Ségolène Royal victime d'oppo research ?
segolene royal
Publié le 02 Septembre 2009
A peine la
leader socialiste engage-t-elle une offensive médiatique qu'elle subit
le retour d'attaques très vives s'en prenant à sa personne davantage
qu'au débat de fond.
C'est désormais systématique,
chaque retour en force de Ségolène Royal est accompagné d'accusations
diverses à l'exemple de la dernière sur de "supposés mensonges" quant à
un prix lié à l'environnement.
Cette technique consiste à considérer que l'opinion ne choisit plus
positivement mais élimine. Il faut donc lui donner des raisons pour
"voter contre".
C'est une technique très développée dans les campagnes US.
La présidentielle 2004 a été caricaturale en la matière.
Jusqu'en août 2004, Kerry incarnait une figure emblématique de la
guerre du Vietnam. Lors des primaires républicaines, après la victoire
écrasante de Mc Cain dans le New Hampshire pour la présidentielle 2000,
George Bush avait déjà ouvert des hostilités de façon colatérale sur
les états de service du Sénateur Mc Cain. Il s'agissait d'insinuer des
doutes.
En août 2004, une opération de toute autre envergure est engagée contre
JF Kerry. Les républicains font lever tous les tabous et conduisent une
attaque en règle contre les états de service de JF Kerry lors de la
guerre du Vietnam. C'est la 1ère fois que des attaques seront portées
non seulement sur les points faibles d'un candidat mais sur les points
forts de celui-ci afin que rien ne résiste à l'affrontement. Cette
technique est le résultat de l'apparition dans les équipes de campagne
d'une nouvelle fonction : " opposition research ".
Une fonction nouvelle à part entière qui est officiellement appelée " opposition research ", " oppo " dans le jargon quotidien.
Cette fonction consiste à passer au microscope tout ce qui pourrait nuire au concurrent dans sa vie.
Tous les magazines, journaux, votes sont épluchés pour détecter les
failles de l'adversaire, ses points manifestement faibles. Bien
davantage, aucun point fort n'est désormais reconnu comme insurmontable
ou incontestable.
Selon certaines sources dignes de confiance, 40 personnes auraient
travaillé dans une cellule de ce type pour chaque candidat à la
présidentielle américaine de 2004. Puis, toutes les informations sont
intégrées sur ordinateur.
Le RNC ( Republican National Committee ) a même organisé un service
interne de logistique qui couvre en permanence les principaux
démocrates. Tout est classé par thème. Vous appuyez sur un mot et
toutes les déclarations sortent avec leurs contradictions, leurs excès,
les votes…
Cette méthode a pris une telle importance que désormais le
1er service des " oppo " consiste à fouiller dans le passé de leur
propre candidat pour identifier ses points faibles afin de prévenir et
de s'organiser en conséquence. Ils effectuent ce travail avant même de
s'occuper des candidats concurrents.
Les campagnes électorales deviennent des vrais lieux de guerre avec
pour objectif quasi-déclaré : la destruction pure et simple de
l'adversaire. Cette " technique " connaît un développement accéléré
avec la place désormais prise par Internet. Le circuit entre l'émetteur
et le récepteur est tellement court que de telles " révélations " n'ont
plus à être filtrées par un intermédiaire extérieur comme un journal.
L'informatique offre des possibilités de stockage et de croisement
d'informations qui démultiplient les possibilités d'un telle approche.
Lors de l'élection présidentielle de 1990, chaque membre influent de
l'état-major de campagne de Bill Clinton avait sur ordinateur une
documentation classée par thème relative au Président sortant :
promesses non tenues, financiers des campagnes, votes … Tout était
ainsi réuni pour répondre sur l'instant à une initiative de leur
concurrent.
Cette approche rencontre une conjoncture d'autant plus porteuse que les programmes politiques ont perdu de leur importance.
L'enjeu n'est plus d'analyser un programme mais de mieux connaître une personnalité, son histoire, son tempérament.
L'enjeu n'est plus de croire dans l'opposition entre un candidat
honnête et un opposant malhonnête. La malhonnêteté est partagée. Ce qui
l'est moins c'est d'établir le degré de gravité.
Cette approche n'est pas limitée aux USA. Le 1er leader européen a
avoir repris cette organisation a été Tony Blair lors de l'élection de
mai 1997. Au 1er étage de la Millbank Tower, une tour défraîchie au
bordd e la Tamise, il a installé le modèle " Excalibur ".
Ce modèle comprenait un programme " rapid rebuttal " ( riposte rapide
) très directement inspiré des techniques de la " war room " de Bill
Clinton.
En 30 minutes, ce programme informatique mettait en évidence toutes les contradictions d'un concurrent, ses votes défaillants…
Lors de la présidentielle 2008, l'équipe de Barack Obama se préparait à
une offensive de ce type ; ce qui avait justifié initialement l'effort
financier pour acheter 30 minutes sur toutes les chaînes TV influentes
dans la dernière semaine du vote. Mais la crise financière était passée
par là et avait totalement changé la donne. Les 30 minutes ont été
occupées pour un autre message.
Avec la réforme de la santé, on voit actuellement sortir les "vieux
dossiers" à l'exemple notamment des données sur la "vraie nationalité"
de Barack Obama ... ; tous ceux qui étaient prêts pour novembre 2008
mais impossibles à utiliser dans cette conjoncture exceptionnelle.
Le rapport systématique sur les "dossiers diffusés" contre Ségolène
Royal impose désormais de se demander si la France est entrée dans
cette logique ?
La leader socialiste ne devrait pas prendre avec indifférence l'impact
de cette méthode qui est souvent comparée à la façon d'éventrer un
oreiller de plumes par jour de vent. On ne sait jamais où les plumes
partiront mais elles partiront et se déposeront ...
L'équipe Obama avait ouvert un site Internet dédié sur lequel les
rumeurs les plus "folles" étaient reprises, assumées et faisaient
l'objet d'un argumentaire détaillé. A quand l'ouverture d'un tel site
par l'équipe de la leader socialiste ? C'est un enjeu de communication
qui impose des arbitrages rapides car la facilité est d'opposer le
mépris à la rumeur sans savoir où les "plumes vont se déposer" mais
elles se déposeront et laisseront des traces ...
L'altération partielle de l'image de marque de Ségolène Royal dans la
période immédiate de la présidentielle 2007 n'est-elle pas liée déjà à
l'effet de telles méthodes ?