A l’usage des Français, 10 leçons sur la victoire de Trump

Tant de sottises sont proférées en France depuis l’élection de Donald Trump que j’ai eu envie de tordre le cou à quelques unes de ces billevesées.

13/11/2016

Je suis d’autant plus à l’aise que je jugeais probable la victoire du milliardaire dans un article publié ici-même en juillet dernier, plus de trois mois avant le scrutin américain.

1/ Les Français n’ont aucune raison d’être «opposés» à la victoire Trump ou «déçus» par elle. C’est une élection dans un pays étranger, démocratique et souverain. Nous n’avions aucune influence sur l’issue du vote qui n’affectera que très marginalement notre sort. Les Français feraient mieux de s’intéresser à leur propre système politique et au déroulement de la prochaine campagne sur laquelle ils ont leur mot à dire et qui les concerne directement.

2/ Trump a gagné parce qu’il a fait la meilleure campagne. Il n’a pas gagné par hasard. Son succès reflète, qu’on le veuille ou non, ce qu’est l’Amérique d’aujourd’hui. Les Américains les plus modestes, les hispaniques, les noirs ont davantage voté pour lui que pour le candidat républicain de 2012, Mitt Romney.

3/Hillary Clinton était une mauvaise candidate qui a fait une campagne exécrable. Cette femme est détestée depuis 30 ans. Le parti démocrate s’est tiré une balle dans le pied en la choisissant. Le facteur féminin n’a pas joué : elle a réuni moins de femmes sur son nom qu’Obama dans les scrutins précédents.

4/Trump n’a pas gagné parce qu’il était le plus riche. Hillary Clinton a dépensé deux fois que lui dans cette campagne. Chaque voix a coûté 4,5$ à Trump, 9$ pour Clinton.

5/Bernie Sanders n’aurait pas fait mieux qu’Hillary Clinton. Il aurait fait bien pire. Comment imaginer qu’un vieux gauchiste puisse l’emporter dans l’Amérique qui a finalement choisi nettement Trump ? Ceux qui brandissent des sondages favorables à Sanders oublient de dire que ces enquêtes ont été conduites pendant les primaires et pas après les conventions.

6/ L’élection de Trump est nette et incontestable. L’argument selon lequel Hillary Clinton est majoritaire en suffrages sur le plan national ne tient pas. Le système électoral américain est fondé sur le fédéralisme, voulu et accepté par tous depuis les origines du pays. Il n’y a pas une seule élection présidentielle mais 50 élections, une par état. Seul le nombre total de délégués compte.

7/ Les manifestations contestant la victoire de Trump sont illégitimes. Elles sont relayées complaisamment par les médias qui n’auraient pas manqué de dénoncer d’éventuels rassemblements pro-Trump si Hillary Clinton avait gagné. Le comble du ridicule a été atteint à Paris lorsque, au lendemain de la victoire de Trump, une trentaine de zozos français brandissant des pancartes se sont rassemblés Place de la République pour contester le résultat des urnes en Amérique.

8/Les médias se sont trompés et les instituts de sondage n’ont rien vu venir. C’est vrai aux Etats-Unis et chez nous. Il s’est passé exactement la même chose avant le premier tour de l’élection présidentielle française en 2002. Le choc du 21 Avril avec la présence surprise de Jean-Marie Le Pen au second tour devrait nous conduire à plus de modestie et de vigilance pour les échéances à venir.

9/Trump sera moins puissant qu’on ne le croit. Le président américain a des pouvoirs beaucoup plus limités que son homologue français. Aux Etats-Unis, le pouvoir est beaucoup plus dilué et décentralisé. De nombreux contre-pouvoirs corrigent ou empêchent les excès. Le Congrès a toujours le dernier mot. Même contrôlé par le Parti Républicain, ce Congrès ne donnera pas un blanc-seing à toutes les décisions que pourrait prendre Trump.

10/La démocratie américaine survivra. Depuis 240 ans, elle en a vu d’autres : la guerre de Sécession, la guerre du Vietnam et quatre présidents assassinés. Depuis 240 ans, elle vit avec la même constitution alors que, pendant la même période, les Français ont changé constamment de régime et de système politique. Les rythmes électoraux sont très rapides : dans deux ans seulement, avec de nouvelles élections législatives (mid-term), le Congrès sera largement renouvelé. Si Donald Trump fait n’importe quoi au début de son mandat, il sera sanctionné et les démocrates pourraient le museler par le pouvoir législatif. Le pire n’est jamais sûr.

Jérôme Godefroy (novembre 2016)

SOURCE: https://medium.com/@jeromegodefroy/a-lusage-des-fran%C3%A7ais-10-le%C3%A7ons-sur-la-victoire-de-trump-aa3938f96389#.z2nre3jsg