trépignait-on intérieurement à chaque salve dévastatrice lancée par l’humoriste. On s’est même surpris à mêler son éclat de rire aux deux coups de sirène censée retentir en cas de danger de rut imminent.

             

  DSK, évidemment, n’a pas goûté la plaisanterie, on le comprend. Il a usé habilement du leurre de la vaccine qui admet un peu de mal pour susciter le rejet de la thèse de l’adversaire : concédant que les responsables politiques pouvaient ou même devaient faire l’objet de critiques, il a estimé que « l’humour, c’est pas drôle quand c’est principalement de la méchanceté… » À y regarder de près, pourtant, Stéphane Guillon a-t-il été méchant ?

La leçon de Molière

Quand on est la risée des autres, on les trouve forcément méchants. Précieuses ridicules, médecins charlatans, barbons épris de jeunes filles et hypocrites bigots, les cibles de Molière, on s’en doute, n’appréciaient pas ses charges. « C’est une grande atteinte aux vices que de les exposer à la risée de tout le monde, écrit-il dans la préface de « Tartuffe », comédie qui a même été interdite en 1664 sous la pression des dévots. On souffre aisément des répréhensions, poursuit-il ; mais on ne souffre point la raillerie. On veut bien être méchant, mais on ne veut point être ridicule. »

Qu’a fait d’autre Stéphane Guillon que d’user du comique de farce dont la particularité est de grossir le trait jusqu’à l’absurde pour faire ressortir le vice dénoncé ? L’acteur Olivier Perrin l’avait devancé, le 25 octobre 2008, dans un gag de même veine : filmé en caméra caché comme agent des renseignements généraux, il avait « fait le trottoir » dans Paris pour inviter les passantes de tous âges à plus de prudence vestimentaire, parce que DSK, réputé « très chaud », était de passage dans le coin.

Le président du FMI, il faut le reconnaître, a été assez léger : n’a-t-il pas donné des verges pour se faire battre ? Que n’a-t-il réfléchi avant de se glisser dans le rôle du héros de vaudeville le plus trivial dont l’argument traditionnel est le cocuage ? Sans doute était-il sûr de son coup : il ne pensait pas que son aventure avec une employée hongroise du FMI serait divulguée et défraierait la chronique en octobre 2008 (1).

La farce désopilante de Stéphane Guillon

Dans la bonne tradition de la farce qui ne fixe à ses déformations de la réalité d’autres limites que celles du rire à déclencher, Stéphane Guillon a donc imaginé un plan de sauvetage délirant du personnel féminin de France-Inter au cas où DSK ne résisterait pas à ses pulsions tyranniques. Il a accumulé les consignes les plus absurdes et hilarantes : tenue vestimentaire stricte jusqu’au port de la burqa, lieux retirés condamnés, caméra sur et sous la table, sirène d’alerte en dernier recours avec mise en lieu sûr à d’autres étages des femmes menacées, en cas de passage à l’acte redouté.

Des jeux de mots, dans ce contexte, rendaient même les termes les plus anodins sulfureux par simple allusion à l’une de leurs possibles acceptions : dire seulement par exemple que DSK allait « pénétrer » dans le studio, campait déjà le personnage dans ses oeuvres. Il ne pouvait non plus être question de parler de l’émoi « au sein de » la rédaction sans paraître provocant, l’innocente préposition passant pour une évocation sexuelle !
La distorsion entre ce qui est ainsi imaginé et ce qui devrait être, est si forte, que seul l’éclat de rire peut détendre le ressort et remettre les choses en place.

Nul ne songe, bien sûr, à imputer à DSK une conduite aussi intempérante que, par métonymie, laissent croire les mesures préventives loufoques énumérées par Stéphane Guillon. Mais, c’est vrai, son absence de contrôle sexuel est clouée férocement au pilori dans ce luxe de précautions prescrites par l’humoriste. Celui-ci a, toutefois, à l’avantage de DSK, établi un parallèle avec une de ses récentes victimes, M. Kouchner : il lui a reconnu, en effet, l’ honnêteté de n’avoir pas fui ses responsabilités et de n’être pas venu devant l’Assemblée nationale jouer la victime d’une attaque calomnieuse en opposant à tort et honteusement le leurre de diversion de « l’antisémitisme ».

Un manque de courtoisie de France Inter ?

Il reste qu’on peut tout de même se demander si France-Inter est sans reproches. En acceptant d’ accueillir DSK - par contrainte ou à son initiative -, la station ne devait-elle pas se soumettre aux usages de la courtoisie ? On ne reçoit pas un invité pour l’humilier et le discréditer. Ne lui fallai-il pas choisir entre faire la critique de DSK sans quartier ou l’accueillir ? On objectera cependant avec raison qu’une station de radio publique n’obéit pas aux règles de réception individuelle, sauf à se condamner à faire l’hagiographie de ses invités, en d’autres termes, à leur cirer les pompes pour assurer leur promotion.

Il semble, tout compte fait, que DSK ne peut que s’en prendre à lui-même. Ces gens à qui un standing de vie princier déraisonnable fait croire à une sorte de statut de surhumanité intouchable, veulent le beurre, l’argent du beurre et le sourire de la crémière, c’est-à-dire des places, les privilèges qui s’y attachent et dont ils peuvent abuser jusqu’au droit de cuissage, et en plus la considération populaire. Encore faudrait-il qu’ils en fussent dignes ! DSK doit maintenant savoir à quoi s’en tenir, à défaut de se corriger si tant est que la comédie puisse châtier les mœurs en riant. « Castigat ridendo mores », dit-on. Paul Villach

(1) Paul Villach, « Une couverture digne de VSD : le fou rire indigne des époux Strauss-Kahn-Sinclair », AGORAVOX, 27 octobre 2008.

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