Le travail en famille est à ses yeux la garantie d'"une relation de confiance" et de "compréhension mutuelle". Et puis, précise-t-elle, "on parle très souvent des dossiers à table". Dans 15% des cas au Palais-Bourbon, près de 10% au Luxembourg, l'élu recrute comme assistant parlementaire son conjoint, un enfant ou un neveu. A l'Assemblée, André Flajolet (Pas-de-Calais, UMP) s'offre les services d'Yvonne Flajolet, Christian Bataille (Nord, PS) ceux de Delphine Bataille, Eric Raoult (Seine-Saint-Denis, UMP) ceux de Corinne Raoult, Jean-Pierre Nicolas (Eure, UMP) ceux de Catherine et Mélanie Nicolas... Et au Sénat, tout le monde sait que Michel Charasse (Puy-de-Dôme, PS) emploie son épouse.
L'immense majorité de ces collaborateurs fournissent un vrai travail. Certains parlementaires laissent pourtant entendre qu'il y aurait dans leur hémicycle quelques vilains petits canards, dont les épouses, rémunérées au titre de "collaboratrices en circonscription", se contenteraient pour tout travail d'accompagner leurs députés de maris à quelques cérémonies locales.
Interdiction d'employer un membre de sa famille à Bruxelles
Voilà qui ressemble fort à des emplois fictifs, juste destinés à conserver dans le giron familial une partie des 9 000 euros mensuels destinés au paiement des collaborateurs. "On voit aussi des amis, des maîtresses et des amants embrasser subitement notre métier", indique l'assistante parlementaire d'un député socialiste. Pour mettre un terme à de telles dérives, le Sénat a mis en place quelques garde-fous. Un sénateur ne peut embaucher qu'un seul membre de sa famille. Et le salaire du conjoint ou de l'enfant ne peut dépasser le tiers de l'ensemble des crédits réservés à l'emploi des collaborateurs. Mais des députés ou des sénateurs, pour échapper aux mauvaises langues, sont allés jusqu'à inventer le salariat croisé: "J'embauche ton conjoint et toi le mien."
Faut-il s'asseoir sur le qu'en-dira-t-on? Les eurodéputés ont décidé d'en finir avec les soupçons. A partir de la prochaine législature, qui s'ouvrira au lendemain des élections de juin, leurs successeurs auront l'interdiction d'employer comme assistant parlementaire un membre de leur famille. "Il n'y a pas nécessairement des fraudes. Mais c'est toujours embêtant de donner l'impression que vous utilisez l'argent public pour favoriser vos proches, justifie l'eurodéputée Françoise Grossetête (UMP/PPE). Même si vos enfants ont tous les diplômes nécessaires et qu'ils sont travailleurs, il faudra vous passer d'eux."