Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Vu au MACROSCOPE
Visiteurs
Depuis la création 1 378 953
Newsletter
25 juin 2013

Snowden en fuite : la rage impuissante de l’Oncle Sam

 


Sur BVOLTAIRE

uncle-sam

 

Le 24 juin 2013

Vincent
de Longueville
Ecrivain

L’Oncle Sam ressemble à un petit garçon pris les doigts dans le pot de confiture, et qui se roule par terre de rage impuissante. Depuis quinze jours, l’un de ses pioupious nargue la mère patrie avec la complicité de ses meilleurs ennemis, Chine et maintenant Russie, où il s’est réfugié tour à tour. Il s’appelle Edward Snowden, n’a pas trente ans, et ne s’en cache pas : oui, c’est bien lui qui a révélé les secrets du programme de surveillance américain des réseaux internet et téléphone, un peu partout dans le monde.

Le consultant de la CIA qui fuit en Russie via la Chine, et s’apprêterait aux dernières nouvelles à rallier l’Équateur via Cuba, avouez que ça vous a quand même un petit parfum de Guerre froide ! À cette nouvelle internationale, habilement drapée d’oripeaux anti-impérialistes, il faut ajouter Wikileaks. L’association, célèbre pour avoir divulgué plus de 700.000 télégrammes diplomatiques et documents militaires confidentiels américains en 2010, aurait aidé au transfert de Snowden en Russie, et joué les intermédiaires avec l’Équateur, pays qui a déjà offert l’asile à son fondateur Julian Assange.

Bref, c’est une coalition hétéroclite qui se fait jour pour empêcher l’extradition du jeune homme vers les États-Unis. Bien sûr, chacun couvre la manœuvre d’un apparat de bienséance diplomatique, et refile le mistigri au plus vite pour éviter de trop fâcher Washington : ainsi de Hong-Kong, estimant n’avoir rien contre ce bon garçon, mais pressant tout de même son envol vers d’autres cieux ; ainsi de la Russie, tout heureuse de le déclarer en partance pour l’Équateur, donc techniquement hors d’atteinte ; ainsi de l’Équateur, qui dit étudier la question de l’asile, mais réserve encore sa réponse.

La patrie des droits de l’homme (la France, si vous en doutiez) n’a pas proposé d’accueillir le fugitif, malgré une proposition de Marine Le Pen en ce sens. Mais puisqu’on évoque l’Hexagone, il est tout de même instructif de voir Depardieu et Snowden se réfugier d’un même élan chez Poutine, même si les raisons qui les y ont poussés diffèrent. Encore que… La réduction du champ des libertés par un État jugé omnipotent, voilà peut-être une piste à creuser, on ne sait jamais.

Quoiqu’il en soit, ce front uni de Pékin et Moscou est un camouflet pour Obama. Et dire que tout ce beau linge dînait à la même table au G8 irlandais, il n’y a pas huit jours ! Qu’il n’y en a pas quinze, le Président américain faisait part à son alter ego chinois Xi Jinping de ses griefs en matière de cyber-espionnage ! Compliqué désormais pour notre bon vieux Barack de se poser en dragon de vertu… « Les États-Unis se révèlent être le plus grand voyou de notre temps », vient ainsi d’écrire l’agence officielle chinoise Chine Nouvelle, qui n’a pas pour habitude de faire dans la dentelle, mais là, tout de même, ça y va…

Par la force de la clé USB, Snowden fait donc vaciller la diplomatie de l’Oncle Sam. Comme quoi, plutôt que d’aller voir ce qui se passe en Chine et ailleurs, l’Amérique aurait mieux fait de se concentrer sur les courriels de ce petit idéaliste peigné comme un jeune premier, et grandi avec l’Internet qu’elle a créé. Lui semble en tous cas avoir tiré les enseignements de l’affaire du soldat Manning ― la taupe de Wikileaks, dont le procès s’est ouvert ces jours-ci aux États-Unis ―, en se mettant à l’abri sans attendre.

Le drôle de tout ça, c’est que le jeune homme a attendu plus de quatre ans avant de dévoiler le pot aux roses : l’élection d’Obama, pensait-il, allait changer l’Amérique… Quand on vous le dit idéaliste ! Obama, qui vient d’en faire un apatride, en faisant révoquer son passeport. Geste dérisoire d’une administration incapable de le lui retirer en mains propres, mais lancée dans une traque planétaire sans merci. Snowden, qui estime se battre pour la protection de la vie privée, doit désormais protéger la sienne en tout chemin et en tout lieu.

Toutes proportions gardées, son cas me rappellerait volontiers celui de Clément Weill-Raynal, ce journaliste de France 3 mis à pied pour avoir révélé l’existence du Mur des cons ornant le local du Syndicat de la Magistrature. Comme lui, Snowden est de ces lanceurs d’alerte à châtier pour avoir révélé la faute ou la fraude. De ces messagers jetés en pâture à la vindicte pour saturer d’émotions le cerveau de la plèbe, et lui faire détourner les yeux de la mauvaise nouvelle dont il est porteur.

Publicité
Publicité
Commentaires
P
Saturer d'émotions le cerveau de la plèbe.. J'adore ,tout est dit ...!!
Répondre
Publicité
Vu au MACROSCOPE
Derniers commentaires
Archives
Publicité