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21 décembre 2007

Note de lecture, sur "ma plus belle histoire..."

Note de lecture sur
le livre de Ségolène Royal

Ma plus belle histoire, c’est vous

Par JPaul GROSSE, blog "les4saisons"

.


Le 25 octobre 2007, j’avais poussé un coup de gueule en tant qu’adhérent de Désirs d’avenir, m’étonnant du silence de Ségolène Royal, avec son site devenu affligeant par rapport à ce que la ségosphère avait produit depuis 2006, l’absence d’analyse sur la défaite, l’absence de perspectives pour le présent et l’avenir. Un ou deux messages pour dire qu’elle prenait le temps de … auraient suffi à éviter l'énervement et l'indisposition devenue indisponibilité de beaucoup. Dans ces conditions, une sollicitation à renouveler l’adhésion sans justifications politiques ne m’a pas convaincu. J’ai également été silencieux sur le site pendant des mois, même si je ne suis pas intervenu souvent dans les soutiens tellement je trouve peu intéressant ce qui s'y échange. Le même 25 octobre, première vraie manifestation de Ségolène sur son site et depuis, des lettres régulières: la machine semble se remettre en route.
J’ai profité d’une courte intervention chirurgicale pour lire son livre en 3 jours, en soulignant ce qui m’importait.
On peut penser que ce livre constitue le retour de Ségolène.
Je surprendrai peut-être en disant que le plus important dans ce livre est l’annexe : Comment ça marche la France de Ségolène Royal ? les 21 dernières pages, là où elle reprend l’essentiel sans corrections de ce qu’elle a proposé pendant la campagne, nourri des débats participatifs, des expériences d’ailleurs, de ses propres essais.
C’est sur ces pages que je veux un peu m’attarder.
Il est clair que le ségolénisme est un réformisme : il ne s’agit pas de révolutionner la société ; ce n’est pas une révolution culturelle au sens marxiste et en même temps, c’en est une. Ce réformisme suppose la croissance, accepte le marché et la mondialisation, la concurrence et la compétition, mais en les moralisant, en voulant les moraliser par l’action politique, du haut en bas de la société avec de nouveaux modes de comportement, une nouvelle conception des droits et des devoirs de chacun, des  collectivités, de l’état. Les notions d’ordre juste et de France présidente (le second mot parle moins que le premier mais il contient tout ce qui relève de la démocratie participative dont le potentiel révolutionnaire est pour moi, réel) résument bien cette révolution culturelle réformiste. C’est marier la volonté politique de tous les échelons de l’état et le désir de changement ou à tout le moins de s’en sortir, de devenir responsable de sa vie de la majorité des gens. C’est sécuriser les parcours de chacun. Le ségolénisme est inspiré par le catholicisme social, un des courants de la résistance, un des courants de la société et du socialisme lui-même. Cette façon de voir le monde a parlé aux Français, à la différence du discours obsolète du PS. Ancrée dans l’écoute, dans la connaissance réelle de l’état d’esprit des gens, cette façon de voir a permis à la gauche réformiste, au ségolénisme (à quel prix d’ailleurs pour Ségolène) de récupérer des thèmes confisqués par la droite et l’extrême droite comme  la sécurité,  l’identité nationale, la valeur travail, notamment, thèmes complètement revisités et à mon avis rendu crédibles pour des gens de gauche, par Ségolène qui a osé passer outre certains tabous. Seuls des sectaires, des idéologues peuvent douter du contenu de gauche de ces thèmes soi-disant de droite.
La lecture de ces 21 pages réconcilie avec l’idée que la politique peut changer l’ordre des choses ou plus exactement rendre plus humain, plus juste, plus sûr, un monde vécu comme hostile, précarisant, appauvrissant et qui l’est vraiment.
L’ordre juste c’est l’ordre capitaliste moins la brutalité, moins la violence, moins la peur, avec de la concurrence loyale, avec des règles valables pour tous, sans dumping économique et social, avec des entreprises dynamiques, innovantes, soucieuses de leurs salariés, au niveau du contrat de travail, de la formation, du salaire, de la redistribution de la richesse, salariés eux-mêmes soucieux de leur entreprise, de ses performances, de ses innovations, de sa modernisation ou adaptation à un monde en changement constant, en mutation d’où une syndicalisation de masse nécessaire et le dialogue social préféré à la lutte des classes, au conflit, aux grèves dures …
Je ne vais pas réécrire ces 21 pages : il faut les lire et se demander si c’est possible ou pas. Il serait bon que ces 21 pages circulent massivement sous toutes formes : papier, internet et livre.
Que ce que propose le ségolénisme corresponde à l’attente des gens, j’en suis convaincu. Que ce soit possible au niveau du pays alors que le monde est ce qu’il est, que l’Europe est ce qu’elles est, que la financiarisation de l’économie est ce qu’elle est,  par un état impartial, plus économe, plus efficace, plus juste, mieux décentralisé, avec des travailleurs également citoyens, débattant des politiques mises en œuvre à travers les jurys citoyens, c’est la question à laquelle il faut répondre.
A-t-elle oublié des propositions essentielles, je pense à Bretton Woods 2 réclamé depuis longtemps par Lyndon LaRouche et Jacques Cheminade et depuis peu par Michel Rocard et Pierre Larrouturou ?
Je pense que la France de Ségolène Royal, à améliorer, il faut essayer de la mettre en place. Il faut aussi que Ségolène s’ouvre plus, par exemple à des projets comme le pont terrestre eurasiatique.
L’excellence environnementale et le développement durable, ça ne me semble pas à la hauteur des problèmes. La vision mondiale de Ségolène manque d’ampleur, même si elle a prouvé par ses voyages, la pertinence de ses choix : à part l’euroméditerranée qui est un domaine qu’elle aborde, elle ne dit rien sur ce qui se joue en Asie et comment il faut essayer d’agir dessus. Idem pour les Etats-Unis.
Plus précisément encore, je pense qu’on ne peut pas rêver pendant 5 ans de la France présidente dont le bilan positif demandera 5 ans encore au moins. Car en attendant, ça se dégrade dans tous les domaines. Les changements de Sarkozy bousculant 25 ans d’immobilisme, on ne peut pas se contenter de les dénoncer, de proposer d’autres Grenelles plus essentiels et que sais-je ?
La démocratie participative, les jurys citoyens, la démocratie réactive et active, ça devrait servir pour organiser le mécontentement et le désir d’ordre juste pas en 2012 mais maintenant, selon le titre du livre précédent de Ségolène.
En ce qui me concerne, ayant longtemps cru et milité pour l’hypothèse révolutionnaire qu’Alain Badiou nomme hypothèse communiste, je suis bien obligé de me demander quelle hypothèse aujourd’hui ?
Révolution ou réforme ?
Croissance ou décroissance ?
Consommation des ménages et endettement, surendettement sur lesquels survit comme le montre bien Larrouturou, le système financier en faillite et pouvant entraîner le monde dans une crise pire que celle de 1929, même si la science économique a donné quelques outils pour retarder la bombe. Ou relance de la production de biens industriels, en chute libre partout ?
Quand on a 613.000 milliards de dollars de produits dérivés à comparer avec le PMB, produit mondial brut, évalué à 36.800 milliards de dollars, 1.800 milliards d'euros pour le PIB français, on comprend qu’on ne peut plus se contenter de parler seulement des abus bancaires concernant les ménages.
L’initiative de nouvelle gauche d’une pétition intégrant la proposition de Bretton Woods 2 (notez comme la taxe Tobin a fait long feu) est une initiative parmi les plus intéressantes comme celle pour le respect du Non au référendum par le biais du Non de nos représentants, à exiger d’eux, réunis à Versailles en janvier 2008.
Les 310 pages précédant l’annexe présentent-elles alors un intérêt ?
Oui, si on veut comprendre pourquoi on a perdu cette élection imperdable selon le titre d’un livre hostile à Ségo, écrit par un fabiusien, un moment rallié à Ségolène.
Pour aller à l’essentiel,
- on a la responsabilité écrasante de la direction du PS (un seul exemple : la vidéo sur les 35 heures au collège fourni aux médias par la bande à DSK ; résultat : une large partie des enseignants s’est ralliée à Bayrou),
- on a l’efficacité de la machine à l’américaine (plus exactement la machine néo-conservatrice) de Sarko,
- on a l’opération Bayrou qui a déstabilisé le corps électoral, en particulier le peuple de gauche.
A un million de voix, la bascule était possible.
Ségolène s’attarde alors longuement sur les sondages, études, enquêtes qui aident à comprendre autrement que les visites de terrain l’état d’esprit des gens. Par exemple les mamies de 65 ans et plus n’ont pas voté Ségo mais Sarko : il n’a donc pas suffi d’être une femme, une madone, une icône, une bécassine, une plouc, une maîtresse d'école, une dame patronnesse (mettez bien sûr des " ") pour séduire les mamies esseulées et peureuses qui sont 2 fois plus nombreuses que les jeunes de 18 à 24 ans.
Toute cette attention portée aux travaux des sondeurs, des enquêteurs, des sociologues, des psychologues et psychanalystes, des politologues peut gêner si comme moi, on pensait que l’homme est un animal politique rationnel. Hélas ou non, hommes et femmes c’est plus complexe, ça a des sentiments, des vécus, des ressentis.
Si on accepte l’élection comme moment de la démocratie (élections = piège à cons, disait-on en 68 et peut-être faudrait-il se reposer la question car les marxistes pensaient la même chose et Alain Badiou aujourd’hui défend la même idée, une vieille idée), alors une voix valant une voix, la quantité faisant la loi, peut-être l’apport des sciences molles que sont les sciences humaines n’est-il pas à négliger ? Que la politique amène les politiques à s’intéresser aux gens, à travers des catégories, des tranches d’âge, des localisations … n’est peut-être pas si mal que ça, peut-être est-ce la conception d’Aristote ou de Platon se réalisant autrement que nous ne l’imaginions ou le souhaitions ?
Pour conclure cette note sur ce livre que je conseille, je dirai que l’écriture en est surprenante, utilisant des registres divers tant le parler oral que différents registres de la langue écrite, que cela m’a déconcerté sans me décourager.
J’ai découvert une femme sensible: les 2 pages  sur le couple qu’elle formait avec Hollande sont pudiques, révèlent la souffrance d’une femme et d’une mère.
J’ai découvert une femme d’une rare détermination avec des convictions et des valeurs, avec quelques faiblesses mais tellement de force.
Comme cette constitution personnalise la fonction présidentielle (et je n’en suis pas partisan : il faut changer de république, passer à une 6°, équilibrée, impartiale …), il ne faut pas s’étonner si ça peopolise comme on dit : rien de comparable d’ailleurs entre le feuilleton Sarko et le feuilleton Ségo.
Cela m’amène à évoquer le spectacle.
La démocratie participative, les rencontres sur le terrain, internet, c’est 1 million de personnes rassemblées. Il y a 44 millions d’électeurs. La télé a donc encore, tant qu’il y a cette constitution, de beaux jours devant elle, beaux jours de spectacle et de manipulation pour camoufler l’essentiel comme on a pu le voir pendant la campagne où les boules puantes l’emportaient sur les projets, où le vacarme médiatique sarkostique tonitruait  à fond avec la partialité intéressée des médias et de leurs patrons, amis de Sarko, pour empêcher qu’on entende l’originalité des propositions de Ségo : on n’avait affaire qu’à des coups fourrés, des jugements expéditifs, des faux, des rumeurs.
De cette campagne, Ségolène est sortie renforcée, aguerrie, enfin présidentiable : personne ne pourra plus le lui contester.
Le procès des éléphants contre Ségolène qui a constitué la matrice des déchaînements sarkubuesques est derrière elle.
Les méthodes de Sarkozy sont désormais connues, épluchées: les contre-feux nécessaires seront allumés au moment opportun, le timing sera précis, la bataille d’images sera en miroir, valeurs et morale publique en plus pour Ségolène qui saura faire de ce revers, le rebond vers la présidence, la France présidente.
Mais j’attends d’ici 2012, des choses plus fortes que ce que je vois ou entends en ce moment, même venant d’elle: c’est trop mou, trop lié aux dirigeants du PS dont il faut botter les fesses, dont il faudrait faire le procès même, comme ça se fait pour des professionnels ayant commis des fautes. Je les entends déjà poussant leurs cris d’orfraie comme au moment des jurys citoyens.

On lira en complément: Ma candidate de Patrick Menucci. C'est bien écrit, précis, édifiant. On peut suivre toutes les étapes et moments de la campagne qui ont compté, trop souvent des coups tordus,l’incapacité ou le refus même des dirigeants du PS de faire évoluer leur logiciel, la responsabilité de Hollande souvent en désaccord avec Ségolène et le clamant, idem pour tant d’autres sans parler de ceux qui partent 3 semaines au Canada au plus fort de la campagne comme DSK, à qui elle avait demandé pourtant de prendre toute sa place pour défendre le programme économique de la candidate.
A quand les procès des dirigeants coupables de non-assistance à peuple précarisé ?
On lira également: De François à Ségolène de François Rebsamem.

Deux livres apportant un éclairage complémentaire à celui de Ségolène.

On fuira: La nuit au Fouquet's de deux journalistes du Monde dont l'une s'était fendue déjà avec une autre complice du Monde d'un brûlot contre Ségolène comme celui d’ Eric Besson, tous deux sortis à grands renforts médiatiques. Elles n’ont rien à dire ces dames à part la liste des invités, quelques mots sur l’ambiance, sur l'absence puis la présence de Cécilia, déjà oubliée.

J'ai été déçu par Guy Môquet au Fouquet's de Jean-Louis Basse. Je ne vois pas trop ce que des jeunes peuvent retenir de ce petit livre: la transmission d'un message, d'un courage, de valeurs ne se fait pas d'après moi.

Pour terminer cette note, j’évoquerai la discussion que j’ai eue avec le cardiologue qui a fait l’examen de contrôle lors de mon entrée à la clinique. C’était tard, on a pu discuter pendant _ d’heure, d’abord de philosophie (lui, Spinoza, moi, Marcel Conche) puis de politique, lui pour Sarko, moi pour Ségo. Alors qu’il avait voté Mitterrand, sans doute en 1995, il a voté Sarko en 2007, pour le changement, après 25 ans d’immobilisme, mettant Mitterrand et Chirac sur le même plan. Il m’a dit que si Sarko avait été élu, c’est parce que les Français voulaient l’essayer en pensant qu’il était le plus capable d’effectuer les changements dont le pays a besoin et de me parler des relations dans les entreprises en particulier : je crois entendre Ségo et le lui dit. De me dire que si Sarko ne fait pas ce que les Français attendent, ils sauront le remplacer. Comme, il a le sens de la justice, je crois que la prochaine fois, il votera Ségo si la révolution ou la rénovation idéologique de la gauche aboutit à coïncider avec les attentes des gens. Un programme de la complexité, puisque tout se tient comme dit simplement Ségo, un programme sur mesure pour états d’esprit et réalités concrètes, différent du clefs en mains de Sarko : à chaque problème, ma solution.

Jean-Claude Grosse

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